LA BÉl\ÉZINA. -
D2GE»BRE
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n'était point élonnant qu'ils profilassent d'un
momcnt de confusion pour se souslraire
:'t
une
clrnrgc qui ne pesail que sur les derniers reslés
au drapeau. Le maréchal Ncy et le général Mai–
son ne se déconeertcrent pos, tinrcnt tete
ti
l'en–
ncmi, et, sccondés par ·1,200 ou ·1,500 Polonais
qui arrivCrcnt sur ce point,parvinrcnt
a
rcpous–
ser les Russes.
On fut,
gr~ice
i1
cct éncrgiquc cJTort, délivré
de Ja cava!cric cnncmicpour deux ou troisjou1's,
mais le froid ayant attcint 21, dcgrés, la perle
des hornrnesalla cncore en augmcntanl. Les bi–
vacs élaicnt couverls de ccux qui ne se révcil–
laicut pas, ou qui se révcillaicnt nvcc des mcm–
Lres gclés, et qui, réduits
it
l"impossibilité de
111archer, étaicnt dépouillés par les Russes, et
laissés nus sur la tcrre glacéc.
Le 1, décernlu·c, la tete de l'année étaitarrivéc
a
Smorgoni, l'arric1·e·garde
il
~lolodeczno.
11
y
cut la un riolent et terrible cornbat entre les
Russes el l'arrierc-garde commanelée par Ncy et
Maison. A la cavalcrie de Plalow s'étaitjointe la
division Tchaplilz. Maison et Ney n'avaieut pas
plus de 600
a
700 hommcs, lllniS
Ull
reste USSCZ
eonsidérable d'artillcrie du 2° corps, qu'on avait
lrainé jusquc-lit, et elont il n'était pas i1cspércr,
vu l'état des cbevaux, qu'on pt\t se fairc suivre
plus longtcmps. Ncy et Maison résolurcnt dedé–
penser 10 leurs dcrniC..cs munitions, et ele faire
une épouvantablc immolalion des llusscs pour
vengcr nos perles quotidienncs. lis crihlerqnt de
milraille la cavalerie de Plalow et l'infantcrie de
Tchaplilz, et les arretcrent longtcmps devant
Molodcczno. Le maréchal Victor, qui avait de–
vaneé Ney et Maison
a
Molodcczno, et qui s'y
trouvait avec 1, mille hommes restés du
U
0
corps,
se joignit
a
eux et les aida it repousscr les
Russes. Ceux-ci fircnt une perle considérablc, et
ne nous prirenl que des hommes isolés, que
malhcureusement ils r:nnassaicnt chaque jour
par ccntaines. Ce dernier combat nous valut cn–
core quelquesjoursde répit.
Mais arri1'és
In,
Ney et Maison n'ayant guere
que''ºº
a
500 hommes, ne pouvaient plus suffire
au service de l'arricre-garde. Le maréchalVietor
en ful chargé, avec les llavarois du générHI de
Wrcde, qui aprcs une longue séparation rejoi–
guaicnt enfin, déjit privés en grande partie des
quatre millc recrues
rc~ues
le mois précédent.
Napoléon, parvcnu {, Smorgoni, et croyant
avoir'asscz fail pou1·son
honncur
en rcstant avcc
l'armée jusqu'au point oú les fourches eau<lincs
n'étaicnt plus
a
craindrc pour elle, résolut cnfin
el'exéeulcr Je projct qu'il méditait depuis plu–
sieurs jours, et dont il ne s'éfoit ouvert qu'arcc
M. Daru de vive voix, avcc
M.
de Bassano par
écrit. Ce projct, fort sujct
a
conteslation, ét;1it
eelui de parlir pour retourner i1Pal"is. ;1. Daru,
loujours appliqué avcc ícrmcté i1ses devoirs, et,
sans se fairc une vcrtu dedéplairc, se faisant une
obligalion ele dire lavérité quand elle élait utile,
soutint
á
Napoléon que l'arméc était perduc s'il la
r¡uittait. M. deBassano, qui n'avait pas mémc le
stimulant de ses dangers pcrsonncls pour opiner
comme
il
le fir
1
caril n'était
JHls
dans les rangs de
l'arméc, cut le méritc bien grand, dans la situa–
lion actuclle, d'écrire
a
Na¡:oléon une longue
lcllre pour lui conseiller de rcslcr.
11
lui disait
que la conspiration de Malet n'avait produit en
Francc aucunc émotion, que les esprits étaient
plus soumis que jarnais (asserlion vraie, s'il
s'agissait de soumission matérielle); qu'il scrait
obéi de Wilua aussi bien que des Tuilcries
mCmcs; que sans sa préscncc, au contrairc, l'ar–
rnée achcvcrait de se dissoudre, et que la disso–
lution complete de cclte armée serait Ja plus
grande des calamités qui put termincr la cam–
pagne. Cornme dernicr molif, M. de Bassano di–
sait
it
l'Empercur que sa présence
a
la tete de
ses
sold~ls
contiendrait l'Allemagne, et l'empe–
cberait de se jclcr sur nos débris. Aucune de
ces raisons ne toucl1a Napoléon, et quelques–
unes mémc produisirent ehcz lui l'e!Tet tout
opposé
n
celui qu'cn auenelait M. de Bassano.
Napoléoncroyaitl'armée plus pres desa disso–
lution qu'il n'en voulait convenir, mCmc avcc
M. de Bassano ; considérant done le mal comme
it peu pres aceompli, il n·envisogcait plus que le
danger de se trouver avee quclques soldatsexlé–
nués, incapables d'aucune résislance, a quatre
ccnts licues de la frontiCrc f1·nngaisc, nynnt sur
ses dcrricrcs les Allcmands fort cnclins i1 la ré–
roltc. Or il se dcmandait ce qu'il deviendrait, ce
que devicndrait l'Empire, si les Allemands fai–
saient cellc réflexion si simple, qu'en l'cmpc–
chant de retourncr en Frunce, ils détruisaicnt
son pouvoir nvcc sa personnc
1
et
si,
ccllc ré–
flexion faite, ils se soulevaient sur ses de1•ricires,
pour fcrmcr la route elu llhin
it
lui et auxdébris
qu'il eommandait. Alors tout étail perelu, et la
gucrrc dcvail enquclqucs jours finir par sacap–
tivité. Or on rend a la liberté un prinee conunc
Frangois ter, qui a pour le remplacer un succes–
seur incontcsté; mnis on détrónc un hommc,
quclque grand qu'il suil., qui, porté par le hasard
des révolutions sur un lróne oú il n'était pas né,