LE CONCILE. -
''°'
1811.
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les cad1·cs; puison faisail passcr dans ces cadrcs
Je plus d'hommcs qu'on pouvaiL, en les instrui–
sant Je plus vite, Je mieux possible, et en les
renvoyant cnsuile dans leurs ehamps pour en
appeler d'autres qu'on s'appliquail
ii
former
a
Jeur tour. On comptait ainsi avoir au besoin
150 mille hommes au lieu de 42 mille, chilTre
fixé par les trailés. On gardait au dépót du régi–
menl les armes et les habits des soldals provisoi–
rement remoyés dans Jeurs champs, et on espé–
rait que, ll'"icc
a
Ja !mine inspirée
it
Ja nation
prussicnnc por ses nrnlheurs, ces soldats, rete–
nus
ii
peine un an sous les drapeaux, se eom–
portcraicnl dans l'oceasion commc les troupes
les plus agucrrics. L'avcnir dcvait just.ifier cct
cspoir.
Les
eoours, en eJTct, étaicnt remplis en
Prussc d'une haine inouie eontre la I'rancc.
Toutc Ja jeunesse des classes élcvées, toute eelle
des classcs moyennes, nobles et bourgeois, prc–
trcs et philosophes, se réunissaient dans des so–
eiétés secretes qui
prenair.ntdivcrs noms,
Ligue
de la
verl1t,
Ligue
gcrmcu1.ique,
sociélés dans
lcsquclles on promcttait de n'aimcr que l'Alle–
Jemagne, de ne vi\'l'c que pou1· elle, d'oublicr
loute dilTéreuee de classe ou de provinee, de ne
plus admettre qu'il y cut des nobles et des non–
nobles, des Saxons, des Bava1·ois, des Prussiens,
des Wurtcmbergcois, des Westphaliens, de re–
pousser toutesces dislinctions, de ne reconnailre
que des Allcmands, de ne parler que la Janguc
de l'Allemagnc, de ne portcr que des tissus
fa–
briqués ehez elle, de ne consommcr i¡uc des
produitssortis de sonscin, de n'aimer, cullivc1·,
fuvoriscr que l'arl allcmand, de consaercr cnfin
toutcs ses facultés
~
l'Allemagnc seulc. Ainsi Je
patriotismc cxallé de l'Allcmagne
s'cnfon~aiL
cfons J'ombre el le mystcrc, salisfaisanl
a
la fois
en cela un bcsoin de Ja situation, et un pcnchanl
du génic gcrmaniquc.
Le roi et M. de Hardenbcrg, plaeés sur ce
\'Olean, étaicnt en proie
1i
de cruclles pcrplcxi–
lés. Le roi par scrupulc, comme l'cmpercur
d'Autriche par prudcncc, inclinait
it
ne pas rom–
pre avcc NapoJéon, car
il
s'était cngagé
a
lui par
le~
plus solcnnelles protcstations de fidélité, dans
l'espérancc de sauvcr les débris de sa monar–
chic. M. de llardenbcrg, dans une posilinn asscz
scmblable'it ccllc de M. de Mctte1·nich, cher–
chaiL de qucl colé il pourrait trouver pour son
pays le plus d'avantagcs. Le parti allcmand
exalté, Jui en voulant de son ehangcmcnt appa–
rent de con<luitc, et de quclr1ues l'igucurs obli–
gé~s
Ctll'Cl'S
Jcs associations secretes, était prct
toutcfois
ii
lui pardonner,
¡,
con<lition i¡u'il de–
''int l'instrumcut d'unc perfidic toutc patrioti–
quc, dont pcrsonnc ne se faisait conscicncc
1t
Ilcrlin. Cettc pcrfidic consistaiL
a
prcndrc pré–
textc de la situntiou
ntena~antc
de l'Europe pour
armcr, et armcr trCs-activcmcnt
1
Oparlcr d'nl–
Jiance
a
Napoléon afin q•'il tolédt ces armc–
mcnts,
a
olTrir,
a
promcltrc,
a
signcr .méme
cclle alliancc s'il le fallait, ¡1Uis, Je moment
vcnu,
it
s'enfoncer dans Ja Vieillc Prussc avcc
1
~O
mille hommcs, et
1i
se joindrc aux R11sscs
pour aecabler les
I'ran~ais,
tandis que J'Allcma–
gno
tou~
cntierc se soulcverait sur lcurs der–
ricrcs. Sanscxarniner Ja légitimité d'unc parcillc
politique, et en admcllant qu'il est bcaucoup
pcrmis
a
qui rcut aJTranchir son pays, il y avait
bien
a
dirc contre cctlc politiquc, du point de
vuc de la prudcncc. La Prussc pouvait en cJTct
pcrdrc
a
ce redoutablc jcu les restes de son
cxistcncc.
Le
roi, M. de Hardcnbcrg et quelques
csprits sages le craignaicnt, et appelaient folie
une Lelle conduitc. Pour tachcr de les amener
a
lcurs vucs, les mcmbres ardcnts du parti gcrma–
nique répandaicnt mille bruits alarmants, el
chcrchaicnt
a
leur pcrsuadcr c¡ue Napoléon avait
J'intcntion d'cnlcvcr Je roi et la monarchic clle–
mcmc par une subite irruption sur Ilcrlin, ce qui
_élait tout
a
fait faux, mais ce qui aurait pu se
réaliscr, pourtanL, si Ja Prussc avait commis
quclquc imprudcnec, car Napoléon, rceevant de
son cóté des avis tout aussi inquiétants, se tcnait
sur ses gardcs, et avait ordonné au maréchal
Davousl de se portcr sur Bcrlin au prcmicr
dangcr.
Poursuivis ainsi des plus sinistrcs fantlimes,
le roi el M. de I!ardcnberg avaicnl adopté en
partic Je plan qu'on lcur conseillait, moins la
pcrfidic, qui répugnaitaladroiturc du roi commc
a
sa prudcncc. lis avaient résolu d'armer, et ils
avaicnt armé récllcmenl au rnoycn de l'cxpé–
dicnt que nous avons fait connaitrc, el bien
qu'ils se fusseut strictcment rcnfcrmés dans
l'cffectif de 42 rnillc hommcs, néanrnoins ils en
pouvnicnt réunir en peu·de Lcmps -JOO ou
120
millc. Mais s'ils pouvaicnL équivoqucr sur le
chilTrc wai des troupes disponibles, il lcu1·était
impossiblc de cnehcr eertainspréparatifs, comme
eeux pnr cxcmplc qui se faisaicnt dans les places
rcstécs
1i
la Prussc. Napoléon tcnait bien les
f<H·tcresscs les plus importantes de l'Oder, Glo–
gau, Custrin, Stctlin, et en oulrc les dcux plus
impurtanlcs de la Vistulc, Thorn et Danlzig,
mais le roi Frédéric-Guitlaumc ayaiL cncorc c11