LE CONC!LE. -
JUtN
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ouvcrlure. Napoléon, nous le disons asa louange,
éprouva un mouvement d'indignation qui cut de
grandes conséquenees, qui aurait du lui mériler
un autresorl etqui leJui aurait ccrlainemenl mé–
rité,sisaprudcnce en toutcs choscs avait égalé sa
loyauté en celle-ci. Pour donncr la Norwégc a la
Sucde,
il
fallail dépouiller cJTronlémcnt son plus
fidele allié, leDancmark, qui, torturé par les lois
du hlocus conlinenlal, les supportaiL cepcndant
avcc une patience admirable, et fournissaitmcme
d'excellents matelols
á
nos llottcs. JI rougit d'in–
dignation el de mépris i1 une tellc proposilion,
et adrcssa
a
son ministre des alTaires ét1·angeres
!'une des plus bellcs letlrcs el des plus honora–
bles qu'il ait écritcs de sa vic. -
La
tele du
nouvcau prince royal,
il
le voyait bien et
il
ne
s'cn élonnait pas, était, disail-il, une tete mal
réglée, agitée, effervescente. Au lieu d'étudier le
pays ou
il
arrivail, de s'y faire estimcr par une
altitude calme, digne, sét'icusement occupée, le
prinee ne cherehait qu'a flatter cclui-ei, a cares–
ser celui-la, et allait imprudcmment soulcrcr des
questions d'ou pouvaitjaillir un incendie. C'était
une conduite regrettahle et a laquellc
il
ne fal–
lait pas préler la main. Trahir le Dancmark élait
pour la Francc un crimc impossihlc, et qu'il était
aussi peu sagc que pcu séant de lui proposer.
Toutcct étalagc de services 3rendre
a
laFrance,
ou de mal
a
lui causcr, ne pouvait point la lou–
chcr, car elle ne dépendait d'aucun enncmi au
monde, encore moins d'aucun allié. Le princc
s'oubliait done en se pcrmcttant un
tcl
langagc;
heureusement ce n'était que le prince royal, el
point le roi ni le gouvernement qui s'exprimaicnl
de la
sorte.Onvoulait bien, par conséquent, n'cn
pas tcnir comptc. - Apres ces réflexions, Napo–
léon recommandait a M. Alquier, nolre ministre,
de ne point hlesser le princc, mais de lui faire
cntcndre qu'il s'égarait en agissant et en parlant
si vite, surtout en parlant de ce ton ; de ne point
lui répondre sur les sujets <¡u'il a1•ait ahordés si
légercment, de l'enlretenir peu d'alTaires, puis–
que apres tout
il
n'élait qu'hériticr d6signé; de
n'a,'oir de relations qu'avcc le roi etles ministres,
et de direa chacun d'eux, toul haut ou !out has,
que ce que la France aLlendait de la Suedec'élait
la fidélité aux traités, particuliercmcnt au dcr–
nier lrailé'de paix scandaleusemenl violé en ce
moment, qu'elle en attendail par-dessus tout la
suppression de l'cntrepót de Gothcnbourg, sans
quoi la guerrc recommencerait, et la Pornéranic
suédoise, rcstiluée tout récemment, deviendrait
encorc une fois legage dont on .se saisirait pou1·
CO!'HULAT.
' ·
forccr la Suede
a
renlrer daos le devoir. Par le
mCmc courricr, Napoléon
fit
recommander au
Dnncmark, sans luí dire pourquoi, d'cnlrctcnir
toujours heaucoup de troupes en Norwége.
Tclle est la maniere dont se dcssinaicnl les
disposilions de l'F.urope
1i
la veille de la grande
et derniere lutte que Napoléon allait lui lil'rer.
C'étail extérieuremcnt la soumissionlapltrs com–
plete avec une baine implacable au fond, et au
moins de !'embarras la ou il n'existait pas de
haine. Ainsi nos alliés allemands, la fülvicre, le
Wurlemherg, la Saxc, Badcn, faisaicnl tout ce
que nous voulions, et préparaicnt leurs conti11-
gents, mais trcmblaienl secrclcmcnt en voyant
les haines qui couvaient dans le creur de lcurs
sujets, et l'animadversion inspirée par la con–
scription. !AUachés a la cause de Napoléon par
pcur et par intéret, souvcnt blcssés par ses cxi–
gences et par son langagc, mais craignant de
pcrdre les agrandisscmcnts qu'ils avnicnt
re~us
de lui, ils souhaitaient qu'il ne s'cxposot point
a
de nouvcaux hasards, et par ce molifrcdoulaicnt
singulicrcmcnt la prochainc guerre. Le roi de
Wurlcmhergnotamment, ayant peu de scrupnlcs
en fait d'alliances, ne tcnant pour lionne que
celle qui augrnenlail ses revenus etson terriloirc,
n'éprouvnnt par conséquent aucun remords de
.s'élre donné i1Napoléon, et joignant ¡, hcaucoup
d'cs¡¡rit une rarc éncrgie de caraclcre, au point
de dire toujours ce qu'il pensait au tout·puissanl
protecteur de la Confédération du Rhin, lui avait
adressé quclqucs objcctions rclativcmcnl aux
préparatifs de la nouvcllc gucrre et
i1
l'envoid'un
délaeherncnt wurlemhcrgcois demandé pour
Danlzig. Sur-le-champ Napoléon lui avait 1·é–
pond11 une lellre longuc et curicuse, qui révélait
lout enticre l'étrange fatalilé so11s l'crnpire de
laquelle il cou1·ait
a
de noul'cllcs aventures. Dans
cclte lcltrc il lui disait que ce n'élail pus
a
un
t·égiment de plusou de moins qu'il tcnait, nrnis
a
l'avantngc d'avoir
l1
Dantzigdes Allcnrnnds plulóL
que des
Fran~ais,
parce qu'ils y excitaicnt moins
d'ombragcs; que voulant ·avoir des Allemands,
il
en désirait de tous les Etals Je la Confédéra–
tion ; qu'il lui élail impossible de nepas ¡ll'cndre
position
ü
])nnl.zig, car c'étníL
in
nnic hase
d'opérations pour une cmnpagnc daus le No1
1
d;
que ccttc carnpagnc ce n'étail pas par goút, par
fantaisic de jcune princc belliqucux cl1c1·clianl
un déhut brillan! daos le monde, qu'il s':ipp1·e–
lait 1 la faire, que loin de lui plairc clic lui
déplaisait (ce qui élail vrai, et rcndait plus frap–
pante la folie de son amhition), 111ais qu'il la