LA~BÉRÉZINA.
-
NOVEMm
1812.
579
apaiscr cclle forlune justcment courroucée de
tant d'cnlreprises insensées.
Ces journées cotilcrent
a
l'arméc véritable,
11
celle qui porlait cncore les armes, cnviron dix
a
douze mille hornrnes, morts, blcssés ou prison–
niers; elle coiita scpt ou huit mi lle trainards et
beaucoup de bagages
a
la massc lloltantc. 11
rcstait
it
Orscba !out au plus
21,
mille hommcs
armés et cnviron 2!í mille trainards. C'élait la
rnoitié de tout ce qui était sorli de i\Joscou, le
huiticme des 420 mille hommcs qui avaicnt
passé le Niémen
1 •
Quant aux Russcs,si lerésul–
tat était grand pour cux, la gloire ne l'était pas,
car avcc !íO
a
GO mi lle hommes pourvus de toul,
et notammcnt d'uncarlillcrie immensc, avcc une
position commc cclle de Krasnoé, ils auraicnt
chl, sinon arretcr toute l'arméc, du moins en
prendre
1"
majeurc parlic, et si, Napoléon passé
avcc le prince Eugcnc, ils s'étaicnt placés en
massc entre Krasnoé et le maréchal Davoust,
celui-ci devait étre pris !out cnticr, et le maré–
chal Ney aprcs lui. Mais nous coudoyant un pcu
chaque jour, se retiran! épouvantés des qu'ils
avaicnt senli le choc, ils laisscrcnt l'arméc fran–
caise se sauver piccc
a
picce, et le dcrnicr jour
ils curent la confusion de ne pas mcme prendre
le maréchalNey, qui n'aurait pas dü lcur échap–
per. lis ne recucillircnt d'aulrc trophéc que
beaucoup de nos soldals tombés morts ou blessés
sous leur épaisse mitraille, et beaucoup de nos
trainards facilcs
a
ramosscr par ccntaincs dcpuis
que la miscre les avail privés d'armcs. Le
nombre des uns et des nutres n'était, hélas
!
que
trop grand. C'étaicnt des résullats imporlants
assurémcnt, et désolants pour nous, mais ce
n'éiaient pas des mcrvcillcs d'arl militairc méri–
tant les litres qu'on s'cst plu
a
lcur prodigucr.
1011
ne comprcnd pas comment M.
de Boutourlin, écri\•ain
séricux, peutalléguer:\ toutmomcutdeschiffrcs ::iussi élr:in–
gemcnl exagérés que ccuxqui soul
énonc~s dans
son livrc. Si
on aJditionnail toutcs les perles Cnumérées aprCs chaque
action,il n'aurait plus cxisté un seul bommc Jclloul:'tnotrc
arrivée 1t Wiosma. Voiciun singulic1·cxcmplcdeccs cxagéra–
tlons.
ar.
de Doutourlin
dit
que lajournée du
18
eoüta aux
Frau~ais
8,500 hornmcsdu corps de Ney qui capitull:rent, et
3,500qui íurcnt faits pl'isonnicrs par les Russcs Jans lecou–
r:rntdu comllat, sonscompter les tués(tome2, pagc229). As–
surémentcc n'cst pas tropquedcsupposer que le ma1·échal
Ncyperdil un millicrd·honuncssurlechampdc bataillc: les
hommcs qui eapilulill'enl, les prisonnicrs, les tués fcraicnt
done 15 millecn
tout.Or,a\•ccsoncorpsetladi\•ision Rie:ird,
le maréchal Ney ne comptait pas
7
millc hommes sous ses
ordrescnsortanldeSmolcnsk.Commentaurait-ilpu enpcrdrc
l:i millc?
M.
de Boutourlin
dit
cneore, p:igc
~ji
du
mCmc
\'Olumc, que les Franpis cn toutpc1·dircnl1lonsecs journécs
des lG, 17, 18nO\'embrc, qua\ifiCcs par \ui de ehcfs-d'reuvre
del'art,26milleprison11ie1·s
1
tOmilletuCs
1
lllessés ou
norés
1
Dansces opérations il yavait toulcfois un mérilc,
un scul, mais réel, la prudcnccconstante du gé–
néralissime Kutusof, qui, comptanl sur leclima!
et sur l'biver, voulait dépcnscr pcu ele sang, el
ne ricn hasarder, mémc pour rceucillir les plus
bril!ants trophécs. Mais elans ccllc pcnsée mcmc,
il aurait dü mieux mcsurcr la proic qu'il prétcn–
dait saisir; ilaurail du jugcr la portion de nolre
longuc colonnc qu'il voulait coupcr, couper
cclle-la résolümcnl, et l'cnlll\icr en laissant pas–
ser lereste. Sa prudcncc, fort louablc saos eloutc,
quand on considere l'cnscmblc de la campagne,
ne ful pendani ces journécs, qui auraicnl pu clrc
décisivcs, que cclle d'un vicillarel timidc, hési–
lant saos ccssc, et i1 la fin se glorifianl de résul–
tals qui étaicnt l'c:cuvre de la fortune bien plus
que la sicnne.
Quoi qu'il en soil, Napoléon, aprcsavoir quitté
Krasnoé, avait couché le 17 mcme
a
Liady,
le18
a
Doubrowna, le 19 i1Orscba. 11 yavail 1
Orseha un ponl sur lcDniépcr, et si Kutusofélait
alié nous altcndre sur ce point au licu de nous
atlcndre
ii
Krasnoé, il cst probable que nous ne
nousscrions pas tirésdece gouffrc,car nous n'au–
rions pas franchi le Dniépcr aussi facilcmcnt que
le ravin de la Lossmina, el ce ílcuvc d'aillcurs
n'étail pas cncorc asscz solidcmcnt gelé, surlout
aux cnvirons d'Orscba, oit il avait dcux cenls
toiscs de largcur, pour qu'il ful possiblc de le
passcr sur la glace. Napoléon, beureux d'clre
enfin daos un lieusür, et
d'y
trouvcr des vivrcs,
car il
y
avait i1Orseha des magasins tres-bien
fournis, lenta un nouvcl cssai ele ralliemcnt ele
l'arméc, au moycn des distributions réguliercs.
Un elétachcmcnl de la gcnelarmcrie d'élilc ré–
ccrnmcnt arrivé ful cmployé
a
faircdans Orscha
fa
policc des ponts, :\ cngagcr chacun, par la
e1228 llouchrsareu.Cesontl:'ldcs asscl'tions insoutcm1blcs.
Acceompteilaur:iitfollu que
l'arméc fran~aise
füt réduilcit
ricncnarrivant:) JaBéré
iin:1.El!cétai1sorticdeSmolcnskau
nombre de 56 mi lle hommes armés, et
de
50 mille lrainarils
cn\'iron.Ap1·Csles fatales journécsdcl\rasnoé,lagarJc rcs1t1it
environ
il.8
millehommes, le prinec Engl:nc:)5, lcmaréchal
Da,•oust
a
8,
lcmnréehal Ncy
1
J,500, i'ouiatowski
et
Junot
il.
2,tiOO : tol:il
23
miJlc hommcs. C'flait done tout :iu plus
15 mille hommc.; <1uiauraie11t élé pcrdus. ncslcce qu·on¡mt
enlc1•crde trai11:irds,ete·estbcaucoupdireque desupposer
qu'on enprit
'J
i\8 millc, ce quiferait une pcrte ilc20millc
l1ommcsc11viron,elnonde5Gmillc. Quanl
a
l'ar1il!c1·ie, rar–
méea\'ai1 1aOhoucl1esíl íeua1tclCcs en so1·tantJcSmolcnsk,
eommcntaurait-elle pu cnpcrdre228? Assu1·émentnosdéws–
trcs furent granJs, etiJserait
aussi
puériltle les 1lissimulcr
qu'il l'estde lese.'i!agérer;mais ilíaut songerqu':wceces ma–
niCrcstlecomptcr, iluc rcslerail plus l'ien pou1· suffi1·e, non
posscnlcmcnt ;)
de
nou1•cllcs ex:igérations, ruais ;) la sim1Jlc
énumCi'ation des pc1·tes trop récllcs <1t1e nous fimcs
plus
lord.