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!J20

LIVRE QUARANTE-SEPTIE!!E.

les raisons morales, poliliques, mililaircs, qu'il

fallait se donner

a

la Russie. On Jui avait dit que

Napoléon était vaincu, qu'il ne pourrait pas

recommcnccr la longue série de ses victoires

;

r¡ue l'Europe, lasscde son joug, allait se soulcver

lout enticre ; que l'Autrichc n'attcndait que Ir.

signal de la Prussc pour se prononccr; que Na–

poléon ne résistcrait point

a

une parcillc masse

d'cnncrnis; que la Frunce d'nillcurs, épuiséc et

dégoutéc, ne lui en fournirait pas les rnoycns;

qu'on débarrasseraiL ainsi le monde de son

oclicusc dornination ; que la Russic, ne voulant

pour ellc-mcmc que ce qu'cllc avail autrcfois

possédé, nllail reslituer la portion du duché de

Varsovie qui avait appartcnu

¡\

Ja Prusse; qu'elle

Jui rendrait en outrc toutcs les pnrties de son

lerritoirc qu'clle parvicndrait

a

rcconquérir, et

prometlait mémc de ne pas poser les armes

qu'elle n'cuL aidé Ja Prusse

it

se reconstituer

cnticrerncnt. C'était la surlout ce qui pouvait

décidcr Je roi Frédéric-Guillaurnc, car il crai–

gnaiL r¡u'aprcs une bataillc pcrdue on ne se dé–

couragc,it, et qu'onne le livruL cncorc, cornrne a

Tilsit,

¡,

la vcngeance de Nnpoléon. En prcnant

l'engagcrnent de ne plus J'abnndonncr, et de

soulcnir une lutle

a

mort, on faisait ce qui

dcvail le plus iníluer sur ses résolutions.

Dcvanl toulcs ces raisons, devant toutcs ces

promcsscs, devant l'enthousiasrne de ses sujets,

il se rendit, en clisant toutefois a ceux qui l'cn–

louraicnt que ce ne dcvait pas ctrc une affaire

d'cnLrainemenL suivic d'un découragcmcnL subiL

commc en

1806,

mais qu'il cxigcait, puisqu'o11

voulait

Ja

gucrrc, qu'on y pcrsévér¡it jusqu'h

cxtinction, et en

y

prodiguant jusqu'ntr dernier

écu et jusqu'au dcrnicr homrnc. ll autorisa done

M. de Hardcnbcrg '" signer Je 28 février un

traité pur lequcl la Hussic s'cngagcait

it

réunir

immédialcmcnt

1

tíO mi lle hommes, la Prussc

80

rnille (chacuncdes dcux puissanccs se propo–

sant d'cn réunir bicntót davantagc),

a

les em–

·ployer contrc la Frunce jusqu'a ce que la Prussc

e1'it

re~u

une constilulion plus conforme

a

son

ancicnnc existencc et

n

l'équilibrc de l'Europc, a

ne déposcr les armes qu'aprcs ce but allcint,

n

fairc tous lcurs elforts pour rnllacher l'Aulriche

ii

la

cause communc,

a

ne traiter

('11

un

mot

que

1lc conccrt, et jamais l'une sans!'nutre. La Russie

Jll'Omcllait en particulicr d'cmploycr ses bons

officcs aupres de l'Anglclerrc pour qu'cllc conclút

un Lraité de subsi1les avcc laPrussc.

Tandis qu

1

ils prcnaicnt ces engngemcnls, le

roi ni Al. de. Hardenbc1·g n'avaicnt cncore osé

s'expliqucrfranchemcntavcc

M.

de Snint-Marsan,

ministre de Frunce, et Jcur embarras avcc Jui

était visible. Au moment ou ils trailnient, J'ar–

méc

fran~aise

avait déja évacué Posen et Franc–

fort-sur-l'Odcr, et s'apprétait a sorlir de Ber–

lin. Elle n'élait done plus

a

craindre, et il y

aurait cu peu de dangcr a cléclnrcr franchcmcnt

qu'on profitait de l'occasion pour refairc la for–

tunc de son pnys, imprudemmcut compromisc

¡,

une nutre époquc. Mais, d'unc pnrt, M. de llar–

dcnbcrg avait assez d'csprit pour comprendre

qu'il allait joucr une partie fort dangcreuse pour

son pays, et le roi assez ele mémoirc pourcn etre

égalcmcnt convaincu, et tant que l'arméc fran–

~aise

n'avait pas rcpassé l'Elbc, ils n'osaient pres–

quc pas avoucr ce qu'ils vcnaient de faire.

M.

de

Hardcnberg était méme si ému, que le 27, veille

de Ja signature du trnilé avce Ja Russie,

il

disait

a

M. deSaint-Marsan: Mais faitcs done quclque

chosc pour la Prussc, etvous nous sauverezd'une

cruclle extrémité

! -

11

était sincere en s'cxpri–

mant de la sortc, et sur le point de prendre un

parti qui pouvait étre ou extrémcmcnt hcureux

oucxtrémemcnt funcstc pour sa patrie, il éprou–

vait les anxiétés d'un bon ciloyen. Le roi, dont

nous ne voudrions en ricn décl'ier l'honnétc

carnctere, fut cncore moins franc que son minis–

tre, et se servant d'unc rose pcu digne de Jui,

fcignit une extreme irritation

i1

l'occasion de

quelques procédés réccnls rcprochés

a

l'nrméc

fran~aisc.

Voici quels étaient ces procédés.

Nnpoléon avait ordonné qu'on pny'it tout ;

mais les Prussicns, abusant de Ja situation,

avaicnt exigé du général Mathicu Dumas, inlen–

dant de l'arméc, eles prix lels, qu'il était impossi–

blc ele les adrncttre. Le patriotisme autorisnit

a

nous rcfuserdcs vivrcs, il n'autorisait pasa nous

les fairc pnyer lrois ou quntrc fois lcur valct11'.

Nnpoléon avait clone cassé les marchés. Uavait

ordonné aussi que les places de l'Odcr s'approvi–

sionnassent comme elles pourrnicot, en prcnant

autour d'cllcs ce qu'il serait impossible d'achc–

tcr. Lesgouvcrncurs

fran~aisdc

Slcttin, Custrin,

Glogau, n'y avaicnt pas manqué, et avaient en–

Jcvé

¡,

quelqucs licues

11

Ja ronde le bétail, les

grains, les bois, tout ce dont ils avaicnt cu

besoin. Enfin le princc Eugcne,

Inou

ses troupes

dominaicnt, avait cmpeché les lcvées en masse,

lcsqucllcs étaient une infraction évidcntc aux

tmités qui liaicnt la Prussc envers la France, et.

limilaicnt l'étcndue de ses arrncmcnts. Ccrtes, i1

cót<i de ce qui s'était passé pcndant vingt ans de

gucrrcs acharnées, guerrcs que Ja Prusse avait