TAllllAGONE. -
JUIN
1811.
85
frcrc
1;
pour qu'il répétát, comme
il
l'avait <lit
tant de fois, que Joscph voulait comman<lcr,
qu'il se croyait générnl, qu'il
s'imagirrnit
que
pour l'étrc il suffisait de ne pas se montrcr ab–
solumcnt dépourvu d'cspl'it, de monter
a
cheval
et de fairc quclqucs signes de commandcmcnt;
que cela ne se passait pourtant pas de la sorte,
qu'il pouvaitenctre ainsi rle beaucoupdestupides
généraux placés
it
la tele des armécs pour lcur
honte et pour leur pel'tc, mais qu'il n'en était
pas de mérnc eles généraux Vl'aiment propres
il
eonduire les hommes ; qu'il fallait pour corn–
mander joindre
o
une vasle et profon<lc in–
tclligencc,
il
nn gran<l caractere, un travail
opioi3.lrc, une nttcntion continuc aux moindrcs
détails; qu'il avait, lui, ses élats ele troupes sur
sa table, et les
y
avait toujours; que e'étaicnt la
ses leclures favoriles; qu'il les avait
11
portéc de
sa main en se couchanl, et les feuilletait la nuit
quand il ne elormait pas; que gflice
ii
ces apti–
tudes naturellcs d'espl'it et de caraclcrc,
a
celtc
applicalion inccssantr,
a
une cxpéricnce im–
mensc, il pouvait cornmandcr et etre obéi, parce
que ses solelats a\·aicnt confiance en lui ; mais
que quant
il
Joscph, Dicu ne l'avait pas fait gé–
néral; qu'il était eloux et spirilucl. mais indo–
lcnt ; qu'il lui fallaiLdes plaisirs, et pas lrop de
ll'avail ; que les hommcs <lcvinaient insLincLivc–
mcnt ces elispositions, et que s'il lui eonfiait la
dircction des nrmécs
fran~aiscs
pcrsonnc ne se
croirait commandé par un te! chef ; que dcr–
riCrc lui on
Ycrrait
toujours l'officicr chnrgé de
le conscillcr, et que pcrsonnc n'obéirait, parce
<¡u'on se rirail rlu roi général, el qu'on jnlouse–
rait le général roi,
cxcr~ant
en réalité l'autorité
suprcmc; qu'il ne pouvait done pas lui accordcr
au deli1clu commandcmcnl de l'arméc Ju centre,
étcndant son nclion
o
vingt ou trente licues de
Madrid ; que pour de !'argent, il n'cn avait pas ;
que ses frcres, régnant sur les pays les plus ri–
chcs de l'E11rope, étaicnt sans ccssc
o
lui en de–
mander; que l'Espagne en nvait asscz pour en
fournir
il
tout le monde; que si Joscph savait
administrer
il
trouverait des rcssourccs; qu'il
avt1it
bien
u se procurcr
de
l'nrgcnt pour en
donner
a
des favoris, pour batir des résidcnccs
royales, et pour payer un luxe inutilc dans l'état
1
Pasplusquc dccoutumc, jc n'imaginc ici dcs Jiscom·sdc
fantaisic.NapoléonculaHcM.HreJcrcr,lorsquccclui·cire''inl
dcMadriJ,dcs conversationsélincclanlcsd'cspril ctdcgénie,
11a11slcsqucllesil dilplu5longncmcut C'lplus i11juricuscmcnt
tout ce que nous a\lons n1prorlcr. M. Hrede1·e1·, c111i écl'h·nit
clrnqucJourccqu'il voyaitetcntcntlait
1
aécrilccs convcrsu·
de ses affaircs; que si l'Espagne souffrait c'était
un malhcur auqucl il n'y avait pas de rerncdc ;
que les soldats
fran~ais
souffraicnt aussi, et que
ln
gucrrc était In gucrre; que si les Espagnols
étnicnt las de souffrir, ils n'avaicnl qu'3 se sou–
mcLtrc; que ces prétcnlions de Joscph
1
la
bonté,
a
l'nrt de séduirc les pcuplcs, étaicnt ri–
diculcs; que son cspoir de fai1·c avec des millions
ce qu'onnc faisait pas avcc dcs millicrsd'hornmcs
ne l'étnit pns moins ; que si on lui cnvoynit
<le !'argent el lui retirait rlcs troupes, cct nrgent
serail bicntót mangé, el Jui, Joseph, avcc sacour
rcconduit'honteuscment
i1
Jlayo11nc par quclqucs
bandcs armécs ; qu'il fallait bcaucoupde soldats,
bc:rncoup de vigucur, et
de la
tcrrcur mCmc,
pour rérluirc les résistnnccs de l'Espngnc, que la
tcrrcur amCncrait
la
soumission, et
que, la
sou–
mission vcnuc, la bonoc ndminislrntion: qu'on
dcvnit a tous les pcuplcs
1
s'cnsuivn1it; que, l'Es–
pagnc rnt.tachéc par ces moycns
3
son nouvenu
roi, le lcmps vicndrait alors pour Joscph de se
foirc adorcr, s'il
y
était aussi habilcqu'il le pré–
tendait, etc.
Napoléon, ne prcnant que le cóté ridiculc des
demandes de Joscph, n'y répondnil pasde bonne
foi, car
il
était bcaucoup trop clairvoyant pour
ne pas sentir ce qu'il y avait de vrai dans ce
qu'on luidisait; mais il ne pouvait plus changcr
de
systCmc, ni accorder
a
Ja
gucrre d'Espngnc
ce qu'il s'était mis d:rns
la
néccssité de consacrcr
o
la guerre de Russic.
11
voulait done continucr
:1 soutcnir ccltc gucn c d'Espagnc
3
peo
prCs
par les mCmcs rnoycns, cspérnnt í]u'en cxigcnnt
hcaucoup des hommcs ils fcraicnt pcut-ctrc
commc un chcval qu'on force, et donncraicnt
plus qu'a l'ordinairc;qu'avcc moinsde rcssourccs
on réussirait plus lcntcmcnl, nwis c¡u·onréus–
sirait pourlant, et qu'cn tout cas, si on
ne
réus–
sissaitpas,
il
réussirait, Jui, pour tout le monde,
et que ses succcs sur le llorysthcnc suppléc–
rnicnt
a_
CCUX
qu'on n'aurail
pa5
oblCllllS
Slll'
le Tagc : penséc fu ncstc, néc chcz lui de l'éloi–
gncmcnt des licux sur lcsqucls il raisonnait, et
ele l'cto11relisscment un pcu volontairc ele sa ti·op
grnndc
fortune!
Dans une parcillc disposilion, le voyagc de
Joscph, cntrcpris pour pcrs11ndcr
a
Napoléon
lions au momcnl
m~mc
oti elles curcnl licu, el c'csl en les
rapproch:rnt,gn\ce
a
une comnmnicationquc nousdc\'ons;\
safamillc,1les lct11·cs deiliapolCon, quc nous pouvons rappor·
ter lcspcnsécs tlccc\
ui-ci.Onfitcuoulrcécl'i1·c laplusgrn11dc
parlicilcccs chosesit M. de LníorCt, no!rc ministre¡\ Ma–
dl'id.