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LA Btin:z1NA. -

OCTOURf,

1812.

done

a

mat'cher daos l'ordre adoplé, ayanl sur

nos dcrriercs un forl délachemcnl de eavalcrie

el d'arlillcric pourvu de bons chcvaux, el se tc–

nanl lui-mcme Sut' nolt•e Oane avee le gros de

l'armécrussc.

Aprcs avoir couehé entre Borodino et Ghjat, le

maréehal Davousl, toujours ehargé de l'arrierc–

g<1rdc, alla eouehcr

¡,

Ghjat mcmc. Chaquc jour

rcndait la t•clraitc plus diíllcile, car chaquc jour

le froid dcvcnail plus intense el l'cnncmi plus

prcssant. De la eavaleric du général Grouchy il

ne rcstail rien. L'infanlcrieétail done con<lamnée

a

faire seulc le service de l'arricre-garde, et

a

1·emplir

a

la fois le róle de toutcs les armes.

11

lui fallail souvent lenir tele

a

l'arlillcric attcléc

de l'cunemi, la nót1·c trainée par des chcvaux

épuisés, élaut dcvcnuc prcsquc incapahle de se

mouvoir. Les vicux fantassins du rnnréchal Da·

vousl suíllsoicnl ¡, !out; tantót ils arrctaicnt la

cavalcric <le l'enncmi avcc lcurs balonnctlcs,

tantól ils fondaicnl sur son artillcric, et l'cnlc–

vaicnl, quoiquc réduils

a

la laisser cnsuilcsur la

roulc, mais conlcnts de s'cn Ctrc débarrassés

pour quclques hcurcs. Pcu

a

pcu il fallait nous

séparcr rle la nólrn. Achoisit' cnlrc les bouchcs

a

fcu et les cnissons de munitions,

il

cUt micux

valu abandon11c1· les prcmiCrcs, puisqu'on ;,,ait

rlcux ou trois fois plus de canons r¡u'ou ne pour–

rail bicnlól en traincr el en scrl'i1" landis que

les rnuuilions dcvaicul clrc toujours utilcs. Muis

les bouehcs

a

fcu élaicnt des trophécs

¡,

laisscr

dans les mains de l'cnncmi. el l'orgucil, qui nous

rwait

i·ctcnus

si longtcmps

il

Moscou, avait foil

donncr l'ordrc de gardcr les piéccs de canon el de

détruire les eaissons, lorsquc les altclagcs vicn–

clraicnt ;\ manqucr. Le maréchal Davousl avait ré–

sistéd'abord 3cclordrc, mais il avaitfallu obéir,cL

plusicurs fois dans la jou1·néc de sinistrcs cxplo–

sions apprcnaicnl

a

J'arrnéc sa dét1·csoc crois-

sante.

Une aulrc cause de

chagr·in

inccssammcnt re–

nouvclée, e'élaiL l'abandon eles blcssés. A mesure

que l'inquiéLudc augmcnLait, J'égo'ismc augmcn–

lait aussi, et les misérablcs conclucteurs ele voi–

tures auxqucls on avaiL confié les blcssés, profi–

tant de la nuit, les jetaicnt sur les 1·ouLcs, oli

l'arriCrc-gardc les trouvail morts ou cxpirants.

Ccttc vuc cxospérait les solclats rcstés ficli:lcs

a

leurs drapcaux. On sévissait cont1·c les coupa–

blcs quantl on Je pouvait; mais les découvrir

dans Ja confusion qui

commcn~ait

;\ naitrc étail

diílleile. Napoléon avait ordonné

a

Malo-Jarosla–

wetz de numérotcr

Je~

voilurcs auxqucllcs les

blcssés scraicnl coufiés; mais la survcillance

qu'une lclle mesure supposail était. dcvcnuc im–

possiblc aprcs dcux marches: Le spcclacle des

blcssés abandonnés se rcproduisail

a

cbaque pas.

Ce spcctacle n'ébranlait pas les vieux soldats du

maréchal Davoust, habitués

~1

la rigourcusc dis–

cipline du

1cr

corps; mais tout ce qui

11

1

avait pas

rc~u

l'inspiration du mCmc esprit faisai.t la ré–

Oexion que le dévoucmcnt élait une dupcric, el

quittail Je raug. La qucuc rlc l'armée, composéc

de cavalicrs clémontés, de soldats fatigués, dé–

couragés ou maladcs, tous marchant snns armes,

s'allong~ait

sans ccssc. Les alliés illyricns, hol–

Janclais, hauséatcs, cspagnols, appartcnant au

1"

corps, élaicnt allés s'y souslrairc

a

toutc cs–

pccc de dcvoi1·s, et parmi les

Fran~ais,

les jcuncs

soldats, les réfractaircs arrachés réccmmcnl

a

lcur vic errante, nvaicnt suivi cct cxcmplc. On

s'éloignait eles rangs sous prétcxlc d'allcr chcr–

chcr des vivrcs, onjclait son íusil, puis on vcnait

se cachcr dans la foulc sans nom qui vivait

comme clic pouvaiL

a

Ja suite deJ'arméc. Les sol–

daLsde l'arricrc·gardc qui dcvaicnl attcndrc ccttc

mullitudc aux passagrs diíllcilcs cL aux hivacs

du soir, la voyaicnt grossir avcc clwgrin, avcc

colérc, car clic aggravait Jcur embarras, el était

nn rcfugc pour tout ce qui ne voulait pas se dé–

voucr au salut commun. De 28 millc fantassins

qu'il cornprcnait cncoi·c en sortant deMoscou, le

1"

corps en conscrvait toul au plus 20 millc apres

onzc jours de marche. Sévir contrc ccux qui

abandonnaicnt les rangs, déja lrés-diíllcile

a

la

sortic de Moscou, allait devenir i111possiblc. Lé

maréehal Davoust le fil proposer

a

Napoléo11,

qui, ne voulant pas voir de ses ycux eles maux

clont la réalité l'cúl confondu et condamné, ai–

mait micux S'cn prcndrc au caracLCrc du 1uaré–

chal, trap minulicux, trap cxigcant suivant lui,

et ;\ chacunc de sesdemandes répondait par l'or–

drc d'avanccr plus vite.

On allo ainsi couchcr

a

Ghjat le

51

octobrc au

soir. En approchant de cctlc villc, le maréchal

avniL voulu fairc un grand

founagc

tl

droitc et

fi

gauchc de la roulc, avcc des colonncs d'infantc–

ric légérc, fauleele cavalcric, et chcmincr lcnlc–

mcnt pour donncr

¡,

ces colonncs le lc111ps de

fouillcr les villagcs el de rceucillir des vivrcs,

tanl pour le

1"

corps que pout' la foulc a!famée

qui le suivait. Mais la cavalcric rnncmic se mon–

trasi nomhrcusc sur nos flanes el nos dcrriCrcs,

qu'on ne pul ni s'éloigncr ni ralcnlir In marche,

el qu'il fallut rcnonccr

¡,

ccltc sagc mesure, et

vi\'l'C

a

l';.wcnlurc.