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TARRAGONE. -

JUIN

1811.

81

On vous mépriscvous-mémc,on vousinsulle publi–

qucmcnt, au momcnl ou l'on lravaillc :\ fnirc de

vous notrc roi : commcnt vcut-on quenous nous

soumctlions? Vos fonclionnaires, bafoués par les

généraux, mourant prcsquc de foim, sont ré·

duits ase nourrir dela ralion du sold:il; commcnl

pourraienl-ils jouir de la moinclrcconsidéralion?

Vous allez

a

Paris, rapportcz nos paroles ¡, l'Em–

pereur. Votrc départ esl interp1·été ele deux

fo~ons

: par 1•os cnnemis, commc l'hcurc ou le

'

1

oilc va Clre cnfin déchiré, oU l'Es¡rngnc va Ctrc

déclaréc provincc

frao~aisc,

a la

fn~on

de Lubcck,

de llambourg, de Florenec et de Romc; par vos

amis, rares cncore, commc un recours au génic

supérieur de 1•otrc frcrc, afin de l'informer de ce

qu'il ignore, pcut-Ctrc mCmc de l'amcncr ici, et

de tout arranger par sa préscnec. T;\chez que

ccltc dernierc supposilion se réalisc. Courez

iJ

Paris, parlcz, faites cnlenclrc la vérité, obtenez

de nouvclles forces, rapporlez pour vous de l'au–

torilé, pour nous une déclaration rassuranlc

quant

a

l'intégrité de notrc terriloirc, rapportcz.

des moyens de discipline, c'csl-a-di1·e de quoi

payer vos troupes et les nólrcs, et soycz ecrlain

que s'il en cotilc de !'argent

a

la Frunce,

l'Espagnc rcndra bicnlól avcc usure les avances

qu'on lui aura fnilcs. L'inslant csl propicc, car

malgré vos rcvcrs npparcuts, malgré les succCs

momcntanés de vos cnncmis, la lassilude cst

généralc, clic pcul se convertir ou en soumis–

sion, ou en cléscspoir, déscspoir qui sera terrible

pour ccux qui l'auront provoqué. -

Ces parolcs, proférécs par des bouchcs hon–

nclcs et dignes de foi, avaient élé porlées ¡, Pal'is

par Joseph, qui, veou en France pour le bap–

tcme du Roi de Rome, y avail passé les mois ele

mai, de juin et de juillct. Malhcurcusemcnt

Joseph, !out en ayant raison, avait ses foiblcsses,

r¡ui élaicnl fort parclonnablcs assurément, m:iis

<¡ui luí ólaient auprcs de Napoléon l'aulorité

dont

il

aurait cu bcsoin.

11

était, commc nous

J'avons dit, bon, scnsé, honnete, mais indolent,

ami des plaisirs, de la dépensc el des complni–

sants (en quoi les princes nouveaux ou ancicns

ne diffcrcnl gucrc), infinimenl trop persuadé de

ses talcnts mililaircs el lrcs-jaloux de son aulO–

rilé.C'étaient

Hi

de hicn pclilsdéfauts sans cloute,

mnis quand il était venu dirc qu'il luí follait de

l'argcnl, beaucoup plus cncorc que des soldats

frau~ais,

car avcc des Espagnols bien payés il

conquerrail l'Espagne et s'y fcrait ndorcr; que

cependant il luí follait aussi des soldats

fran~ais,

spécialcmcnt conlre les Anglais; qu'il lui falloil

CONSULAT,

' ·

cnfin du pouvoir, et notammcnt le commandc–

mcnt supéricur eles urmécs, afin ·de répl'irncr les

cxccs et d'obtcnir le respccl dti i1 sa qualilé de

roi, ces choses vraics en granlle parlic, mnis

suspectes clans sa bouchc, avuicnl été tres-mal

accucillics,

n

ce point qu'un intcrmédinirc

élail

dcvcnu

néccssai1·c

pour cmpCrhcr des scCncs

fachcuses entre les clcux frcrcs. Le princc IJ1·1·–

thicr, commc

mnjo1•

généraldcsnrmécsd'Espngnc,

nvnit

élé

choisi, el on n'cn pouvnit trourcr un

plus judicicux , plus discrct, plus informé ele

toules choscs. Par malheur il n'avait pas aulant

d'influcncc que ele raison, el s'il était incapable

ele lrnhir la vérilé, il n'élait pas toujours assez

lwrdi pour la dire toul enlic1·e. De plus, Napo–

Jéon élait en ce momcnt cxnspéré conlrc ses

frcrcs. Réccmmcnt, Louis avait jclé

a

ses piccls

la couronnc de llollandc; Jéróme, qui arait

re~u

le Hanorrc en addition

¡,

In Wcslplrnlic,

¡,

con<lition ele supporlcr ccrtaines chargcs, n'avait

pas rcmpli ses cngagcmcnls, et il en avnit été

puni par le rct1·ait cl'une parlic du llanovrc ;

Murnt, bon nrnis légcr et rcrnuant, excité pnr

sa spi1•ilucllc et ambiticusc épouse, al'ait cruellr–

mcnt déplu cu dépcns:mt trop, en

n1~glig:c:rnl

sn

marine.

En

oulre,

on

l'avait ar.cuse

cravoir

sous

divcrs prélexlcs parlemcnté avec les Anglais le

long

des cotes de son roynurnc. Napoléon

Cll

avait élé irrité au poinl d'envoyer des instrnc·

tions secretes au général Grcnier, pou1· q11e ce

géncral cút loujours l'ccil ouvcrt sur Naples et

fút prct ¡, )' marchcr avcc le corps de réscrve

qu'il

commandnit.

Eníin

on " ''u

qucls

emporlc·

mcnls nvnicnt

inspi1·és ;\ Nnpoléon les demi-t1·n·

hisons du eni·clinal Fcsch. J}inforluné Joscph

vcnait clone forl mal :\ propos pour cxprimcr

dans les circonstanccs préscntcs des vérilés

désa·

gréablcs. Napoléon lui avait fait dire que s'il

voulait abdiqucr commc Louis, il en étail le

nrnit1·e; que ses frCrcs pouvaient

tous

quiltcr

les

t1·óncs

qu'il

leur

nvnit

donnés, qu'ii

n'avniL

nucun

bcsoin d'cux, que mcme ccltc cond11ilc ele lc11r

part simplificrait bien des choses en Eu1·ope, que

j11sque-li1 ccpcndanl ils étaicnl non-sculcmcnt

rois,

mais

générnux

sous

ses

ordrcs,

et c¡u'il

n'cnlendait pas qu'ils <léscrlassent lcur poste

sans !'en

prévcnii·,

s:ms

rcce'1oir

son

nulorisa–

tion; q11c si lui, Joseph, se préscnlait

a

llayonnc

sans ce ¡ll'éli111inai1·c indispensable, il sc1·ait ar-

1'CLé.

C'étaient

li1

lrs prcmicrcs cxplosions de la

vive

11umcur de

Nnpoléon. Cct instant passé,

on en était vcnu, par l'inlermédiaire du pri11ce

6