. LES COHOl\TES. -
Ft1•n1ER
i8·15.
li·l5
sur la siluation de l'Europe, el qu'un acle parcil
surpris, sinon arraché, ne devail pas le lier. En
un mot, ils t:icherenl de luí iuspirer millc·ter–
reurs, mille remords, et lui traccrcnt de l'état
des choses un lablcau tcl, que In passion la plus
violente pouvail seule le suggércr, tabicau qui
malheureusement devait bienlót se trouvcr vfri·
table par la faute de Napoléon, .mais que !out
homme sage dans le moment aurait jugé fouxou
du moins trCs-exagéré, car, bienqu'ébranlé dans
· l'opinion du monde, l'Empire
fran~ais
rcm–
plissait eneore ses ennemis d'une profonde Lcr·
rcur.
Ces conseils jetcrent l'infortuné Pie VII dnns
un de ces états d'agitation, de déscspoir, oU
11ous
l'avons déja vu lanl de fois, et dans lcsqucls il
perdait la dignilé touchanle de son earaclcre.
Mais commcnt sortir decet embarras? Commcnt
nier ou révoqucr une signaturea peine donnéc?
Qui cut osé le conseillcr? Personnc, pas mcme
les eardinaux qui venaient, grace au dcrnier
concordat, derccom•1·er leur liberté, lcur ndmis–
sion auprcs du Pape, et In faculté de lui boulc-•
vcrscr !'esprit el le creur. lis anraicnt cminl de
voir se rcfcrmcr sur cux les portes des prisons
d'État. 11 fut doneeonvcnu entreeuxel Pie VII
qu'on dissimulcraiL, qu'on n'nffichcrait aucun
changemenl de disposiLions, el qu'on altendrait
les événemcnls, qui ne ponvnient manqner d'ctre
proehains. En clTct, Avignon ne scrnit pas prcl
nvanl unan ou deux; on ne pouvnil jusque-la
cxigcr du Pape aucun acle officicl dfrivanl de
ses nouvcrmx cngagcmcnts; le concordat, en
oulre, ne dcvait pas clrc publié; il n'y avait
done qu'a se !aire, et i1 se résigncr quclquc
tcmps cncorc
a
la vic de rcclus qu'on mcnait
il
Fontaincblcau, i1 1·cpousser douccmcnl sous di–
vcrs ¡wétcxles la pompc donl. Napoléon voudraiL
entourcr la papaulé dcvcnuc fran,aise, et, q1rnnl
aux bulles d'inslilution cnnoniqucréclnmécs dc–
pnissi longlcmps par les nouvcaux prélats, i1se
renfcrmcr, commc on avait loujours fait, dans
unesimple abslcntion sans refus.
Ce plan arlopté, il ciit fallu plus d'cmpircsur
lui-méme que le Pape 1'cn possédait,
¡~onr
ca–
chc1· complélcment re qui se passait dans rnn
:i111c.
L'officicr,
fort ;-id1·oit , qui
legardait
sous
l'hahit de clrnmbcllan, le capilainc Lngorssc,
s'apcrqut bien vite de son lroublc, el en dcvina
la
cause en voynnl les agilalions de l'inforluné
pontifcse licr l.onjours nux visites des rnrdinanx
lt•s plus signalés par lc111· malvcillnnec. 11 en
a1•c1·til. par le ministre des cullcs Napoléon lui-
mcmc, qui ne ful pas trcs-surprisde ce qui arri–
''ait.,
et
qui s'écria, en
apprc~ant
l'usagc que
foisaicnl de leur liberté ceux
a
qui on vcnail de
la rendrc : Je erois que nous avons agi lrop
vite. -
JI
cut Licnlót un signe cerlain, quoiquc
forl déguisé, dessecretes résolutions de Pie
Vil.
L'augustc prisonnicr, détcnu dcpuis 1800, soit
l1Sarnnc, soil
i1
Fontnincblcnu, n'avaitjamnis cu
ti
s'occupcrJcs financcs Uc sa maison, car il était
défrayé de toulcs ses dépenses sans qu'il eúl
¡,
s'cn meler. Ccpcndant., comme
il
pouvaitélrc
tenté de faireou quelques aumóncs ou quclqucs
largcsscs,·on avait saisi divcrscs occasionsde lui
olfrir de !'argent, qu'il avait loujours rcfusé,
quoiquc préscnté de la maniere la plusdélicalc.
CeLle fois, redevrnu souvcrain, ayanl bien des
scrvices
u
récompenscr, et ayanl droildc le fairc
snr des revenus qui luí étaient régulierement
nllribués, il pouvait acceplcr décemmenl. Napo–
léon luí enroya les agents 1lu Trésor impérial
pour mell1·e
a
sa disposilion les SOOlllleSdont iJ
aurait besoin. 11 rcpoussn ces dcrnicres olTrcs
avcc douceur, el sans alTcclalion, commc si le
momcnl n'étail pas venu de rcntrcr oslcnsiblc–
mcnt dans l'cxereicc de sa nouvcllc souvcraincl.é.
JI
n'cn fallait pas davantage pour devincr les
résolul.io11s el les calculs des hommcs r1ui diri–
gcaicnl lePape. Mais Napoléon était aussi rusé
que le plus rusé d'cnlrc cnx.
11
voyait qu'ils ne
roulaicnt pns fairc d'éclal,et il ne levoulait pas
non plus. Ce qui lui importail, ce n'était pas que
les nlTaires de l'Églisc fussenl arrangécs, mais
qu'ellcs le pnrusscnt, et pour quelque tcmpsclics
nllaicnt le parailrc, du moins aux ycux des
111assrs. On publia pnrlout, dans les provinces les
plus rcculécs <le l'Empirc, qu'un eoncordal étail
signé cnl1·c le Pape et l'Empereur, que le pontife
était libre, qu'il allnit se rcndrcdans le
si1~gc
oú
il dcvait cxerccr In puissancc pontifieale ; qu'c11
un mol toutes les difficullés religicnscs étnient
tcrminécs. Quclqucs imlividus;,plus nu fait de
l'int.rigue romainc, cssaycrcnt de répondrc ¡¡uc
c'était un mcnsongc:quc lePape n'nvait consent.i
¡,
ricn.
11
y
en cut mcme qui oscrcnt répandrc
que Napoléon avait voulu violcntcr Pie VII sans
en rico ohlcnir, cc1¡ui a fourni depuis i1 certains
écrivnins l'occasion d'aw1nccr quc Nn¡wléon avnil
lrainé i1 tcrrc, el par ses chcvcux hlancs, le
l'Cnérablc vieillard (sci:nc
¡,
peine"éroyable au
moycn :\ge). Mais la fonle piense et innoccntc,
ignorant ces prétcnclus
sccrcls,
courut nu picd
r!r1•:rnkls rcmcrcierDicudu noureauconcordat.
et se mit i1espércr, commc le liésirait Nnpoléon,