Table of Contents Table of Contents
Previous Page  493 / 570 Next Page
Information
Show Menu
Previous Page 493 / 570 Next Page
Page Background

LES COHOHTES. -

mm•

1815.

479

fournir une excuse en devenant une contrainte.

Mais si cellc fois encore ses sujcts étaient, daos

l'el'l'eur comme en

1806,

si ce Napoléon qu'on

disait vaincu ne l'élait pas, si au printemps

il

reparaissait sur l'Elbe vaioqueur de ses ennemis,

et s'il en finissait de cette Prusse ineor1·igible, et

trailait le ncveu du grand Frédéric comme la

maison de Hcsse, aurait-oo une seule plaiutc

a

élcver? Or , soit crainle de Napoléon, soit

amour·propre de ne s'etre pas trompé, Frédcfric–

Guillaume inclinail

a

penser que la France n'était

vaiocue que pour un moment, et., suivant les

lluctuations ordiuaires d'une ame agitée, quand

il l'avait eru quelques heures, il eessail de Je

eroire, puis revenait

a

eette opinion, el dans

le désordre de son esprit, cédail au fait actuel,

c'est-a-dirc

it

Ja préscnce de trente mille

Fran~ais

a

Ilcrlin.

M.

de Hardenbcrg qui, lui aussi, avait envcrs

la France passé de l'lwstilité

a

l'alliance, élait en

proie

¡,

toutes les pcrplexités du roi lui-meme,

et de plus

a

eellcs qui naissaient de sa siLuation

pcrsonnclle. Si les événcmenLs condamnaicnt

la politiquc de l'alliancc avec Ja France,

il

y

avait

pom· le roi une excuse toute trouvée, celle de

la fuiblesse; mais il n'y en aurait aucunc pour

M.

de HardcnLcrg : on imputcrait sa condnitc

a

l'amLition, et

a

Ja plus basse de toutcs les ambi–

tions,cellcqui pactiseaveclesenncmisdesonpays.

Le premier moul'ement de Frédéric-Guillaume

en apprcnant Ja eléfcction du général d'York,

ful ele se récrier contre un pareil acle. 11 crai–

gnait

!i

Ja l'ois d'etre compromis al'cc

h

France

qu'il redoutnit loujours, et depasscr pour cléloyal,

ce qui Jui coútait Lcaucoup, car il élait 1Taimcnt

honncle, et lenait surtout

a

passcr pour tel. 11

se bata de mander aupres de Jui le ministre de

Frnnce, M. de Saint-Marsan, et ele désnvoucr

énergiquemcnt la conduitc du général el'York.

11 juraqu'il n'était pour ricndauscellcdéfcction.

M. de Saint-Marsan, qui se laissait facilcment

pcrsuaeler par l'acecnt <l'honnclcté de Fl'édéric–

Guillaumc, Jui affirma qu'il doulerait de laparule

de lout le monde avant de doutcr de la siennc,

et alors ce prince fut soulagé, eharmé, et séduit

parccllcde ton tes les flattcrics qui Jui allait Je plus

au eccur, la confiuncc en sa loyauté. Dans son

premicr eotraiocmcnt, il promit de désavouer

publiqucmcnt Jegénéral d'Yo1·k, et de lelrndui1·c

a

une commissioo militairc.

M.

de SainH !nrsan

emporta ecttc promcssc comme une so1·1e ele

trophéc, c¡u'il crut utilc d'opposcr aux

d~cl3111a­

tions des euncmis de Ja Francc.

Quandcetledéclarationfutconnue, les patriotes

allemandsfurent fort irrités,s'emporterentcontre

le roi, contre M. de Hardenberg, contre Ja poli–

tiquc du cabiuet prussicn, et allerent répétaot

parlout, com111e jadis nos émigrés, que Je roi

n'était pas libre. Ses ministres Jui dirent qu'il

s'était peut-ctrc trop avancé, et apres al'oir

désavoué le général d'York,

il

refusa de publier

ce désal'eu.

Tandis que daos Bcrlin J'cxaltation des esprits

était extreme, les

Fran~ais

qui gardaienl cctte

eapitale, et qui al'aient Je cccur tout aussi haut

quejadis, r¿pondaicnt aux proposdu patriotismc

allcnrnnd par des propos non moins provocateurs

et de plus souveraincment imprudcnts. Quoique

Augcre;iu, qui commandait

á

Berlin, se montrat

cclle fois plus réscrl'é <¡ucdeeoulume, dejeuncs

officiers dircnt que les

Fran~ais

ne se laisseraient

pas dupcr encore par la Prusse, qu'ils étaicnt

sur leurs gardes, qu'au premier acle de trahison

on 'désarmerait les troupes prussienncs, qu'on

enlcvcrait mcrne Ja cour

¡,

Potsdam, et qu'on

en Gni1·ait d'une puissance toujours infidclc. Ces

propos, qui n'étaicnt que le résultaL <lu langagc

irritant des P!'llssicns, répétés méchamment au

roi, lui inspirerent d'abord de Ja tcrrcur, ¡mis

un commcucemcnt de calcul asscz raffiné. La

peusée d'ahandonner la France ne s'était pas

jnsqu'alors Jll'é;entéc

¡,

son cs¡irit, mais celle de

devenir plus indépcndant d'clle,graceaux événc–

rncnt~,

dcprcndrcuneposiLion inlcrmédiairccntrc

clic et ses cnncmis, et peut-etrc ele contribuer

ninsi

a

une paix nvantagcuse, cctlc pcnséc néc

des circonst.anccs, et aussi, commc on va le voir,

des suggesLions de la cour d'Autriche, s'en1para

tout

u

fait de Frédéric-Guillaumc. Le scul moyca

de Ja réalisc1" c'était, pour Je roí, de quitter Ja

ville de Bcrlin, vers laquclle marchuieot déja

les Russes dans Jcur poursuile, !es

Fran~ais

daos

lcu1· rct1·aitc, el'aller établir sa cour en Silésie,

á

füeslau, par cxcmple, projet qui n'était pas nou–

l'eau puisqu'on l'avait proposé des J'année Jll'é–

céelcnte, d'ystipuler avec les Russcs et les Fran–

gais la neutralité ele ccttc province, et

d'y

attcndre la suite des événemcnts.

11

follait en

ou11·c profitcr de l'occasion pour armcr dans

de g1·andcs proportions. Cette Jemie1·e mesure

dcl'ait

a

la füis pl11i1·e aux palriotcs :dlcmands,

qui se flaltc1·aient de fai1·e tourncr ces armemcnts

contrc In Francc, et lalsscr les

Fran~ais

sans

uuc sculc objn('.tion, car ils

vcn~dcnt

cux-mCmcs

de demander que la Prusse doublaL son

cont.in

gcnt.