LA BÉRÉZINA. -
NOVEMDKE
1812.
57·1
hommes sous les armes. Le reste de la covalerie
ne comprenait pas 500 cavaliers montés. C'est
tout au plus si en marchan! en masse on pouvait
opposer 56
Oll
57 millc hommcs armés
a
Ku–
tusor. Ce r¡ui manquait
a
ce chifTre pour parfaire
les cent et quclques millc homrnes qu'on avait
en sortant de Moscou, suivajt a la débandadc,
ou était mort en chcmin. Nap.oléon, aprcs les
représentations réitérécs des chefs de l'artilleric,
consentit cnfin
a
sacrificr une partic de ses ca–
nons, et a en proportionncr le nombre
a
la quan–
tité de munilions qu'on avait le moyen de trans–
portcr. Ainsi le maréchal Davoust, qui avait
encore son artillerie presque !out cntierc, et qui
était parvenu
a
arncncr jusqu'a Smolensk
127
bouches
a
fcu pour
11
a
12
mi lle homrnesrestan!
debout et armés dans ses cim¡ divisions, n'avait
pos de munitions pour 50 picces de canon.
JI
se
réduisit
a
2~
bouchcs a fcu convcnablcmcnt ap–
provisionnécs. 11 en fut de memc pour les autres
corps. Les altelagcs furcnt répartis entre les
voiturcs couscrvées.
Aprcsavoirquelquc pcu réorganisé son armée,
Napoléon fit pour la sccondc fois ordonncr au
prince de Schwarzcnbcrg de poursuivre vive–
rnent l'amiral TchitchakofT, afin de le prendrc
en queue avant qu'il put tornbcr sur nous, et aux
marécbaux Oudinot et Victor, d'aborder fran–
chement Witlgenstcin, pour l'éloigner au moins
de la Bérézina, si l'on ne pouvait le rcjeter au
dela de la Dwina. 11 partil cnsuite de Smolensk
le ·!
1,
au matin avec la garde, précédé de la cava–
leric
a
picd sous le général Sébastiani, et suivi
d'unc grande partic des embarras de l'armée.
JI
était décidé que le prince Eugcnc partirait le
lendcmain ·!a, et tacherait de fairc passer devant
lui toute la masse débnndée. Le
16
le maréchal
Davoust, précédé de son artilleric et des pares,
de maniere
a
ne laisscr que pcu de chose aprcs
lui, dcvait quittcr Srnolcnsk
a
son tour, et cnfin
le moréchal Ncy avait ordre d'évacuer cette ville
le '16, opres en ovoir fait sauter les murailles. On
convint de ne pas cmmencr plus loin les fcmmes
qu'on trainait ap1·cssoi depuis Moscou, car vu le
froid , la proximilé de l'cnnemi , les dangc1·s
qu
1
on allait rencontrcr, il
y
avait plus d
1
hunrn–
nité
ii
les rcmcttrc dans les mains des Russcs.
Au dcrnicr momcnt, Napoléon t.cnant
a
sauver de
Smolensk tout ce qu'on pourrait, et surtout a en
détruirc complélcment les défenscs, presc1·ivit
au marécbal Ney de ne partir que lorsquc les
ordt·cs qu'il n\
1
ait m;:.us scraicnt cornplétcmcnt
exécutés, et lui donna pour cela jusqu'au l7,
fatale résolution qui couta la vie
a
quantité de
soldats, les mcillcurs de l'arméc!
Napoléon, comme on vient de le voir,
s'élait
mis en routc le
-JI¡.
novcmbre aumatin. Déjñ on
avait achcminé bien des hornmcs inutiles. bien
des voitures portan! des réfugiés et des moladcs,
et le froid devenu encorc plus vif (le t.hc1·mo–
mCtre Réaumur était dcsccndu
n
21 clcgrés
1 ),
en avait tué un grand nombre. La routc était
courerte de débris hurnains qui
pcr~aient
sous
la neigc. Napoléon avcc la gardc alla couchcr a
Koritnia, moitié chcmin de Smolcnsk
n
Krasnoé.
La conlrée qu'on lraversait était complétcmcnt
dénuée de rcssourccs, et on ne pul ''ivrc que de
ce qu'on ovoit emporté de Smolensk , ou de
viaudc de chcval
~rilléc
au feudes bivocs.
Le général Sébastiani précédant avcc la cava–
leric i1 picd la colonnc de la gardc, était entré ce
jour-13
clrms
Krasnoé,
y
avait trouvé l'enncmi,
et avait élé obligé de s'cnfcrmer dans une églisc
pour s'y défcnd1·c, en attcndant qu'on vint a son
secours. Le lcudcmain
-15,
en cffct, Nopolion
parlit deKoritnia le matin,orriva dons la soiréc
h
Krasnoé, clégngca le général Sébastiani, et ap–
prit avec une péniblc surprisc que Kutusof, ne
se bornant plus ccttc fois
a
nous cóloyc1" s'ap–
prochait de Krasnoé avcc toutes ses forces, soit
pom• nous hnrrer
le
chemin, soit pour couper
nu
moins une partic de
not.rclonguc colonne.
C'était le cas de rcgrcttcr vivcmcnt ccttc marche
succcssivc, qui lnissnit
la
queuc
de
l'nrméc
a
trois journées de sa tele, et offrait
i1
l'cnncmi le
moycn prcsque assuré d'en coupcr tcllc partie
qu'il voudrait. Quoiqu'on ne fút que 56 ou
57 mille hommcs ayant conservé un fusil
i1
l'épaule, ce$SUl'Vivanls de la discipline détruitc
valaicnt bien, rnalgré lcur épuiscmcnt, dcux ou
trois ennemis chacun. Kulusof d'aillcurs n'aynnl
gucrc que
oO
millc comhaltants sans les Co–
saqucs, on se scrnit aisémcnl
foit
jour, si l'on
avait
marché en
une scule massc; et commc
le
molif ordinairc de s'étcndrc pour virrc avait
peu de valcur dans un pays cnlicrcmcnt dévastú,
oú les premiers venus absorbnicnt le pcu qui
rcstait , et oU les aut.rcs se nourrissnient de
viande de chcval, on aurail bien pu mnrcher
lous ensemble, ehcminer en
outrc
sur la rire
droitc du Dniéper, qui n'étant pas solidcmcnt
1
C'est
l'as~erlion
tle11 Larrey, qui, porlant un thermo·
mNresuspenc1u a
Ja
bouto1111iérc de sonhabil
,c.stleseul
té–
moin oculaire dont lrs assertions, relati,·emcnt
li la
tcm¡11h'a–
lure qu·on cut !lessuye1·penJant celle mémorablc rc1rai1c,
soicntdi¡;ocs Jeconfianer.