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LJVRE QUARANTE-CJNQUIE!IE.
Russcs clTrnyés du grand nom de Napoléon, hé–
sitant
n
lui barrerlechemin, ne voulantl'cssaycr
qu'cn masse, lui avaicnt ninsi Jaissé le temps de
trouvcr un passage, d'y jclcr des ponls et ele le
franchir. Napoléon dut au hasard miraculcux de
l'arrivéc de Corbincau,
h
In
sagacité et au cou–
ragc de celui-ci, au noble dévoucmcnt: d
1
Éblé,
n
' la résislance désespéréc de Victor ctdcscs sol–
dats,
ú
l'énergie cl'Onclinot, de Lcgrand, de Mai–
son, de Zayonchek, de Doumcre, de Ney, et cn–
fin
a
son diseCl'llClllCnt
Slll'
Ct profond qui lni
avait révélé le vrai parti
a
prendrc, Napoléon
duLd'avoir échappé, par une scCne snng!anle,
au plus humiliant, au plus aecablant des désas–
tres. Cette tragique fin couronnait clignemcnt
cetlc terrible campagnc, et mnlhcurcux par sa
fo
ute, Napoléonrcslait grand néanmoins!
11
cle–
vait clone rcmercicr tout le monde, car il élait ce
jour-li1, plus .que clans ses plus éclalantcs vic–
toires, J'obligé de ses généraux, de ses soldats,
de ses alliés cux-mCmcs. Néanmoins, nprCsavoir
félicilé Víctor, Je 28 au soir, des prodiges de va–
leur exécutés dans Ja journéc, il Jui
procli~ua
le
lcndcmain 29, quancl il eonnut
fa
catastrophe ele
Ja division Partonneaux, de sanglants reproches,
rcvint sur le passé, sur le temps pcrdu Je long
de J'Oula en f'ausscs manamvrcs, et paya d'11nc
exccssivc sévérité le plus grand scrvicc que Vic–
tor lui cutja111ais rcndu. Pourtant Je malhcur
de Partouneaux, s'il était reprochable a qucl–
qu'un, était sa fautc autant au moins que cellc ele
\lictor. car il avait voulu prolongcr Ja faussc
<lé111onslralion sur Borisow au dela du tcmps
nécessaire. Vietor, nu lcndcrnain d'un admi–
rable dévouement, se retira le cccur contristé.
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follait marchcr cependant, et marcher sans
perdrc une minnle pour rcjoindrc par Zcmbin,
Plctchcnitzy, llia, Molodcezno, la roulc de
Wilna, qu'on rctrouvait ¡, Molodcczno. Du point
oú l'on avait passé Ja Dérézina jusqu'i\ Molo–
~eczno,
on rentrnit dans une région ol1 les
routcs, const.ruitcs aumilieu
de
forCts maréca–
gcuses, élaient tantót établics sur des lits de fas–
cines, tantót sur despontsde plusieursccnlaincs
de toises. JI y avait trois de ces ponls
o
frnnehir
entre la Dérézina el Pletchenitzy, ou les Russcs,
en mctlnnt le fmr, auraicnt facilcmcnt arrcté
loute l'armée. lis avaient une avant-garde de
Cosaques appuyéc de quclque eavalerie régulicre
a Pletcbenilzy,
SOllS
le général
l'USSC
Landskoy.
Cetteavant-gardc hcurcuscmcnt ne fit ríen dece
qu'elle aurait pu faire. Elle était oecupée d'as–
sié~cr,
dans une grangc
a
Plctchenitzy, le maré.
chal Oudinot gricvemcnt blcssé, rt n'ayant avcc
lui qu'unc einquantaine d'hommcs qui cscor–
faient quelques officicrs atlciuts clans la journéc
du28. L'intrépide maréclrnl se soulennnt
u
peine
se défcndaiL, avec ccux qui 17cntournient, contrc
dc-nombrcux assaillnnts, et lui-mCmc, se servnnt
ele ses pislolcts, tirait 11 travers quclqucs ouvcr–
lurcs pratiquées dans les muraillcs de sa chau–
miCrc. L'armée
1
en arrivant, dégagca luí et ses
compagnons d'iufortunc,
et
dispersa les Co–
saqucs.
Gró.cca
cette incuric de l':want-gnrde russc,
l'armée tout enticrc pul travcrser sans obstaclc
les ponts si Jongs de laroulc de Zembin
u
Molo–
dcczno,
et
nrrivcrsans encambre
au
point
oU les
plus cliffieilcs passages étaicnt francl1is. Lenrnré–
chal Ncy, ayant remplacé le mnréchal Oudinol.
d:ms le commandcmcnt du
2e
corps,
avait
ren–
contré un lieutcn:mt dignede lui, e'étnil k géné–
rnl
~lniso11
1
son égal en bonnc snnté, en bonne
humeur, en inlrépidité, el joignant 1 Joules Jc.1
qualités du solda! une rarc sagacitémilitairc. Le
général Legrand, qui commanrlait l'unc des deux
dil'isions
fran~aises
du 2° corps, ayantélé blcssé,
le générnl Maison réunissniLdnns sa mnin les
5 milie hornmcs rcstnnt de ce 2° corps, qui était
de 39 millc bommes
á
l'ouvcrturc de In cam–
pagnr.. Ncy et
~laison
s'entcnclairnt parfaitement.
S'étant arrctés aux ponIs de Zcmbin, ils les cou–
vrircnt de fascines nuxquellcs ils miren! le fcu,
et quand Ja ca"alcric enncmic s'y présenla, clic
n'eut pour passcr qne des monccaux de cendres
hrúlantcs élendues sur la glace a dcmi foncluc
dcsmnrais.
Ce ne ful que le lendcmain 50 que l'arricre–
garde atteignit Plctchenitzy.
La
clic fut assaillie
par lcgénéral Platow, qui dirigeait
la
poursuilc.
Un encombremcnt cfl'royable se produisit 11 l'cn–
trée du villagc, et un rnoment le maréchal Ncy
et legénéral Maison furent dans l'impossibilité
de se mouvoir et de faire agir lcur artillcrie.
Ayant cnfin réussi
ii
se déharrasser, ils ne trou–
vCl'ent plus qu
1
un mi!licr d'hommes dans le rnng,
les autres s'étant lnissé déhaucher par la foule
des débandés. Le froid, qui avait un momcnt
fléehi avant Je passage de la Bérézina, avait rc–
pris dcpuis, et de H ou ·12 dcgrés, le thermo–
mctrc Réaumur était dcscendu
¡,
18, 19 et
20 dcgrés. La souffrance s'était nugmcntéc
a
pro–
porlion, et les hommes ne pouvaient prcsquc
plus se tcnir dcbout. La vuc des blessés, qu'on
ne songcait pas
a
ramasscr, n'était pns faite
d'ailleurs pour encourager les combaltants, et
il