LA BÉIIEZINA. -
•OVEMBRE
1812.
imagination s'exallant
a
mesure qu'il parlait, il
embellissait de mille détails qui la rendaicnt
vraisemblablc celle supposition avcc laqucllc il
consolait sa détrcssc actucllc. Le général Jomini
se con lenta de lui répondre que ce hcan mouvc–
mcnt scrait cxécutnblc snnsdoutc, nrniscnItalic
1
en Allcnrngnc, dans des pays oU J'on rcncontrait
pnrtout de quoi
viHc,
et avcc une arméc saine
et vigourcusc, que de longucs privntions n'nu–
raicnt pas cntiercmcnl épuiséc. 11 cút pu ajou–
tcr, muis ce n'était pns le momcnt, que cclui qui
trouvc les carac1C1·cs éncrvés les a Je plus sou–
vcnl éncrvés lui-mCmc, en abusant de lcur dé–
voucmcnl, et rcssemblc
a
l'imprudcnt cavalicr
qui a tué de fatigue le eheval destiné
a
le
porlcr !
Napoléon ne tint pos plus complc des obscrva–
tions qu'on Jui
fil,
que des rCvcs brillants aux–
qucls il vcnait <le se livrcr, et qui n'étaient que
les préliminaircs i1lravers lcsqucls son puissant
esprit allail arrivcr
á
sa véritablc <létcrminalion.
Spn parli, encfTct, étnit pris avcc ce lact, avec ce
<liscernemcnl qui étaicnt infailliblcs, quand <le
tristes entraincmcnts ne l'égnraicnt pus,
et
Je
dangcr était asscz grand, assUJ•émcnt , pour se
gar<lcr de toute errcur. Passcr
¡,
gauchc, au.dcs–
sous de Jlo1'isow, lui scmhlait impossihlc aprcs
amir entcndu le général Dodc. Passcr
a
droitc
et
au-dcssus, étnit trop long, l'exposuit
¡¡
Clrc
prércnu sur
Wilna,
et
il
parlageait en ce point
!'avis <lugénéi·al Jomini. Pcrccr droit dcvant lui
pour allcr par le plus court chcmin sur Wilna,
de maniCre
i1
dev~rnecr
tous ceux qui
le
rncna–
~aient
en ílanc el par derricre, était le mcillcur,
le
plus sagc de lous les plans, quoiquc le p!us
modcstc. Mais la dimculté étail irnmcnse, ¡lUis–
qu'il fallait, ou reprcndrc le pont de llorisow sur
Ics Russcs, ou en jeter un dans les environs,
malnré tous
les
cnncmis qui nous scrraicnt de
p1·Cs , dcux succCs
bien
pcu vraiscmblablcs,
ii
moins t!'un dcrnicr eoup de fortune égal
i1
ceux
que Napoléonarait eus dans ses plus hcaux jours.
11 n'cn uéscspéra pas, el rcsolut de
SC
po1'tCI' droit
sur Ja
Ilérézina~
de pousscr ''ivcmcnt Oudinot
sur llorisow afin de rcprcnJrc ce point , et s'il
n
1
y
pancnait pas, de chcrchcr un passagc dans
les
cnvirons.
11
ad1·essa les instructions couvcnablcs
a
Ou–
dinot, qui nrrivait précisfo1ent sur notro droitc,
et il se porta lui-mémc
a
Bobr pour rcillcr de sa
pcrsonnc
i1
l'exécution de ses volontés. L
1
inlérCt
lle n'Clrc pas ¡iris lui ettnutc sonarméc luiavait
rcndu l'ardenlc actirité de ses prcmicrs lcmps, eL
il ccssait <l'ctre empcreur pour devenir général.
Rctrouvcrait-il avcc ses qualités sa bonnc for–
tuno?Ce n'était pas ccrl;1in, nwis c'étnil possiblc.
11 scmblc, en efTct, qu'cn ce 111omcnl la for–
tunc, l<.1ssc de lant de rigucurs, lui nccordait
enfin un
mil'aclc pour le saurcr des dcrniCrcs
humiliations. On a vu que le maréchal Saint–
Cyr, apres l'évacualion de Polotsk,avait détaché
du 2' corps le gcnéral de Wrcdc pour l'o¡•poscr
i1
Steinghcl, et que ce
général bnvarois, par gotil
ou par circonstance, s'était laissé isolcJ' du
2° corps, et confincr dans les cnvirons de Glou–
bokoL
JI
avait conservé avcc lui la <livision de
caraleric légCrc
du
général Corbincau, composéc
des 7• et 20• <le chasscurs, et du 8• de lancicrs,
division c¡uc le 2' corps rcgrettait bcaucoup et
réclamait arce instancc. Parli de Glouhokoé le
·IG
novcmbrcpour
se réunir a11
2°
corps,
le
géné–
ral Corbinrau étail vcnu successivcmenl
i1
Dol–
ghinow,
a
Plctc11cnitzy,
a
Zcmbin, lout pres de
Borisow, et élait tornbé au milieu <les partis cn–
ncmis que l'a111iral TchilchakofT avait lancés en
avant pour se Jicr avccWittgenstein sur la haute
llérézina. Au
nombre
de
ces partis se trouvait
un
corps de 5 millc Cosaqucs, sous l'aidc de carnp
Czcrnichcff, qu'Alcxan<lrc rcnait d'cnvoyer tour
a
tour
a
Kutusof,
a
TchitchakofT,
a
Wittgenstein,
pour lcur
communiqucr
Je fomcux
plan cl'agir
sur les derriercs de Napoléon, et les amcner i1
marchcr <l'accor<l. L'aidc de eamp CzcrnichefT,
ayant quillé TchitchakofT qui étail sur la droitc
<le la Dérézina, rcmontait cclte riviCrc, et cher–
chait
a
la
passcr pour aller joindrc Wittgenstein
sur
In rivc gnuchc, etnmrncrun conccrt d'clTorts
contrc Napoléon, qui était aussi sur la rirc
gaucho. Chemin foisant,
il
avnit cu In bonne
fortunc de délivrcr le général Wintzingcrodc,
cnvoyé en Francc commc prisonnicr, et pnr un
hasnrd moins hcurcux pour
lui,
avait hcurté en
passant le général Corbincau. Celui-ci, qui sous
les apparenccs ks plus simples réunissait
h
hcau–
coup de fincssc
un
grand eouragc,
n':n
1
ait pns
pcrdu la tele, qnoiqu'il n'cúL que 700 clievoux,
s'élait débarrassé i1 coups <le sabre de ses assnil–
lnnts, etarnit
poussé
jusque prCs de
13ol'isow,
oú
les llusscs étaicnt déji1
entrés. Tl'Ournnt les
Hmscs dcvnnt lui ll Borisow, les ayant
lais~és
la
rcille
su1•
ses
dcrri~rcs,
il n'avaÍt rn qu'unc
maniCrc de sc tircrd'cmhnrras, c'étnitdc
t.rm·er–
scr la Bérézinn, et cPallcr
(1
Ja rcnconlrc de la
grande arméc, qui clcvait luí olTrir un rcfugc
nssuré. ll ne se cloutnit pas qu'cn roulant se
sau1'er, il la sauvcrait , et qu'clle étail tcllcmcnt