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584

uvnE QUAnANTE-C11iQUIE!IE.

l'initialire du parti

a

proposer. Le général con–

naissait le cours de la Bérézina, qui cst bordéc

sur ses dcux rives d'unc zonc de maréc¡¡gcs de

plusieurs millc loises de largcur, et il soulinl

a

l'Empereur qu'il fallait renonccr o percer par

Borisow mCme, puree que les Russcsbrúlcraicnt

le pont de ectte villc s'ils ne pouvaient le défcn–

drc, et au-Ocssousde Borisow, parce que le pays

en desccndant la Jlérézina étail toujours plus

IJoisé

et

plus mnrécagcux. Ce n'étaicnt pns scu–

lcmcnt les ponls sur les raux cou1·antcs qu'on

trOU\•crait coupés, mais les ponts sur les mnrais,

beaucoup plus longs et plus diflir.ilcs 1 franchir.

Au conlrilirc, en rcmontant laBérézinavcrs son

point de jonction avec l'Oula, dans lrs cm·i1·ons

de Lcpcl, on arriverait o des cndroils oli ccllc

rivicrc coulait sur des sables, dans un lit peu

profond, et on la franchirait avcc de l'caujusqu'o

la ceinturc. Le général Dodc aflirmait que jamais

le 2° corps, auqucl il élait attaché, n'cn avail élé

cmbarrassé dans ses nornbrcux mouvemcnls. 11

proposa done o l'Empercur d'appuycr o droile,

de rallicr, en rcmonlanl la Ilérézina, Víctor el

Oudinot, de passcr sur lecorps de Willgcnstcin,

et, ce détour terminé, de rcntrcr aWilna par la

roulc de Gloubokoé.

Napoléon, ma!gré ce qu'on luí disait, n'a,·ait

pas cncorc pu détachcr son esprit de la route de

Miusk, la plus bcllc, la mieux approvisionnée,

sur laquellc il étail ccrtain de rallier, outre Vic–

tor el Oudinot qui élaicnt déja prcsquc réunis

n

lui, le princc de Schwarzcnbcrg et Rcynier, el

pouvait se ménngcr une conccntration de forces

de

no,ooo

soldats armés. 11 adrcssnit deux objcc–

tions

ii

la proposition du général Doclc: pre111ic–

rcmcnt la longueur du détour qui l'éloignait de

Wilna, el l'exposnit 1 y étrc prévenu par les

Russcs, et secondement In rcneontre probable

dans celle direction de Wiugenslein et de

Steinghel, que Víctor el Oudinol n'avaienl pu

vainero

i1

cux. deux. Le général Dode répondait

que probablerncnt on éviternit les deux généraux

russcs, que d'ailleurs ils n'au1·nient pas vcrs les

sourccs de In Bérézina un lcn·ain aussi facilc

li

dCfcndrc que sur les bo1·ds de l'Ouln, et n'osc–

raient pas tcni1· lorsqu'ils ve1Tnienl Nnpoléon

réuui aux maréchaux Viclor et Oudinol. Du

reste, tout en discutant, Napoléon, qui n'avnit

pas hesoin qu'on luí répondit, car il s'étail foil

d'avance 11

lui-mcme toutes les réponscs que le

sujet comportait,examinait la cnrte étalée dcvant

lui, sans prcsquc écoutcr les pnrolcs du général

Docle, suivail du doigt la llérézina, puis le Dnic-

pcr, et, ayant rencontré des ycux Pultawa, s'é–

cria tout

h

coup :

u

Pultawa

!

Pultawa

!

)1

puis,

laissanl la cclte carie, et pnrcourant la chétive

piCcc oú avail licu ccl cntrclien,se milh répétcr:

u

Pullawa

!

Pulrawa

!

1•

sans rcg::irdcr son

intcr~

locutcur, sans mCme

fairc

attention

a

lui.

Le

général Dodc, saisi de ce spcctacle exlraordi–

nairc, se laisnit, et contemplait avcc

un

mélangc

de douleur et de surprise le nouvcauCharlesXII,

cent fois plus grand que l'ancien, mais, hélas

!

cent fo is plus malheureux aussi, et ence moment

rcconnnissanl cnfin

sa

vraie destinéc. A

Ce

point

de l'enlretien, arrivcrrnt Mural, le prince Eu–

gcne, Ilcrthier, et le général Jomini qui, ayant

été gouverneur de la province pendnnt la cam–

pngne, nvnit

fait comme

le

générnl

Dode une

étude nllcntivc des lieux, el était fort capablede

donncr un a\'ÍS. Le général Dodc, par mo<lcslie,

crut devoir se rctircr, et sortit sons que Napo–

léon, toujours dislrnit, s'cn

aper~út.

En voyanl

le général Jomini, Napoléon lui dit :"Quantl on

n'a

jamais

cu dercvcrs, on doit les

aYoir

grands

comme sa fortune... " Puis il provoqua l'opi–

nion

du

général.

Cclui-ci

1

partngcant

enun

point

l'nvis du génfral Dode, jugeait impossible de tra–

verscr la Bérézina au-dcssous de Ilorisow, mais

trouvaitbicn long,

bienfatigant, pour

une arméc

déju épuisée, de remonter la Bérézina afin d'aller

franchir ccttc riviCrc vcrs ses sourccs. 11 pcnsnit,

d'<1prcs les rapporls du pays, qu'il élail possible

de passcr droit dcvanl soi, un peu au-dcssus de

Jlorisow , el des lors de rrjoindre la roule de

Srnorgoni, la plus courte pour aller

a

Wilnn, et

la rnoins dél'astée par les arrnées belligéranles.

L'événcment prouva bicntót que cct avis était

fort snge. Napoléon, sans le cornballre, car il

écoulail

a

peine, parul se reporter tout ;\

coup au lernps de ses plus brillantes opéra–

tions, et, se plaignant de tout le mon<le, mar–

chant et pal'lant avcc une animation extraordi–

naire,

se

lllit

h

dire

que

si

lOllS

les

CCCUl'S

n'étnicnt

pas aballus (et en

pronon~ant

ces paroles il sern–

blait rcgarder ses principaux licutcnanls préscnts

aulourd~

lui),

il

yaurn.it

unebienbcllc

manruuvre

i1

cxéculcr, ce scrail

de

remontcr

vcrs

la haute

llérézina, commc le tui conscillait le g1\nér:il

Dode, et au licu d'y chercher seulernent un pas–

sng:c, de se jcter sur Wittgenstein, de l'cnlcvcr,

de le foire prisonnier.

ti

:ijoulail que si, en ren–

trant en Pologne aprcs de grands rnalhcurs, il

cmmcnnit cepcndrmt avcc lui une arméc russe

prisonniCrc, l'Europc rcconnaitr:lit Napoléon,

la gran<le armec el la forlune de l'Empire

!

Son