LES COHOHTES. - "'""" 18-15.
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d'hérolsmc. Sa défiancc était devcnuc tellc, que,
ne comptant pas mcmc sur sa femmc, il en était
arrivé
a
craindrc qu'cllc ne se pliat ellc-mcme
a
la politiquedeNapolcon, ce qui était pour lui un
nouveaumolif derctourncr 1Naplcs. Tourmcnté
par ces inquiétudcs, par les tristes nouvclles
qu'il recevait
a
chaque instant de la retraitc de
l'nrmée, il appcla tout
a
coup le prince Berthicr,
qui, quoiqucil dcmi mort, restait majar général,
et M. Daru qui n'élait clrnrgé que du nrntériel de
l'arméc, mais dont le solide earnetcre, la haute
prudencc foisaient un conscillcr toujoursconsullé
dans les circonstanccs importantes. 11 leur com–
muniqua son projct de quiller l'armée, allégua
sa santé qui n'était qu'un prétexte, et résista
a
toutes les instanccs du princc Bcrthier et de
M. Daru, qui firent valoir tour
a
tour aupres de
lui l'intérct de l'armcc, l'intérct de sa gloirc, le
courroux,de Napoléon, la difliculté de trouver
un successeur. Accttc dcrnierc objection Mural
répondit en indiquant le prince Eugene, et an–
non~aqu'ilallait
lemander
a
Posen. En cfTet il lui
dépcchaun courricr
il
Thorn, sans lui direpou1·–
quoi il l'appclait au quartier général. Ce prince
étant arrivé, il lui déclara sarésolution departir
et de le désigner, en attendant les orelres de
Napoléon, commc commandant de la grande
arméc. Le prince Eugcnc, efTrayé decct honncur,
par modcstic et par indolcncc, étaitccpendant le
scul qu'on püt choisir, car il s'était fait beaucoup
d'bonncur dans la campagne de Russic, y avait
déployé une rare bravoure, quclqucs connais–
sanccs militaires, et de véritables vertus. Enfin
il était princc, ce qui était
a
considércr dans ce
régimc,clcvcnu enpeuele tempsaussimonarchiquc
queccluideLouisXlV.11 pressaMm·atdcrestcr,
ne poi réussir
a
l'y <lécicler, et finit par aeccptcr
avecrésignation uncchargc qu'il rcgardait comme
tres au-dcssus deses forces. 11 dcmeura
a
Posen
avcc les 10 millc hommes de toutcs natious que
nous avons énumérés, suppliant le général Rcy-
11icr et le princc de Schwarzenbcrg de se main–
tcnir
a
Varsovie, cequi lecouvrait vcrs sa droite,
complantque \
1
crs sa gauchc les Russcs s'arrCtc–
raient quclquc temps au moins devant Thorn et
Dantzig, et ordonnant au général Grcnicr avcc
ses clix-huit millc hommcs,
a
Augcrcau avcc
les 9 ou 1Ode la division Lagrange, de se ten
ir
prcts
a
venir
a
son aidcs'il en avait besoin.
Voila ce qui rcstaitde lagrande armée
!
vingt–
cinq millc hommcs
a
Dantzig, ·10 millc dans les
places sccondaircs de la Vistulc, 10 millc de
toutcs nations
a
Posen avcc le quarticr général,
quclqucs Saxonset
Fran~ais
dominés
a
Varsovic
par les mouvcmcntsdu princcdcSchwarzcnbcrg,
et cnfin
a
Berlin, Grenier et Augcrcau, avcc
28 millc hommcs qu'on n'osait pas cléplnccr, de
crainlc d'un soulc1•ement général en Allcmagnc
!
11
y
avait loin de cette situation, aux 200 millc
hommes que Napoléon croyait encore établiss111•
le Niémcn, et disputan! aux Russes Kronigsbcrg,
Kowno, Groelno, en attcndant que 500 mille
nouvcaux soldnts vinsscnt
h
lcu1· sccours. La
néccssité d'organiscr lui-mcmc ces 500 millc
nouvcaux soldats avait appelé Napoléon
a
Paris,
et sonclépartarnit cntrainé la pcrtcdcs200 mi lle
hommes restés sur le Niémcn
!
Ainsi il aurait
falln qu'il fút
a
la foissur le Niémcn pour sauvcr
les uns, et
a
Paris pour organiscr les autres. En
quittant le Niémen il avait commis une faute
militairc, et s'était rendu coupablc d'abanclon
cnvcrs eles compagnons d'armcs qu'il avnit pré·
cipités dans un abimc; en y demcurant, il aurait
laissé, entre lui et Paris, l'Allcmagnc insurgéc,
n'aurait pas saisicl'assez pres les renes ele sa vastc
administration, et aurait commis
o
la fois une
fautc politique et administrativc, ele
fn~on
que,
quoi qu'il fit, il manquait quclquc part, il com–
mettait cJ,cs fautcs également gravcs, ets'cxposait
o
de déplorablcs intcrprétalions, juste punition
d'crrcurs immcnses et irréparablcs
!
Et en ce momcnt les conséqucnces poliliqucs
de ces crreurs n'étaicnt pas moins grandes que
lcurs conséqucnccs militaires, Le chef des cxilés
allcmands, le haron de Stcin , était avcc le
général d'York
it
Kccnigsbcrg,
y
convoquait les
élats de la provincc, y faisaiLdécrétcr l'armc–
ment de toutc la population, et l'cmploi sans
réscl'l'c des rcssourccs pécuniaircs du pays. Le
dévoucmcnt 11nivc1·sel répondait 1 ces propo–
sitio11s, et des milliers ele parnphlcts, de proclo–
mations, de chants populaires allaicnt enOam–
mei· eontrc nous les imaginations allcmandcs.
L'Allcmagne dcpuis quclques annécs s'était cou–
vcrtc de sociétés secretes, dont la principale,
ccllc de I'
Union de lci
verl1<
(Tugcodbuncl),
s'était univcrscllcment rcpanclue.L'enthousiasmc
pou1· la patrie aliemande, la conviction que,
réunie en unscul faisceau, clic scraitinvinciblc,
qu'au licu d'ctre tour :. tour la victime des Élats
<lu Nord ou de ccux du
~Iidi,
clic lcur fcrait la
loi
il
taus, et composcrait la prcmiCrc nation clu
monde; la néccssité eles lors de s'unir, d)'_ ne
plus se consiclércrcomme Autrichicns, Bavarois,
Saxons, Prussiens ou Hambourgcois, commc
princcs, nobles, bourgcois ou paysans, commc