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LIVflE QUAflANTE ET UNIEME.
ce qu'il avail fait pour les y provoqucr, et évi–
dcmmcnl aussi ils avaienl, de lcur cólé, bien des
préparatifs
a
lcrmincr, et voudraicnt avoir fini
la gucrrc de Turquic avant d'cn commcnccr une
nutre; et commc Napoléon tcnait
a
n'cntrc–
prcndrc cctle nouvelle campagnc au Nord
qu'avcc des moyens immcnses, il ne ful pas fóché
cl'avoir cncore une annéc devant lui, soit pour
prépare1· ses troupes, soil pour compléter son
matériel, qui eonsliluail,avons-nous dil, la prin–
pale diffieulté de sa prochaine entrcprise. Pour–
quoi son inlelligencc de la siluation n'alla-t-ellc
pas plus loin ? Pourquoi ne vit-il pas qu'il élail
possible non-seulcmcnt de dilfércr la rupturc,
mais do l'évilcr? Ce fut cneorc par la raison que
nous avons donnéc pi·écédcmment. 11 avait lanl
de fois éprouvé qu'aprcs un prcmicr refroidis–
scmcnt on en arrivait inévitablement avcc lui
it
la gucrrc, il avait vu lant de fois ses enncrnis
cachés préLs
a
se rallicr au prcmicr cnncmi
patcnt qui osait lcvcr le masque; il voyait si
bien dans la Hussie l'enncmi vaincu mais non
pas écrasé autom· duque! se rallicraicnt les rcs–
senlimcnls de l'Europc, qu'il se disait que lót ou
lard il aurait encorc un conflit avec clic; el daos
la gucrrc probable aperccnnt lout de suite la
guerrc déclaréc,
a
ce point que sa propre pré–
voyance lui dcvcnait un piégc, lisant profondé–
mcnt dans le crour des nutres saos mcmc rcgar–
der dans le sien; ne voyant pas que daos le
rapidc enchainemcnt de la froideur
1t
la brouillc
ouvertc il enlrait commc cause prineipale son
fougucux earaelcre ; ne voyant pas qu'il dépen–
dait de lui de briscr ce cerclc fatal, en devcnant
un inslant modéré, palient, lolérant pour autl"Ui,
ne faisant aucune de ces salulaircs réllcxions,
n'oyant personnc auprcs de lui pour l'obligcr
11
les fai1·e; ne rccevant aucun avis utile ni de ses
ministres, ni des corps de l'Élat, espcccs de
fantómcs destinés
a
rcpréscnlcr la natiou el
n'osant pas mcmc avoucr ses plus cruellcs souf–
frances,que, livrécntieremcnt
a
lui-memc, il ré–
solut une sccondc fois, on peul le dire, en mai
1811,
la guerrc de Hussic, en prcnantcependant
Je partí de Ja dilTérer. Toujours promplcmcnt
décidé, il
fil
des la fin de mai ses disposilions
en couséqucncc, et donna ses ordrcs militaires,
ses inslruclionsdiplomatiqucs, avcc la ccrtilude
absolue que la guerrc de Hussie n'aurait lieu
qu'cn
1812,
mais qu'cllc nuraít infailliblcmcnl
lieu
a
cclle époquc.
N'ayant rien de caché pour le maréclrnl Dn–
voust, il luí écrivit sur-le-champ que les éréne-
mcnls étaicnt moins prcssants
1
,
mais qu'il ne
renon~ait
a
aucun de ses préparatifs, seulement
que toutcs les fois qu'il
y
aurait un nvantngc, ou
d'économic ou de bonnc exécution,
n
tcrmincr
une chose en quinze jours au lieu de huit, il
fallait Ja lermincr en quinze; que son intention
élait d'avoir l'armée du Nord prclc pour le com–
mcnccmcut de
18·12,
mais sur des proportions
bien plus considérablcs que cclle• qu'il avait
d'abord élablies. Ce n'était plus de 500 millc
hommcs qu'il s'agissail mnintcnant; il 1·oulait
en réunir 200 millo dans la main du mnréchal
Davouslsur laVistulc, en avoir 200 mille nutres
dans sa proprc main sur l'Odcr, avoir une ré–
scrve de
HO
millc sur l'Elbc et le Rhin, une
force égalc
a
peu pres dans l'iuléricur pour Ja
surclé de l'Empire, et envoycr encore des trou–
pes en Espagnc au licu d'eu retircr. Napoléou
conlremanda le départ des quatricmcs et sixic–
mcs bataillonsdu maréchal Davousl, déeida qu'ils
scraicnt formés au dépót parce qu'ils s'y organi–
scraicnl micux, en proj9la mcmc un scpticme,
afin d'cn avoir six en élat de servir; il revinl
sur la formalion en balaillons cl'élitc ordonnéc
clans un momcnt d'urgcnce pour les régimcnls
slationnés en llollandc et en llalie, et voulut
mémc qu'il
fllt
créé un quatl"icmc et un sixicmc
balaillon dans chacun de ces régirnenls. Sans
rcslrcindrc les achals de chcvaux, en lesaug–
mcnlanl nu contrairc, il prcscriviL de les fairc
plus lenlcmcnt pour les fairc mieux, rt enlrc–
pl"it l'organisalion de ses immenscs charroisdans
de plus vaslcs proportions, et sur un nouveau
modele, que nous décrirons aillcurs. 11 profila
enfin du tcmps qui lui restait pour composc1·
aut1·cment el plus grandcment l'armée polo–
naisc , et enroya des fonds
a
Varsovic afin
<l'avoir, l'annéc suivanlc, les places de Torgau,
Modlin, Thorn enliercmcnt achcvées et nrmées.
En un mot, loin de diminuer ses préparalifs, il
]eur donna [Out
a
]a fois pJUS de lcnlcur et plus
d'élenduc, pour qu'ils fusscnt plus parfails et
plus vastcs.
La diplomatíe fut conduile d'aprcs les mcmcs
vues. On avail sondé l'Autriche, et on avait ob–
tenu d'ellc des réponscs de nalure
a
inspircr
confiance, pour pcu qu'on aimat
a
se fairc illu–
sion.
~J.
de Mcllernich dirigcait le cabincl de
Vicnne dcpuis Ja guerrc de
1809.
Sa politiquc
déclorée élail la paix avcc la Francc : aynnt l'arn-
l Je 1·apporte ces foits enayanl
sou~
les yeux les lcllrcs <le
Na¡ioléon au maréclial Oa\·ousl, au miuislredc lagucr1·e,au
roide Saxe,aup1'incc Poniatowski.