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IJVflE QUARANTE-SEPTlllME.

sa somnrnlion, déLouchc1· avcc ses cent mille

hommt•s de In llohcme en Silésic, prendre en

flanc les conlisés que les

Fran~ais

allaicnt abor-

1lcr de fronl, et si clicagissait de la sorte il était

impossiblc qu'il rcstut dans un mois un scul

Russe, "" scul Prussicn entre l'Elbc et le Nié–

men. Alo1·s l'Europe se t.rouverait

a

la merci tic

la Francc et de l'Autricl1e victorieuscs, et le

¡mtogedes dépouillesserait facilc1 faire. L'em–

pereur

Fran~ois

prendrait la Silésic, la Silésie

sujet étcrneldcs regretsde la maison d'Autriehe,

une bonneporlion du grand-duché deVarsovie,

et enfin l'lllyl'ie, promise dans tous les cas. On

indemniserait la Saxe de la perle du grand–

duchc\ ele Varso1·ic en lui donuant le Brande–

bourg et Bcrlin ; on rejctlerait la Prussc audela

de l'Otlc•r,

011

lui laisscrait la Vicillc-Prusse, on

y •jouleraitla principale¡rnrlicduduchéde Var–

SO\'ic, el on en fcrnil une

espCcc de Polognc,

moilié allemanele, moitié polonaisc, •)'•lit pour

capilnles Krenigsberget Vnrsovic.

JI

esl biencerlnin que l'Autrichc, en jclnnt en

Silésie les cent mille hommes qui élnient prcls,

et au bcsoin les cent millc nutres qui olloient

l'Clrc dnns lrois rnois, dcvnit assurcr la défoitc

tolale ele l'Europc, et la forcc1·

a

lrailcr sur-lc–

cliornp. Mais que! résullot Napoléon lui offrail-il

pom· ladécidcr

a

un pnrci\ cmploi de ses forces?

11 lui offrait de rcporler la Prusse au clc\11 de In

Vistule, de ne laisscr

a

cc

\lc.ci

de ses ancicns

Élnls que InVieillc-Prussede Donlzig

a

Krenigs–

bcrg, et d'y njoulcr legrand-duchéde Vnrsovie,

c'cst·h-dirc d'cn fairc une Polognc, el de mcttrc

a

sa place, cnl1·e l'Odcr eL l'Elbc, la rnaison ele

Soxe. 11 lui offrait done puremcnt elsimplement

de délruirc la Prusse, car cctlepuissoncc, lrans–

portée

il

Krenigsbcrg ou

il

Varsovie, ne seraiL

pns plus dcvcnuc une Pologne, que la Saxe

élcnduc de Drcsde

il

Bcrlin ne sc1·ait dcvcnue

une Prussc.

La

force d'une nation ne consiste

pas seulcmcnt dans son territoirc, mais dnns son

hisloire, son passé et ses souvenirs. On ne pou–

l'ait pas plusdonncr

il

Inmaison de Brnndcbourg

les souvcnirs de Sobicski en lui donnnnt Vnrso–

\1ic,

qu·a

1:1

nrnison

de Saxe les

sourcnirs

du

grand Frédéric en lui donnnnt Berlin. 11 n'y

aurnil plus cu de Prussc, c'cst-il-dirc d'Al–

lcmagnc, et l'Autriehe, qui cbcrchait so proprc

indépcndance dnns \'indépcndanec de \'Allcma–

gnc rcconstituéc, n'aurait pas tr.iu1·é ce qu'cllc

chcrchail, cút-cllcune prorincc de plus, el ecltc

province f1il-cllc InSilésic! l,'Autrichc n'cút étr'

qu'une esclnrc enrichic! Et cela, l'Aut1·icbc le

comprenait pnrfoilcmcnt, et qunnd elle ne l'au–

rait pas comp!'is, le cl'i des Allcmands indignés

le lui aurait fait invinciblcrncnt comprcndrc. Et

si 'on se demande cornmcnt un hornmc d'aulant

degénie que Nnpoléon pouvait rnécon1rnitre eles

vfrités aussi palpables, il faut se dirc queleplus

puissnnt esprit, quand

ji

nevcut jarnnis sorlir

de sa propre pcnsée pour cntrer dans la pensc<c

d'autrui, quand

il

ne vcuL tcnir aucun complc

des vucs

dcs~llllrcs

pour nesongerqu'auxsienncs,

arrivc

il

se créer les plus étrangcs illusions, en

croyant poul'oir

fa~onncr

le monde commc il

lui plaitqu'il soil. C'est ainsi 'I"" Nnpoléon était

nmcné ;\ conccvoir une Europe de fanlaisic, el

il

s'imagincl' qu'avcc cent mille hommcs de plus

introeluils dansses cadrcs, et uneLnlaille <le plus

ajouléc i1 sn glorieusc histoirc, il composcrait

ccllc Europc commc

il

le voudrait. Sans doute

l"Aulriche nvnit \ongternps hai In Prusse, elle

avail longlcrnps rcgrctlé In Silésic, et il en con–

clunit qu'il n'y avait qu'a jctercn proic

il

sa pas–

sion

In

Prusse anéautie, et la Silesie rcstituéc,

pot11• la elécidcr

1

11 ne comprenait pas qu'un

pctit-fils de Mnric-Thércse pút résisler

a

un tel

appat, qu'un ministre profondément cnlculalcm·

comme M. de Mcllcrnich ¡nit se préoceupcr des

cris du pntriotismc allemand. 11 ne comprcnait

pns qu'il youn jour ou tout le monde cstobligé

d'élrehonnéle et désinlércssé, r.'est cclui oú une

opprcssion inlolérablca obligé lout le monde

a

s'unir contrc ccllc opprcssion; el malhcurcusc–

rncnt i\ avaitamenéce jour, il l'avnil nmcnépour

nol!·e ruine, en foisant de nous, ses premiers

opprimés, les involontaircs oppresscurs del'Eu–

ropc. ll 11'nperccvait pas d'aillcurs que, mcmc

du point de vuc de l'intérct grossicr, ces projets

d'Europe qu'il rernnninit

o

ehaque vicloire,

o

chaque trnité, nvec son imngination el son épée,

parnissaicnt aux ycux de tous un sable, un pur

sable, et qu'on ne lenait nullcmenl

a

avoir une

portion de ce sable mouvant, dont le moindrc

1·ent derait chnngcr les fugitivcs ondulations. 11

ne comprenoit pos que l'Aulrichc pút aimer

moins de lcrritoire dans un ordrc de choscs

stableet naturcl, que plus de tcrriloire donsun

ordrc dechoses ficlif, arbitrairement

eon~u,

et

plus arbilrairemcnt établi, sans comptcr qu'en

fnitde terriloire la coalition,cornmenousl'avons

dit, étnit préle non-seulement

a

tout offrir

a

l'Autriche, mais

n

lui !out donncr.

Tellcs étaient les illusions de Nnpoléon, el

les ll'istcs causes deces i\lusions. Pourlant lui–

memc scnlnit en partie le vice de ses plans, car