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LIVRE QUARANTE-CINQUIEME.

pcrsuasion ou la force,

a

rejoiadrc son corps.

Ces bravcs gens, habitués

a

réprimcr les désor–

dres qui se produisaicnt sur les dcrricres de

l'arméc, n'avaicnt jarnnis ricn

\'U

de parcil. lis

en étaicnt eonstcrnés. Tous lcurs elTorls furcnt

"ains. Les mcnaces, les promcsscs de dislrib:1-

tions au corps, ricn n'y

fit.

Les hommcs isolés,

armés ou non armés, trouvaicnt plus commodc,

surlout plussUr,de s'occupcrd:cux, d'cux seuls,

de ne pas SCXpOSel' JlOUl' Je Saiut des aUll'CS

U

clrc blcssés, ce qui équivalait it ctre tués, et, une

fois le joug de

n10nneur

sccoué, ne voulaient

plus le rcprcndre. Parmi les bommes débandés,

quclqucs-uns avaicnt gnrdé lcurs nrmcs, mais

uni~uemcnt

pour scdéfendrccontre les Cosaqucs

et pour maraudcr plus fruetucuscmcnt. Amcsur.r.

que la rctraitc se prolongcait ils s'étaicnt faits i1

ccltc miscrc, el s'étaicnt organisés en sociétésde

marche, vivant ele lcur proprc industrie, profi–

tant ele l'cseortc des corps armés sans jamais

lcur rcndre aueun scn•ice, résistant si l'on cher–

chait

a

les ramcner

it

lcurs régimcnts, ne vou–

lanl fairc usage ele lcurs ormes que contre les

Cosaqucs ou lcurs camaradcs, maraudant, pil–

lan! sur les cótés ele la route ou sur la route,

porlant lcu1· butin sur des voiturcs qui contri–

buaient it allongcr les colonncs, elétruisanl autant

qu'ils consommaient

1

et

souvcnt mCmc pour se

chaulTcr mctlanl le fcu

a

des maisons occupécs

pa1· eles officicrs ou par drs blcssés, donl bcau–

eoup péri1·cnt ainsi dans les ílarnrncs: lant csl

néccssairc le joug ele la tliscipline sur ces ét1·cs

chez lesqucls on a dél'cloppé

0

l'instincl ele lo

force, pour qu'ils n'enabuscnt pns, et nedcvicn–

ncnl point ele 1•éi-itahlcs beles féroecs

!

Parrni

ces nrnraudcurs obstiués,

se lrouvaicnt

beaucoup

d'ancicns

réfractaircs,

et trCs-pcu de vieux

sol–

elals, ct1r la plupt1rl de ccux-ei restaicnt el mou–

raicnl au drapeau. A la suite des plus alertes

vcnail Ja foulc des hommcs faiblemcnt constilués,

marchaiit sans armes, ''ictimcs de tous, de l'en–

ncmi et de lcurs eamarades, se trainant et vi–

vant

eomme

ils pouvaicnt, jonchanLks roulcs

ou les bil'acs de lcurs corps cxlénués, et dans

lcur profond aballcmcnt se défcnelant

o

peine

contrc la mort. En général c'étaicnt les plus

jcunes, les moins inelocilcs, les elcrnic1·s tirés ele

lcurs fomillcs par

la

eonscription.

Cctlc contagion moralc avail allcinl mcmc Ja

gardc. Napoléon la réunit pour la haranguer,

pour la rappclcr au scntimcnt du dcl'oir, lui elit

qu'cllc étail le elcrnicr asile de l'honncur mili–

lairc, qu'it

elle

surtout il apparlcnait de

rJ01~ncr

l'excmplc, et ele sauvc1· ainsi les restes de l'armée

de la dissolulion donl ils étaienl mcnacés; que

si la gardc dcl'cnail coupablc i1 son tour, elle

serait plus coupable que tous les autrcs corps,

car clic n'aurait pas l'cxcusc elu besoin, le pcu

ele rcssourccs elont on disposail lui ayant lou–

jours été cxclusil'cment réscrvées; qu'il polll'rail

employcr les chalimcnts, et fairc fusillcr le prc–

mier de ses vieuxgrcnadicrs rencontré hors des

rnngs, mais qu:il aimait micux cornplcr sur

leurs nncicnncs verlus gucrriCrcs, eL obtcnir de

lcur dévouemcnt, non de

la

craintc, ·ics bons

cxcmplcs qu'il inl'oquait de lcur parl.

11

arracha

h

ces vicux scrvitcurs: quclqucfois rnécontcnts,

mais loujours fidcles au dcvoir, des cris d'asscn–

timcnt. el, ce

qui

wllail mieux, des résolutions

ele bonnc coneluitr, <1ui au surplus n'élaicnt pas

noul'clles. car cxccpté ce qui était mort, prcsquc

loul le reste ele la vicillc gardc étail dans le

rang. Des six millc soldals qui Ja composaicnt

:rn

passage

du

Niémcn,

il

sur\'ivnit environ

5,500

hommes. Les autrcs avaicnt péri par In

fatigue ou le froid, trcs-pru par le fcu. Prcsquc

aucun ne s'était débanelé. La jeunc gardc dé

ciméc par le fcu et Ja fatigue, quclquc pcu aussi

par la déscrtion du drapeau, complail cncore

2 millc hommcs, la elivision Claparcelc

1,500.

Ccux-ci c!taicnl le dcrnicr débris des vieux régi-

111cnts ele la Vistulc. 11

y

al'ait cncorc parmi la

cavalcl'ic de cctlcmcmc gardc quclqucsccntai11cs

de

c:ni:1licrs

montés.

Les carnliers

démontés

sui–

vaicnt Je corps en assez bon ordrc. Les troupes

du rnaréchal Dal'oust pouvaicnl sculcs préscnler

untcl clTcctif.

Nopoléon, frappé drs ineonvénicnts des lon–

gncs files de bagages, décida qu'on brUlcrait

les l'oilurcs qui ne conliendraicnl pas des blcssés

ou des familles fugilivcs, el qui n'apparlicn–

el1·aicnl ni it l'artilleric ni au génic.

11

n'cn pcr–

rnil qu'unc pour lui

et Murat, une pour cbac11n

des maréchaux eommandants ele corps, el fil

hl'lilc1"impiloyablcmcnl toutcs les autres. Dans

son zclc pour la conscrvalion de l'artillcric,

il

voulut, malgré les sages rcprésenlations du gé–

néral Éblé, qu'on détruisit les dcux équipagcs

ele pont, consistant en bateaux lransportés sur

voiturcs. Ces équipagcs avaicnt été laissés it

Orscha Jors du départ pour Moscou, et avaicnt

un attclagc de

500

a

600

chcvaux, forts et rc–

posés. Le général Éblé pcnsail qu\1vec quinzc

ele ces batcaux sculement on aurail de quoi

jcte1· un pont qui pourrait étrc bien otile dans

ccrtains momcnls, et n'cxigcrait pour le lrai-