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MOSCOU. -

AODT

18!2.

263

Les ravagcs du fcu élaicnt considérablcs, les

principaux nrngasins détruits, et les perles, sur–

tout endenrécs coloninlcs, immcnscs. Les Jlusscs

au surplus étaient les \'l'ais aulcurs de ce dom–

magc; mais ce qui de lcur part dimiuuait le mé–

ritc du sacrifice, c'cst que c'était l'arméc et ses

chefs qui dé1•astaic11t des propriétés appartcnant

a

de pauvrcs marchands, et satisfaisaient ainsi

leur rage aux dépens du bien d'autrui. Les ha–

bilanls avaienl fui pour la pluparl, et ccux qui

étaicnt reslés, faule de lempsou de moyens pour

s'enfuir, se trouvaicnt réunis dans la principalc

église de Smolensk, ''icille basiliquc byzantine

fort en renom parmi les Jlusscs. lis étaicnt la,

fcmmes, vieillards et cnfanls, :saisis de lerrcur,

crnbrassant les aulels et versant des !armes.

Heureusement nos projectiles avaient ménagé

le vénérablc édifice, et nous avaicnt épargné le

chagrin decauscr d'inutilcs profanations. On 1·as–

sura ces infortunés, et on cssaya de les ramcncr

dans celles de leurs demeurcs qui n'avaienl pas

élé consumées par !'incendie. Les rues offraicnt

un spectacle hidcux , c'élait cclui des morls et

des Llessés russes couvrant la tcrrc. L'exccllcnt

docleur Larrey les fit ramasscr prcsquc en mémc

lcmps que les blcssés

fran~ais,

pcrsislantdaos sa

bonlé naturelle et dans sa noble poliliquc de

soigner les blessés de l'cnncmi, pour qu'a son

tour l'cnnemi soignat les nólres. Mais la furcur

nationale,exeilée au plus hautpoint conlrc nous,

devait rcndrc son calcul

a

pcu pres stérilc.

Nolrc arméc, malgré l'cnivremcnt du combat

et du succcs, éprouva en ent1·ant dans Smolcnsk

une pénible émotion. Autrefois, dans nos lon–

gues coursesvielorieuscs,lorsquenous pénélrions

dans des villes eonquiscs, aprcs un premicr mo–

mcnt de tcrrcur, les habitants, rassurés par Ja

huer :rnx

Fran~ais

une pcl'lc de 20 millc hommcs, et aux

llusscs une deG millc sculcmcnl, Jamais, il fout lcdire, on

n'a déílguré les íaits 3 ccpoinl. Le témoignage du llocteur

Lnrrcy

1

tCmoin\•éridic¡ucclgénCralcmcntbicni11for111é,évaluc

la perle des

Fran~ais

a

cnviron 1,200 morts, el 3 prés de

6 millc blessés. Les

témoig1rnges

de l'administra1iondonnc11l

un chiffl·c moins élC\'é, Je crois,

aprCs

:l\'oir

comp:H'C

les

divcrsdocuments, <1ue lenomlwedcs morts fulde notrccólé

plusconsirléraLlc(¡uc11cleditlcdoctcurLm·1·cy,cL cclui dcs

blessésmoind1·e. Jecrois qu'onsc rapproche!'adcla\'érité lc

plus possible en portautnott·epcrtc

a

7 mille hommcs hors

dccombat, morts et Llessés. Commcnt <l'ailleurs

y

auruit-il

eu20millchommes atteints par lcfcu sur•ii millc f¡ui atta–

quCrent Smolensk, cariln'y en eul guCredavantagc d'cn¡;a–

gés,quoiqu'enaildit.\l.dcCoutourlin,lcquel évaluell72millc

homrucs

le

nombre de nos combattanls qui pl'irent parl

ti

l'action. ll ycut tout au plus 15millc hommcs en¡;agés du

cóté du maréchal Ney,

U-

ou

ns

mille du cóté du mai·éclrnl

Davoust, ctunpcu moinsdu cólé du pl'incc Poniatowski.

Le

nombre tle20millc liommcs froppés dansnos ransscstdonc

hienveillancc ordinairc du soldat

fran~ais,

rcvc-

1rnicnt dans lcurs dcmcurcs, qu'ils n'nvnicat pas

songé

a

<létruirc, et dont ils se hataicnt de nous

fairc partager lesrcssourccs.

JI

n'y avaitd'incendic

que ccux que nos obus avaienl involontairemcot

allumés.Dansceltedernicrecampagnc,surloutdc–

puisque lafronticrc moseovileétail franchic,nous

trouríons parlout la soliludeet les llammcs, et si

quclquesrarcshauilanlsrcstaicnt dans nos mains,

la lerreur et la hainc régnaicnt sur lcursvisagcs.

Les juifs, si nombrcux en Polognc, si scrviables

par avidité, si emprcssés

a

nousoffrir une hospi–

lalilédég-0ulanle mais utilc, les juifseux-memes

manquaient, car il o'cn exislait point au dela de

la fronticrc polonaisc. En voyant ces flammes,

ectle solitude, ceseadavres gisant dans les rues,

nos soldats commenccrcnt

a

comprendre que ce

n'était point llt une deces guerrcs commc ils en

avaient tant vu, et dans lesquellcs avee des acles

b1·illants et de l'humanilé on désarmait l'ennemi.

lis seotirent que c'élail une lutlc plus grave.

Mais le goüt de l'cxtraordioaire les dominait et

les cnlrainait:lavue de Napoléon les lransportait

loujou1·s, et ils eroyaient marcher

a

une expédi–

tion merveilleuse qui surpasscrait loulcs cclles

de l'aoliquité.

Napoléon parcourut

a

cheral les

fa~hourgs

et

la villc, puis vint se placer dans une des tours

qui f!anquaient l'enceintedu cótédu Dnicper, et

de !aquel leon pouvait discerner ce qui se passait

au dela du fteuve.

11

vit les Russes oeeupant

l'autre ri1·e, et tcnant cncorc la ville nou1•elle,

mais s'apprclant évidemment a l'évacucr, et ne

songeant

a

la défcndrc que pendan! le lcmps

nécessairc

a

l'évacuation. Assurer le passagc du

Dniépcr était done la princi¡rnle opéralion de

cctte journée. Les llusscs avaíenl détruit le pont

uncexagéralion rhliculc,caril aurait folluquc Ja moitiédcs

nuac1uantscU1 succombé. Quant aux. perles des Russes, les

lémoins lcs moins fovo1·ablementdisposéscon\'iennentf¡u'ily

nvait de,·ant Smolcnsk plusicurs l\usses rcn\•ersés pour un

}'ran~ais.

Ledoclct1t•Lal'l'ey notammcnt,1¡uin'apoinl cherché

a

adoucirle tahlcaudc lacampagnc de

1812,

l'oíllrme de la

maniere Ja plus posilive.

On

pourrait done attrilnuw

a\'CC

plusllernisouaux

ílusscs qu'auxFran~ais

lechifTrcdc20mille

mo1·ts oublcssés. Ccqu'onpcutdireclc plus nniscmblablccu

compat·ant toutcs les relations, c'cstquclcs l\usscs perdircnt

de

12

a

15mille

hommcs. Nous croyonsecltc évatuation plutót

au-dcssous qu'nu-dessus de la \'él'ité,s111"tout 11unndonsonge

an chiffregénéralementattribuéa l'armée russeaprCs lccom–

hat

de Smolcnsk. Uureste, nous ne donnons, suiv:111t notre

usage, ces é\•aluations c¡ue commc trCs-ap¡H·oximalives.

On

fait

pe1·dre son séricux ti rl1istoirelorsqu'onse montrc trop

affirmatifdansdes 1¡ucslions de.ccttenaturc. C'este11restant

modestc

danssa

prétenlion dcdécouvrirlavét'ité c1ue l'his–

toirepcutmé1·iter confiancclors11u'clledcvic11ttoutUfoitaffi1•–

mativc.