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LIVRE QUARANTE ET UNIJ\ME.
siéges mcme apres la captivité de Savone, venir
échoucr au port dans une affoirc de pure forme,
telle que l'institulion canoniquc. lis disaicnt que
les prélats
fran~ais
étaicnl des irnprudenls et
des fous, qu'cux Italiens s'étaient généralcmcnt
abstcnus dans ces qucstions, parcequ'ellesne les
intércssaient guerc, nrnis qu'ils étaient prets, si
on avait en quelque chose bcsoin de leur adhé–
sion,
a
la donner sans réscrve. Le cardinal
Maury, qui ue voulait pas assistcr
a
de nouvelles
révolutions, qui avait le crour plein de rccon–
naissance pourNapoléoneldercssentimcntcontrc
l'Églisc si ingratc cnvers luí, ne manqua pas de
porter toutcs ces parolcs au ministre des eultes,
el
a
l'Empcrcur lui-mcme. Dix-ncuf llaJicns
s'étaicnt ofTcrts, et on pouvait bien cornptcr sur
cinquantc ou soixante prélals franyais, moins
indifTérenls que les llaliens
a
la solution, rnais
presque aussi cffrayés, et demandant
a
en finir
comme il plairait au gouvcrnement. " Prencz-lcs
un
a
un, dit le cardinal Maury, et vous en vicn–
drcz plus facilcment
a
bout qu'cnmassc. " Expri–
manL mCme sa remarque avec la fomiliarité
originale qui lui était propre, il ajoula :
«
C'est
un excellcnt vin, mais qui sera
mei/leur
en úou–
teilles
q¡¡'e11 tonneau..
»
On profila de \'avis, et
on rédigca un décret
a
pcu pres semblablc
a
cclui qui avait prévaJu dnns la commission,Jeque\
limilait
b
un an le délai pour rcmplir les siégcs
vacanIs, dont
si~
mois poui· la nomination par le
pouvoir tcmporcl, et six mois pour l'institul.ion
canoniquc par le pape, apresquoi le métropoli–
lain de la provincc ccclésiastique élait chargé
d'institucr les sujcts nommés. On ajoula
a
ce
décrct la clausc d'un nouvcau rccours au pape,
pour lui demnnder sa sanction, mais avcc un
sous-cntcndu cntiCrcmcnt
contrai1·c
aux conclu–
sions de l'évcquc de Tournai.
11
était cutcndu,
enefTet, que si le pape n'adhérait pas, le concilc
- prcnd1·ait une résolution indépcndante, votcrait
le décrct nouvcau, et l'cnvcrrait
i1
l'Empcrcur
pour qu'il ftit convcrti en loi de !Úat. JI ful
mémc convenu que pendan!. qu'unc dépulalion
se rcndrait
h
Savonc afin d'obtcnir l'agrémcntdn
saint·pCre, on rcticndrait
a
Paris les principaux
mcmb1·es du concile pour lcur fairc émctt1·e un
sccond vote en cas derefusde la parl du pontif'c.
Ce plan ainsi arrété, on appcla les uns apres les
autreschcz le ministre des cultcs les ¡wélals sur
lcsqucls on croyait pouvoir
c~mptcr.
Dix-neuf
évCqucs ilaliensadhé1·Crcnt avcc cmp1·csscmcnt;
soixantc-six évCqucs
fran~ais
suivirenL
lcur
cxcmple, ce qui faisait quatrc-vingt-cinq adhé-
rents, sur cent six membres admis dans Je con–
cilc. Ccux qui, au nombre de vingt cnviron,
n'avaienl pasadhéré, n'étaicnt pas tousdes oppo·
sants déterminés. La moitié faisait des réscrves
plulót que des rcfus.
Quand ce résuliat fut acquis, le prince Cam–
bacéres, qui était toujours appclé pour cherchcr
les termes moycns, les expédicnls ingénicux, et
qui avait bcaucoup contl'ibué
a
faircadopler cetle
solulion pacifique, eonscilla d'asscmbler de nou–
veau le concilc, et de lui préscntcr l'aelc dont
l'adoption nepourraitplusdésormais faircdoutc.
Napoléon
y
conscntit, et ordonna par décrel une
nouvcllcconvocalion pour le 5 a01il..
Le 5 aotil, en efTet, leconcilc ful réuni dans
le licu ordinaire de ses séanccs. Pcrsonnc ne
demanda pourquoi on avait été si brusqucmcnt
séparé, pourquoi on était si brusqucmcnt rap–
pclé, pourquoi trois mcmbrcs du concilc, au
licu d'clrc préscnts, étaicnt
11
Vincennes; on
enlcndit la leclure du décret, et on le vola
prcsque
a
l'unanimité.
Rcstait
a
obtenir la sanction du pape, non pas
qu'on rcconnut l'incompétcnce du concile, mais
parce qu'il fallait se conformcr
a
\'usagc naturcl
et néccssairc de soumettrc au chef supreme de
l'Églisc les acles de toute assembléc de prélats.
Napoléon conscntit
a
cnvoycr une députation
composéc d'évcqucs et d'archcveques pour solli–
citcr l'approbation papalc, et
1
y
joindre qucl–
r¡ucs cardinaux pour tcnir lieu
á
Pie VII de ce
conseil dont toujours il se disait privé, des qu'on
lui dcmandait une résolulion r¡uclconquc. Les
cardinaux choisisfurcnt les cardinauxde Bayane,
Fabricc RufTo, l\ovcrclla, Doria, Dugnani. Ou
y ajouta l'évcquc d'Édcssc, aumónier du pape.
tes prélats choisis furent les arcl1cvéqucs de
Tours, de Malincs et ele Pavic; les évcqucs de
Nantes, de Trel'es, d'Evreux, de Plaisancc, de
Fcltrc, <le Facnza. lis dcvaicnt partir sur-lc–
champ, pour ne pas fairc trop attendrc leurs ·
collCgucs rctcnus
i1
Paris nfin d'émcttrc un nou–
reau vote en casde rcfus de la part du
pape.Dureste onne croynit guCrc
~.
ce rcfus, surtout en
se rappclant la nolc rnpportéc de Savonc par
MM. de Barral, Duvoisin et Mannay.
Napoléon avaiL acccpté cctlc fin du concile,
'cl'abord parce que c'était une fin, cnsuite parce
r¡u'il avait
¡,
pcu ¡11·cs attcint sonbuten obtcnant
la limilation fort élroite de l'institution canoni–
quc. Mais moralcment il se scntait battu, car une
opposition d'aulant plussignificativc qu'cllc était
. involontairc et pourainsidirclrcmblantc, s'était