LIVI\E
QUAllANTE
ET
UNIEME.
M. de Louriston, qui crnignait benueoup une
nouvellegucrre nu Nord, et quivoyait avee dés–
espoir qu'en nrmanl ainsi les unsen rcprésaillc
des autres, on finirait bientót par se mettre réci–
proquement l'épée sur Ingorge, priait, suppliait
l'cmpcreur Alcxnndre d'clre le plus snge des
deux, et de prcndre l'initintive des explications
qu'on diJTérait de se donncr ou par un foux
nmour-propre, 011 par un calcul mal entcndu.
" Dcmandezdone, disnit-il
a
l'crnpercur Alcxnn–
dre, une indemnité pour Oldenbourg, et je ne
mets pas en doute qu'on vous l'accordcra. En–
voyez quclqu'un
a
Paris pour )' porlcr
VOS
gricfs,
ctj'ai
la
conviclion qu'il sera.
rc~u
m·cc cmprcs–
scment. On pourra alors s'cxpliquer, et snvoir
enfin pourquoi on cst prCt
íl
s'égorgcr.
11
Aces
prcssnnles instnnccs, l'cmpr1·em· Alcxnndre op–
posnit un refus absolu.
11
ne voulait, comme il
l'avaitdéja <lit, iien dcmander pou1· Oldenbourg,
ni en Allcmag:ne ni en Pologne, pnrcc qu'cn
Allemagneon ne manquerait pas de le dénonccr
comme cherchantaspolicr les princcs allcmands,
parce qu'en Pologne Nnpoléon l'aceuscrait <ln
chercher a <lémembrer le grand-duché de Vnr–
sovic, et s'cn fcrait un nrgumcnt nupri:s des
Polonais. L'cmpercur Alcxandre ne voulait pas
non plus se donncr l'ap¡rnrcnce d'un prince inti–
midé qui envoyait demandcr la paix aux Tuile–
rics.
JI
était d'aillcurs intimcmcnt convaincu
qu'il ne l'outicndrait pas, et redoutait rncme de
précipiter la gucrreens'expliquant catégorique–
mcnt sur ccrtains objcts, tcls que les nJTaires
cornrncrciales par excmple. Si, en effel, on le
prcssnit, il étnit résolu
a
dirc formcllcrnent que
janrnis il ne fcrmcrait ses porls
ii
ce qu'il nppc–
Jait les ncutrcs, et
a
ce que Nnpoléon appclnit
les Anglais, cL craignait qu'uncdéclaration aussi
ncttc n'amcnfit une rupturc instautnnéc. La
gucrrc, que Nnpoléon voulnit a un nn de dis–
tnncc, lui la prévoynit
a
un an aussi, et l'aimnit
mieuxdifférée qu'irnmédiate.C'cstpour celaqu'il
se rcnfcrmait dans une cxtrCmc réscrvc, affir-
mnnt avcc sincfrité qu'il désirait la paix; et en
prcuvc, promcttnnt, si on désarmait, de désar–
mcr
¡,
l'instant mérne, njoulant que legrief qu'il
avait dnns In spoliation du prince d'Oldenbourg
ne conslitunit point une nJTnire urgente, qu'il
cspérnit une indcmnitC:,
muis c¡u'il n'insisterait
pas pour l'obtcnir sur-lc-chnmp, qu'il snurait
l'nltcndre, et qu·cn ngissant ainsi ce n'était píls
un gricf qu'il entendnit se réscrver, car il n'hé–
sitait pasa déclarcr que pour ce motif il ne fcrait
point Ingucrrc
1 •
Dansccttc siluation délicnte et grave, il nu1·nit
fallu bcnucoup de soins, beancoup de ménnge–
mcnts pour prévcnir la gucrrc, mais
il
suffisait
d'un scul mol iniprudent pour la rendre inévi–
tnblc, peut-ctre rncmc immédinte. Or, avee le
caractere bouillant de Nnpoléon, nvcc sa hnr–
dirsscde langage surlout, on dcvait craindreque
ce mol il ne le laissat échnppcr.
Le -15noút1811 , jour de sn fctc et de grande
réeeplion, il
y
cut cerclc
a
la cour. Cornme on
le C0111Hlissnil
Jll'OlllJll
Udire
CC
qu'iJ avait sur Je
cccu1\ on le suivait, on l'écoutait pour· rccucillir
r¡uclr¡ue parolc qui elit lrait
il
!'importante qucs–
tion du moment.
11
était ce jou1·-1i1dispos, gai,
enclin
á
parlcr. Son supcrbe visngc était rnyon·
nnnt de bonne humcur, de elnirvoynncc, et il
cút altiré des hommcs moins curicux, moins in–
tércssés a l'enlendreque ceux qui l'cntournient.
La plupnrt des invites ctaient pnrtis : il rcstait
nupres de lui les nmbassndcurs de Hussie et
d'A11trichc (princes Kourakin et de Schwnrzcn–
bcrg), les nmlrnssadcurs cl'Espngnc el de Naplcs,
et un ou deux de ces ministres des pelites cours
allcmnndcs, toujours aux écoulcs pour snvoir ce
que Jll'Cparcnt lesgrnnls qui ont coutume de les
foulcr aux picds
2
.
Suivi de ces pcrsonnagcs, al–
!ant, vcnnnt, discournnt sur tout, Nnpoléon <lit
a
l'ambassnd-cur d'Espng:nc que c'était·unc mau–
vnise saison dnns son pnys pom• les opérntions
miliLuircs, que ricn ne pouvait done mnrchcr
vite en ce momcnt, nwis
qu~it
l'automnc
il
pres-