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LIVRE QUARANTE ET UNIEME.

question soulevée. Une telle diffieulté, suivant

eux, ne pouvait ctre résolue sans le pape' que

de concert avec lui, et le concile des lors était

incompétcnt pour la décider

1

lui seul. Sans

doute il aurait micux valu qu'il en füt ainsi, ré–

pliquait M. Duvoisin, mais il s'agissait seulement

du cas d'extrcme nécessité, et il fallait bien

admettrc que pour ces cas fort rarcs chaque

Églisc avait en cllc-mcme le moycn de se sauvcr,

il fallait adrncltrc que si on était par une force

majcurequelconquc séparé du pape pcndanl des

annécs, que si pcndant des annécs

il

n'y avait

point de pape , et que la chairc de saint Pierre

fUt

vacante, ou, comme

il

était arrivé,

fllt

occu–

péc par un pontifc indigne, il était indispensable

que le métropolitain rent.rat dans la faculté qu'il

avait cuc jadis d'institucr les évcqucs. Le cardi·

nal Casclli lui- mcme s'écriait que s'il n'cxislait

plus qu'un seul évcque au monde, celui-la aurait

ledroit d'instiluer tous les autres. Cellc suppo–

silion mcttait hors de lui l'archcvcque de Bor–

dcaux; il disait qn'cllc était conlraire aux pro·

mcsscs de Jésus-Christ, qui avaitpromis l'élcrnité

i1

son Églisc.

11

C'cst pour que l'Église soiL étcr–

nelle, lui répondait-on, qu'cllc doit avoir le

moycn de se pcrpétuer en obéissant aux regles

du bon sens, et en se sauvant en cas de néccs–

silé.

11

Les csprils sagcs voulaicntque, sortant de

ces suppositions chimfric¡ucs, on se p!nQñt dans

la réalité, et qu'on examina[ si on pouvait dans

la circonstance préscntc, par excmplc, se passcr

du pape pour institucr les évcqucs. Et en elTct

en se

pla~ant

dans la vériiablc hypothese, cclle

d'un pape s'obstinant

i1

se servir du rcfus cl'in–

stitution comme d'unearme, il était impossible de

soulenir qu'unc Église n'cúL pas le droit de se

suffire

a

cllc-mcme et ele se soustrairc

a

l'abus

el'une faculté dcstinée

a

un tout autre crnploi.

11 fallait pourtant en finir de toutcs ces subti–

lités et se prononcer. Or au vote il n'y cut que

lrois voix pour la compétcnce du concile, cclles

des trois prélats enyoyés

1

Savone. Le cardinal

Caselli lui-mcme, qui avait posé la question

commc

M.

Duvoisin, n'osa pas opincr commc lui,

et le cardinal Fcsch, toujours ménageant le parti

ennemi deson nevcu, commit la mcme faiblcssc.

C'cst ainsi que sur douze voix il n'y en cuL que

trois qui oscrent affirmcr la compétcnce du

concile. Qu'on usal de cetle compélcnce avcc une

grande réscrve, uniquement pour pcscr sur le

pape, pour pescr sur Napoléou lui-mémc, pour

arrach(:l', l'un

a

ses scrupulcs, l'autrc

a

son hu–

meur despotique, soit; mais nier la compétence

du concile dans unequestion de discipline pa1·ti–

culiere , c'était se désarmer complétemcnt, et

laisser Napoléon et le pape en présence J'un de

l'autrc, sans aucunc puissance intcrmédiairepour

les rapprocher.

Desce momcnt, l'objet de la convocation était

manqué, et on s'exposait

1

toutes les chances de

la colcre de Napoléon, qui voudrait résoudrc la

difficullé sans le secours du pape ni du concilc,

c'est-a-dire en finir par des Yiolenccs. On courut

a

Saint-Cloud pour l'instruire de ce qui arrivait.

11 en fut cxaspéré. La vue de son onelc venant a

son tour l'informcr, et déplorer aupres de lui le

résultat qu'il n'avait pas cu le couragc de préve–

nir, le jeta dans un surcroit d'irritation , qui

s'exhala en paroles méprisantcs et injurieuses.

Le cardinal ·affcclant de défendre la commission

par eles considérations théologiques, Napoléon

l'inlcrrompit, luí demanda avcc dédain ou

il

avait appris ce dont il parlait, lui <lit que luí

soldat en savait davanlage, que du reste, la plu–

part deses eollegucs de l'Église

fl'an~aise

n'élaient

gucre plus savanls, qu'il avait voulu leur rcndrc

lcur iniportance, rcstitucr a l'Église gallicane la

grandeur qu'clle avait cue sous Bossuet, mais

qu'ils n'étaienl pas dignes de celte mission, qu'rm

tieu rl'etre les l"'i11ces de l'Église ils n'en étaient

que les bedeaux,

el qu'il se chargcr,1it

1t

lui seul

de la tirer d'embarras; qu'il allait fairc une loi

par laquelle il cléclarcrait que chaque métropoli–

tain suffisaiL pour instituer les évCqucs nommés,

qu'clle serait

a

l'instant mcmc cxécutée dans toul

l'Empirc, et qu'on vcrrait si l'Église ne ponvait

passesauvcr sans lepape. Toul celaéiait possible

assurémcnt, mais c'était revenir

a

l'ancicnnc

constitution civile du clergé, clont Napoléon s'é–

tait tant raillé dans le tcmps , et dont

il

avait cu

la gloire de sortir par le concordat.

Dans le momcnt sur\•int M. Duvoisin, accouru

de son cóté pour ralmcr une colere facile

a

pré-.

''oir, et enprévenir les conséqucnccs. Lt vuc de

ce prélnl tirn Napoléo11 de l'irrilalion oú le jelait

prcsque toujours la présencc du cardinal Fesch,

et, rcprcuant son sang· froid,

il

diL:

11

Écoutons

M. Duvoisin , cclui-la sait ce dont il parle. ,,

M. Duvoisin, déploranta1·cc raison que leconcile

se ftit désarmé en contcstant lui-rnérne sa com·

pétence, soutinl pourtant qu'il ne follait pas agir

commc si tout éiait perdu, et qu'cn prenant une

autre base que la eompétcnce du concile, en

s'appuyant sur la note mcmc de Savonc, il était

possiblc pnr une aulrc voic d'nrrivcr au mCmc

but. On pouvait, suivant lui, faire une déclara-