TARRAGONE. -
JUIN
1811 .
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qui, cntourécde murailles renvcrsées par le fcu
de l'ennemi, avoit précipité plusicurs fois les
Anglaisau picd des breches qu'ils avaicnt tenté
d'assaillir. Si le sccours demandé n'arrivait pas,
si l'armée de Portugal, oubliant ses griefs, ne
dcsccndait promptcmcnt sur la Guadiana malgré
les difficultés que la chalcur opposait
a
lamarche
dr.s troupes, Badajoz allait succombcr, et la puis·
sante arméc d'Andalousic, partic de Madrid
l'année précédcntc au nombre de quatrc-vingl
millc hommcs, el bien réduitc, hélas
!
dcpuis ce
tcmps, allait se voir enlcvcr un trophéc qui élait
le scul prix qu'clle cút oblcnu de ses sou!franccs
et de son courrigc.
En Andalousic, la situation, moins périlleusc,
était pourtant tout aussi triste. Le siégc de Ca–
dix, qui aurait chi élre l'uuique occupalion de
l'arméc d'Andalousic, tandis que la conquclc de
Badajoz, imaginéc par le maréchal Soult pour se
dispcnser d'allcr en Portugal. n'avnit fai t que
diviser ses forces et lui créer d'inutiles dangcrs,
le siégc de Cadix
n'avan~ail
pus. t e marécbal
Viclor, réduit
a
deux divisions sur trois, n'avait
pas plus de douzcmillc hommes
1i
mettrc en ba–
taillc, et pouvait
il
peine gardcr ses ligncs, loin
de faire le moindre progrcs.
!l
reslait dcvanl
l'ilc de Léon avcc sa ilottillc qu'il avait crééc,
ave.e ses gros morticrs qu'il avait fondus, saos
matclots pour manreuvrcr !'une,
sa11s
munitions
pour fai1·c usage des aulres. Humilié et mécon–
tcnt du róle auqucl l'avait condamné Je maré–
chal Soult, il demandait pour unique prix de
ses SCl'Viccs en Espagne d'en ctrc immédialemcnt
rappclé. Les insurgés de la Ronda n'étaicnl pas
moins incommodes pour le général Sébaslbni,
to!jours occupé
1i
se maintenir
il
Grcnadc contre
les Anglais cl'un cóté, contrc les troupes deMur–
cie et de Valrncc de l'aulrc. Ce général, admi–
nistraleur modéré et sagc, était dénoncé par le
maréclial Soult commc ne sachant pas gouvcrncr
la pl'ovincc de Grcnadc, qu'il gouvcrnait micux
ccpcndant que le maréchal ne gouvcrnail l'Anda–
lousic, et sollicilail son rappcl avcc des instanccs
non moins vives que cellcs du due de llcllunc.
Une sculc province, commc nous l'avons
déjU
dit, une scule arméc préscntaicnt un ospcct sa–
tisfaisant, c'ét::iicnt la provincc et l'arméc d'Ara–
gon sous le commandcmcnt du général Suchcl.
Ce général élait lwbilc, et
il
était hcureux aussi,
car il y a des vics dans lcsqucllcs une cerlaine
sagcsse sernblc n!lircr un ecrtain bonhcur. On
doit se
so11\
1
c11ir
qu'il avait succcssivcmcnt pris
Lcrida , Mcquincnza, 'L'ortosc, et fait régocr
l'ordre e.t la bonne administration daos sa pro–
vince, qui, par une aulrc
cspccc.debonne for–
tunc, n'élnit ni travcrséc par les nrmées frnn–
~aiscs
dont clic n'étail pas lc chcmin,ni mcnacée
par les Anglais dont elle n'étai! pas Je but, de
sortc qu'cllc se trouvait prcsquc hcurcuse au
milieu des alfrcuscs convulsions de l'Espagnc, el
aimait preS<¡uc son ''ainqucur au milicu· des
haincs déchainécs contrc les Francais.
C'élait aux fronticrcs de son °gouvcrncmcnt
qnc
le
général Suchct renconlrail ele séricuscs
difficultés. Sur la limite des tcrriloires de Va–
lcnce, de Guadalaxarn, de Soria, de Navarre, de
Calalognc, il se voyait sans cessc assailli par les
bandcs. Villa-Campa pres de Calalayud, l'Empc–
cinado vcrs Guadalaxara, Mina en Navarrc, et
les miqnclc!s sur Ja frontierc de Catalognc, ne
laissaicnt pas un jour de rcpos
a
ses troupes.
Mais ce fortu né général commandait
a
des licu–
tcnanls et
1i
des soldats dignes de Jui, et il n'arait
pas une affaire de détail avcc les bandes qui ne
fút un pclit triomphc.
En Catalognc au contrairc tout élait en com–
bustion. tes miquclcts, appuyés, cxcilés par
l'arrnéc cspagnolc de Catalognc, qui avait sa
base;\ Tanagonc, désolaient ce!lc province. 11
n'y avnit pas un défilé pres duc¡ucl i!s n'attcn–
disscnt les convois pour a!laquer les cscortcs
trop faiblcs, Jcur nrrachcr les prisonnicrs, égor–
gcr entre lcurs bras les maladcs et les blessés,
et lcur cnlcvcr les vivrcs c¡u'ellcs étaient char–
gécs d'introduirc dans les places, et surlout dans
Jla1·cclonc. 'Lrndis que les mir¡uclcls rcndaicnt
les roules de l'intérieur impralicahlcs, les llot–
tillcs nnglaiscs rcndaicnt tout
aussi
dangcreuscs
les roules qui longcaicnt Ja roer. La ville de
llarccJonc, OÚ
i!
faJlait llOUl'l'ir
U
Ja fois Ja gar–
nison et les habilant.s, avait de la peine
i1
suli·
sislcr,
bien
qu'unc <1rméc cntiCrc, ccllc du rnn–
réchal Macdonald, ftit cxclusivcmcn! consacrée
a
la ravilaillcr, et c¡u'on ctit hasardé plusicurs
cxpéditions maritimcs pour luí cnvoycr par mcr
des vivrcs et des munitions. En général il
y
cn–
trait
i1
pcu pres le c¡uart de ce qu'on lui dcsti–
nait. Le général Mauricc-Mathicu, qui en était
Je gouvcl'lleur, déployait autant d'inlclligcncc
que de fcrmeté pour se soutcnir dans ccllc si–
tuation si diílicilc, el pour inlimidc1· les habi–
tants sans les pousscr au désespoit'.
11
vcnail
réccmmcnt dese
trouvcr
dnns un
grand péril, et
s'cn élail fort hcureusemcnt tiré. On avait dé·
couvc1·Lau sein de Ja ville un complot ourdi par
les cnncmis du dednns pour la livrcr aux enne-