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LA

BÉfiÉZINA. -

NOl'EllDRE

1812.

5üV

instan!. Mais lorsqucaprcs avoircrrédc droiteet

de gauehe, dans celle 1•illc ruiné.e et e11 confu -

sion, les soldats n'curent rencontré nulle parl

ces lieux de distribution tanl promis, ils rcvin–

rcnt, pousscrcnl des cris de révolte, se jctcrcnl

sur les magasins, en enfonccrent les portes, et

les mirent au pillagc. - On pille les magasins

!

fut le cri général, cri d'épouvantcet dedésespoit•

!

Toul le monde voulul y courir, pour enarrachcr

quclqucs débris donl il pul vivre. On finit néan–

m.oios par remclLrc un pcu d'ordre, et par sau–

vcr quelquc cltosc pour les corps du prince Eu–

gcne et du maréchal Ncy, qui arrivaienl en se

ballant loujours, et en eouvrant la ville contrc

]es troupes enncmies. lis

rC~Ul'Cnl

a

Jeur tour

des aliments, et un peu de repos non pas

3

cou–

verl, mais dans les rucs,

a

!'abrí non du froid

mais del'ennemi. Pourtant il n'était plus possible

de se faire illusion : l'armée, qui avait cru trou–

ver

a

Smolensk des subsistances, des vcte1nents,

des toits, des renforts et des murailles, et qui

n'y trouvait rien de lout cela, si ce n'est des vi–

vres, rcconnut bicu vitequ'il faudrait rcparli1· le

lendemain peul-clre, el r·ecommcncer ces courscs

interminables, sans abri le soir pou1· dormir,

sans pain pour se nourrir, en livrant des combals

incessants, avcc des forces épuisées, presquc sans

armes, et avee la cruellc ccrtilude, si l'on reccvait

une blcssnrc , d'élre la proie des loups et des

vaulours. Cettc pcrspcclivc jeta l'armée cntifre

dans un vérilablc désespoir; elle .se vit dans un

abime, el cependant elle ne savait pus tout

!

lln abordant Smolensk, Napoléon venail de

reccvoir des nouvellcs bien plus sinistrcs encore

que celles qui l'avaienl accueilli

a

Dorogobouge.

D'abord le général Jlaraguey·d'Hillie1·s s'élant

avancé, d'aprcs les ordres du quartier général,

avcc sa division sur la roule de Jclnia, en se

foj.

saut préeédcr d'une avant-garde sous le général

Augcrcau,étaitto111béaumilicu del'armée russe,

et soil qu'il eút manqué de vigilance, soit (ce qui

cst beaucoup plus vraisemblable) que la situation

ne permit pas de s'cn tircr autremenl, avait

pcrdu la brigadc Augcrcau, forte de

2

mil le

hommes.

11

était revenu

a

Smolensk avcc le reste

de sa divisiou. Napoléon, queses faules auraicnt

dú rcndre indulgent pour celles d'aulrui , or–

donna au général Baraguey-d'Hilliers par un

o

ni

re du jour de retourncr en Francc, pour

y

soumcttre sa conduile au jugement d'une com–

mission militaire. Tandisque cette malheureuse

division, déshonoréc par eel ordrc du jour bien

plus que par la conduile qu'on lui reproehait,

rentrait i1Smoleusk, Napoléou apprenait que

l'armée de Tchilchako[ avait foit de nouveaux

progrcs, qu'elle menar,ait Minsk, les immenses

magasins que nous )

7

avions

1

et surtout la ligne

de rctraite de l'armée; que le prince de Schwar–

zenbcrg, partagé entre le désir de marchcr 3 la

suite de Tchilchako[ et la crainte de laisser

Sacken sur ses dcrrieres, pcrdait le lcmps en

pcrplexités inutilcs, et n'avanr,ait pas; que le

due de l!ellune (maréchal Víctor) avait trouvé

sur l'Oula le

corps séparé des llavarois, réduit

par eelle séparalion

1t

·IO mi lle hommes, qu'il

n'en avait lui-meme que 25 millc, ce qui fai–

sait 55 en lout, que les deux maréchaux Victor

el

Ou<linot,

désormais réunis, s'cxngérant la

force de Wittgenstein , craig11ai1t de livrer une

aclion décisivc, s'cntendant pcu, se bornant

a

des marches el contrc-marchcs entre Lepe! el

Sieuno, n'avaicnl pas, comrne il l'aurait fallu,

rejeté par une JH'omple vicloire Wittgenstein el

Stcinghcl au dela de la Dwiua. TchilchakoIT et

Wittgcnslein

s'avan~aient

doned'un pas rapide,

n'étaient plus qu'a lrenle licues l'un de l'aulre,

ce qui faisait quinze licues

a

franchir pour cha–

cun, n'élaicnt séparés que par l'armée des maré–

chaux Oudinot et Victor qu'ils pouvaient ballre

ouéviter, et réunis enfin sur

la

haute Bérézina,

a

ia hauteur de Borisow, allaient pcut-ctre nous

opposcr

80

mille hommes 1 Et alors que fcrions–

nous avec des débris, entre Kutusof en queue,

TchitchakoIT et Wittgenstein en tele? Cellc

marche qui en sortant de Moscou avail com–

mcncé par une manrouvre olfensive, qui s'étail

ensuite cbangéc en relraite, d'abord ficre, puis

triste, tourmentéc, douloureuse, pouvait <lonc

aboutir

it

un désast1·e sans égal, peul-ctre

it

une

captivité du chef et des soldats, les uns et les

aulrcs nrnitrcs du monde six mois nuparnvaot

!

Pou1·tant il était urgen! de prendrc un parti.

Hester i1 Smolensk étaít impossible. C'est tout

au plus si l'on pouvail y subsistcr sept ou huil

jours avcc ce qu'on avait de grains el <le viandc.

On étoit done forcé d'allcr vivre aillcurs, au mi–

licu de la Pologne, et surlouL au dela de cetle

llérézina, que clcux armées russcs

mcna~aicnt

de fcrmc1·sur nos pas.

11

fallait marcher l'épée

haute sur elles, pousser d'une parl Oudinot el

Victor sur Wittgenstein, se jeler en passant s111·

Tchitchakolf, l'aeeablcr, et ensuite venir s'établir

entre Minsk et Wilna, appuyés sur le Niémen.

Maispourcela ilne fallait pas pcrdre un moment,

il ne follait pus demcurer un jour de plus

á

Smo·

lcnsk.