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LIVRE QUARANTE ET UNIEME.
conslanccs; muis que si au conlraire Napoléon
voulail étendre sa main Lulélaire sur Ja Sucde,
luí accorde1· ou un prince de sa famille, ou l'un
des guerriers illuslrés sous ses ordres, la Sucdc
l'adoptcrail a1•cc Lransporl. L'cnvoyé sccrcl du
roí élail elwrgé d'insislcr pour que Napoléon
donrnil lui-mcme un roíaux Suédois.
Napoléon avail éLé plus embnrrassé que llatlé
de ce message. 11 n'élail pas assez salisfail de ce
syslcme rénovateur des couronnes, consislant
11
mellre sur les trones qui vaquaienl ou qu'il fai–
sail vaquer, Lantot des freres, tanlól des bcaux–
frcres, el aprcs les frcres el beaux-frcrcs des
maréchaux, pour
y
pcrsister, surtoul
o
cctle dis–
tance. 11 venait d'éprouvcr qu'il fallait soutenir
i1grands frais ces rois de créalion récenlc, qui
nrnlgré ce qu'ils eoülaienl résislaienl aulant nu
moins que les ancicns rois, parce qu'ils étaienl
obligés de se faire les instruments des résistanccs
de leurs pcuples, accrues encore par la présence
de royautés étrangcres. 11 ne tenail done pasa
se mellre sur les bras de nouvelles difficultés de
ce geme. De plus, il avait donné nssez d'om–
bragcs
11
l'Europe par la création de départe–
menls
fran~ais
a
Hambourg et
a
Lubeck, saos
y
ajouler par J'élévation au trone de Sucde d'un
prince
fran~ais ,
qui
p~ut-étre
serait bienlÓLun
ennemi. Reeouvrant toutc la justesse et la pro–
fondeur desonespritdesque ses passions nel'éga–
raicnl plus, il nimaiL mieuxvoir les Lrois couron–
nesdu Nor<l se renforcerconlrelaRussieelconlre
l'Anglelerre par lcur union, que se proeurer
a
lui-mcme le vain plaisir d'amour-propre d'é–
lever en Europe une nouvelle royaulé
fran~aise.
Du reste, on avail si peu indiqué jusqu'alors le
prince
fran~ais
qui pourrait elre appelé au tróne
de Sucde, que le choix possible n'avait exereé
aucune influenee sur eellc cxcellcnle disposi–
tion.
Napoléon avaiL done répondu sur-le-champ
qu'il n'avait ni prince ni général
a
oJTrir anx
Suédois, qu'il n'ambitionnait ricn cu ce momcnt
ni pour sa famille ni pour ses lieulenanls; que
l'Europc d'ailleursen pourrait ctre olfusquée, el
que la polilique qui, plus tót ou plus lard, arnit
en vuc la réunion des trois couroanes du Nord,
élait
11
ses yeux la mcilleure, et la plusdigne du
prinee habile qui régnait
a
Stockholm; qu'il ne
deman<lait au surplus
a
la SuCde que <l'étre une
fi<lcle alliée de In France, et de l'aidcr eonlre
I'Anglclcrre en exéculant poncluellcmcnl les lois
du Llocus continental.
Celle réponse arrivée, le r·oi Chal'les XIII
n'avait plus hésité
a
suivresonpenchant. N'osant
pas toutcfois s'y livrcr enticrcment, il nvail ré–
solu d'adoptcr le frcrc du prince mort, le duc
d'Augustcnbourg. Le parti révolutionnairc et
mililairequi avait renvcrsé les \Vasa, ne voulant
ni d'un \Vasa ni du roí deDancmark réputédur
et absolu , avait poussé Charles XIII
a
ce choix,
qui n'élaiL, aprcs tout, que la répétition de sa
premicrc adoption. Mais un nouvel inciden!
avait compliqué encore une fois eclle élcction
déji1si traversée. Le roi de Danemark, Frédé–
ricVI, aspiran!
a
la réuniondes troiscouronncs,
aspiranl surlout
a
la
voir s'accomplir immédiale–
ment sur sa tele, avait défcndu au duc d'Augus–
lenbourg d'aeccpler l'adop\ion dont
il
vcnaiL
d'clre honoré, et , par une démarche publique,
faite en termes nobles et pleins de francliise,
avait, dans l'intérét, disait-il, <les lrois peuples,
sollicité l'adoption eleCharles XIII.
La réunion si hardimcnt préscnléc, et parti–
culierement sous les lrails d'un roí de Dane–
mark, qui non·sculement olfcnsait l'orgueil sué–
dois, mais par son carnctcrc vrai ou supposé
eJTrayait les nombreux partisans <les idées nou·
velles, avait causé une sorte de soulcvemenl gé–
néral, et la confusion des csprits élait clevenue
plus grande que jamais. Dans cetle étrangc si–
tuation, qui s'était prolongée pendanl toutc l'an–
née 18IO , l'opinion, toujours plus llollante et
plus perplexe , s'élait de nouveau tournée vers
Napoléon, sans pnrvcnir a pénétrer sesdesseins.
Pourquoi, disaient bcaucoup de Suédois, prin–
cipalcment parmi les mililaires, pourquoi Napo–
léon ne vcul-il pas étendre vcrs nous sa main
puissanlc? Pourquoi ne nous donnc-t-il pas un
prince ou un général1 lui?Le brave peuplesué–
dois ne lui scmblcraiL-ilpas digne cl'un te]sort?...
- lis parlaicnt méme avec une ecrlainc amer–
lumc des gens <le commerce, qui, tous asservis
11
leurs inléréts, craignaicnt pou1· les tristes rai–
sons lirées du blocus continental <le rcndre plus ·
complete l'intimité avec la France. Cclle dispo–
silion , choque jour accrue par !'embarras qu'on
éprouvait, étail bientót devcnuc généralc.
En pens,rnt et parlant ainsi, on chcrchail le
prince ou le général que Napoléon pourrait dé–
signer au choix des Suédois. 11
y
en avail un ,
le maréchal Ilernadotle, hommc <le gucrre et
prince, allié
a
Ja íamillc impériale par sa fcmme,
srour de la reine d'Espagnc, qui avait séjourné
quelque temps sur les frontiC..es de Sucele, el
contracté des rclations avcc plusieurs Suédois.
A l'époque oú il se trouvnitdans ces parages, il