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LES COHOll'l'ES. -

ntcEMBRE

1812.

475

le·champ le langage qui

éLait.le

mieux approprié

aux circonslances.

11

11e vcnait pas, disail·il,

foire des eonquclcs sur l'Allcmagnc, mc1ne sur

la Pologne,

il

venait tendre la main aux Allc–

mands opprimés, peuples et rois, bourgcois et

nobles, Prussiens et Autrichiens , Saxons et

Bavarois, les aider lous, qucls qu'ils fussent,

a

sceouer un jougodieux,et,cctle reuvre lerminée,

rendre

a

chacun ce qui apparlenait

it

chacun, et

ne prendre pour lui que ce qu'on lui avait in–

justemcnt dérobé. Ainsi on publia de lous cótés

en son nom que, si les Prussiens voulaient res–

saisir leur part de la Pologne, il était prét

i1

la

lcur restituer, et qu'il ne la garderait qu'en

at.tendant qu'ils vinssent se remetlre eux·memes

en possession de ce qui leur avait appartcnu.

AWilna, oú il était chez lui, il proclama une

amnistie générale pour tous les acles commis

conlrc l'autoriLérusse, et fit mcme répandre que,

si les Polonais voulaient relrouver une patrie,

il était lout disposé

a

leur en acCorder une, en

consliluant séparément le royaurne de Pologne,

dont il scrail le roi clément, civilisatcur et libé–

ral. Alexandre avait bien asscz d'csprit pour

comprendre

a

lui seul l'habileté d'une lellc poli–

tiq11c, assez de bienveillance naturellc pour s'y

plairc, et, en !out cas, s'il ctit fallu l'y aidcr, les

Allemands accourus auprcs de lui auraient sufli

pou1· le persuadcr. Le ministre prussien Stein,

réfugié a sa cour, le célebre écrivain Kotzebue,

et beaucoup cl'autres Allemands, hommes ele

letlres ou mililaires, tcnaient le langage le plus

libéral, et assiégeaicnl Alcxandre ele leurs in–

stances pour qu'il proclam:it l'indépenclance de

l'Allemagne, et surlout pour qu'il marehat har–

diment en avant, pour que, saos compler ce qui

pouvait resler de

Fran~ais,

il se portal rapide–

ment sur la Vistule et J'Oder; car, disaient-ils,

chaque portion de territoit·e délivrée des Fran–

cais lui vaudrait

i1

l'instanl des alliés ardents et

~nlhousiastes.

11

n'y avait cl'opposé

11

cctle poli–

tique que le vieux Kutusof, dont la eircon–

spection justifiée par le résultat était devenue

excessive, et quelques Jlusses, occupés de eonsi–

déralions purcment militaircs, lcsquels frappés

ele l'épuisement de leur armée, crnignant qu'cllc

ne finit par fondrc comme l'arméc

fran~aisc,

dcmandaicoL qu'on s'arrCltit, qu'on

laiss~it

les

Allemands s'afTranchir commc ils pourraienl,

qu'on traital avec la France, ce qu'il était fucile

dnns le moment de faire trcs-avantageusemcnl,

et qu'on ne prolongcat pas inulilcment une

gucrre qui, heureuse dans l'intérieur de la

l\ussie, deviendrait forl dange1·euse au deliors,

surtoul contre un eapilainc lcl que Napoléo11;

et il est vrai que sous le rapporl ele la prudencc

ce langage était parfaitemenl fondé

!

Mais l'ima–

gination d'Alcxandre s'était lout

:'o

coup enOam–

mée. Profondément blessé par les dédains de

Napoléon, enorgueilli jusqu'au déliredu.rólc de

son vainqueur, il aspirait

11

un rólc plus grand

cneore, il voulait étre son dcslrucleur, et le libé–

rateur de l'Europe opprimée.

11

se disail que

traiter aujourd'hui avec Napoléon, mcme d'égal

a

égal, étail possible saos doute; maisque, sion

laissait 'éehapper ectle occasion de le délruirc,

on relrouverait bicntót en lui le puissant domi–

natem· d'aulrefois, et que ce scrait une reuvrc

a

rccommencer. Au conlrairc, en poursuivant les

succcs obtenus, en appclant

a

soi les gouverne–

ments et les peuplcs, indignés du joug qui pesail

sur eux; en allanl plus loin, en adressanl un

appcl direct

a

la France cllc·mcme fatiguéc de

son maitre, en lui <léclarant qu'il y avait une

légitimegrandeur qu'on n'entenclait pas lui dis–

puter, on pouvait faire disparaitre Napoléon de

la sccne, et devenir

a

son tour le roi eles rois,

le sauveur adoré de l'Europe. Cetle ambition

aidée par le rcsscntimcnt avnil cnvahi le erom·

d'Alexandrc, et il ne voulail plus s'arrciter.

11

avait done autorisé le ministre Stcin et ses eom–

patriotes

il

se porler daos les provinccs prus–

siennes reconquiscs, el

a

y prornettre le prochain

afTrancbissement de

I'

Allemagne.

Le général Diébitch, chef d'état-major de

Wittgenstein,en touréd'ofliciersallemands parmi

lesquels figurait le général Clauscwitz, pom·suivi

de leurs instances, el n'en ayant pas besoiu, ca1•

il pensait coinme cux, suivait le maréchal Mac–

donald pasa pas, avec l'espél'anee ele lui enlevcr

le corps prussien. Le général d'York détestait

daos le maréchal Maedonald son chef d'abord,

car il était jaloux et toujours mécontent, et

ensuile un

Frm1~ais,

car il avail dans le creu1·

lous les sentimcnts de ses eompatriotes.

11

avait

de continucls démclés avec l'état-major du maré–

chal, se plaignail sans ccssc qu'on nourrit mal

son corps, qu'on ne lui accorth\t pas une assez

largc part en fait de décorations el de dotations

fran~aises,

et cette humeur, du reste pcu justi–

fiée, avait forL augmcnlé son avcrsion patrio–

tique pour nous. !,e général Diébiteh, averti par

eles agentssecrels, avait fomenté ces sentiments,

et ¡mis, la eatastrophc venue, avait fini par pro–

poscr nu général <l'York de passer aux Russrs,

sous le voile cl'une eapitulation commandée par