MOSCOU. -
AOUT
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trogradc de plus, ce débouché, par lequcl Ja sc–
conde colonne de Barclay devait rejoindrc Ja
grande routc de Moscou, allait tombcr aux mains
des
Fran~ais.
Le sol favorisait les Russcs, car ils
avaient pris position dcrriere un ruisseau fan–
geux, et sur une cote longuc et élcvéc, couvcrtc
de distanceen dislance par des bouquctsde bois
et d'épaisses broussailles. La route franchissait
le ruisseau sur un pont qu'ils détruisircnt, puis
traversait la coteelle-memc par unecoupurc pra–
tiquée entre dcux monlicules boisés. Le général
Barclay de Tolly, appclé par le général-major
Touczkoff III, était accouru, et
a
l'aspect du
danger, il s'était emprcssé d'attircr en cctendroit
la tete de la secondc colonnc, et avait mandé
a
cclle-ci d'arrivcr au plus vite. Ccue tete de co–
lonne consistait en huit picccs d'artillcric, plu–
sieurs régimcnts de grenadicrs et quelque cava–
leric.
JI
pla~a
les chasscurs au bord du ruisscau
et dans les hroussaillcs, lesgrenadiers
a
droilc et
a
gauchc de la coupure, disposa un fort délache–
mcnt en travcrs, et dépccha de nombreux offi–
cicrs pour demandcr du sccours
a
toutes les
troupes qui étaicnt
a
portéc.
Le maréchal Ney, parvenu dans l'aprcs-midi
dcvant cclte troisieme position, résolut de l'c,n–
levcr. 11 y cmploya les divisions d'infanlerie
Razout et Lcdru, cssaya de gravir la cote
COU·
ronnée d'artillcrie, mais ne put y réussir. La
chosc effcctivcmcnt étail trcs-difficile. Pour cm–
portcr la posilion, il fallail forccr la roule qui
desccndait un pcu
a
droite dans une cspccc de
marécagc, qui passail cusuitc le ruisscau sur le
ponl que les Russcs avaicnt détruit, et cnfin
s'élevait au milicu de broussaillcs rernplics de
tiraillcurs
a
lravers la.cote garnie de troupes et
d'artillcric. Ncy refoula bien les avant-postcs
russcs jusqu'au dela du ruisseau; rnais pour opé–
rcr le passagc de ce ruisscau dont le pont n'cxis–
tait plus, il avait besoin de rcnforls considéra–
blcs. 11 prit done le partí de fairc rélablir en
toutc hnle le petit pont, et en attcndant d'cn–
voycr dcmander des sccours
1t
Napoléon. Une
forte canonnade rcruplit l'intcrvalle enlre ce
combat du maliu et cclui qui se préparait pour
la fin du jour.
Sur ces cntrcfaitcs, Mural, apres avoir battu
l'estradc dans diversos dircctions, était survcnu
avcc c¡uclqucs régimcnts de cavalerie sur la
roule de Moscou, et il ctait prcL
a
joindrc Ncy.
Junot, chargé, par suite de sa position des jours
précédents, de passcr le Dniépcr au-dessus de
Smolensk, l'avaiL franchi
a
Prouditchcwo, et se
trouvait sur le llanc des Russcs. Des cinq divi–
sions du maréchal Davoust, dcux étaient en
marche sur Ja route de Moscou,'et une allait 'ar–
rivcr a tcmps, c'était ccllc du général Gudin.
Elle arriva cffectivcment vcrs cinq heurcs de
l'aprcs-midi au petit pont qui venait d'etre réla–
bli, et sur-lc-champ elle fit ses dispositions d'at–
taquc. Mais dans l'intervalle un temps précicux
avait élé perdu, et les Russes s'étaient singulic–
rcmcnt renforcés. Barclay de Tolly avait
re~u
prcsquo toulc sa secondc colonne, sauf le corps
de Bagowoulh, retardé par le combat de Gédéo–
nowo. Les 5• et 4• corps, ccux de Touezkoff et
rl'Oslcrruann, ayant atteint Louhino, avaient élé
aussitót portésen lignc, et disposés en arriere,
a
droite et agauche de la route. La cavalcrie avait
été placée au loin sur la gauchc, vis-a-vis le point
de Prouditchcwo, ou Junot venait de passcr le
Dniépcr. La position élait done devcnue des plus
difficilcs a cmportcr, car elle était défenduc par
pres de 40 mille hornmcs et par une artillcric
formidable. Ney n'avait de vraimcnt disponibles
que ses deux divisions d'infanterie, Razout et
Ledru, réduites
i1
!
2 mi lle hommes par les com–
batsde la vcille, et la division Gudin, qui, aprcs
la prisc de Sruolensk, ne dcvait pas eomptcr plus
de 8 millc ha'ionnctlcs. Les trois mille cavaliers
deMural étaient au loin sur lach-oile, cherchant
il tra\'Crscr lesmarécngcs qui s'étcndaient le long
du Dniépcr pour débouchcr sur la gauchc des
Russes, et les
10
mille Westphaliens de Junot
ét,,icnt lellcmcnt cmba1Tassés dans ces maré–
cages, qu'il n'était pas sur qu'on put les faire
concourir a l'aclion principalc.
Ces difficultés n'arrétcrcnt ni lemaréchal Ncy,
ni le général Gudin. Ce dcrnicr se mit hardiment
a
la tele de sodivision pour enlcver
a
tout prix
l'cspccc de coupc-gorge qui se trouvait au dela
du pelit pont. 11 fallait en efTct, commc nous vc–
nons de le dirc, s'enfonecr daos Je marécagc,
franchir Je pont sous le feudes broussaillcs 1·em–
plics de tiraillcurs, gravir ensuitc la routc
a
tra–
vcrs une gorge couronnéc des dcux colés d'artil–
lcrie, puis enfin déboucher sur un platcau ou
les Russes élaient rangés en masscs profondes.
Le général Gudin forma sa division en colonncs
d'attaque, Landis que le marécha\ Ney avec la
division Ledru se préparait
11
l'appuycr, que la
division Razout occupait }'cnncmi vers lagauche,
et qu'a droitc Murat galopant avcc sa cavale1·ie
chcrchait un passagc
a
travers les marécagcs.
Le signa! donné, Gudin lance ses colonncs
d'infonteric, qui défilcnt sur Je pont aux cris de