MOSCOU• ..,..
AOUT
1812.
2;:;u
40 mille hommcs derrierc la petitc rivierc de la
Kolodnia, affiucnt du Dniéper. Le général RaéJTs–
koi, qui avcc le 4' corps avait gardé Smolcnsk
pcndant la journéc du
11í
.et la matinée du 16,
dut l'évacucr et y etrc remplacé par les troupes
ele Barclay deTolly. Celui-ci confia
la
défense de
Smolcnsk au 6• corps, commandé par !'un des
officiers les plus solides de l'arméc russe, le gé–
néral DoctoroJT. 11 luí adjoignir la division Ko–
nownitsyn, lesdébris de ladivision NévéroJTskoi,
cclle qui avait combattu
a
Krasnoé, et rangea le
reste de son armée de l'autrc colé du Dniéper,
dans la nouvelle ville, et sur les cotcaux au–
dessus. Les
Fran~ais
au nombre de HO mille
hommcs
1
occupant en amphithédtre les hauteurs
de la rive gauche du Dniéper, les Russes, occu–
pant au nombre de 150 mille eclles de la rive
droite, présentaient les uns pour les autrcs le
spectacle le plus saisissant et le plus extraordi–
nairc
!
Tout ce que Napoléon, avee son rcgard si
exercé, parvint
ii
discerner dans ce qui se passait
devant lui, c'cst que l'armée russe accourait tout
enticrepour défendreune villequi luí tenait fort
il
creur.
Les Russes s'arrelant cofia, Napoléon ne pou–
vait ni reculer, ni talonner dcvaut eux, et 'Jcur
laisscr l'avantage de luí avoir disputé un point
te! que Smolensk. 11 aurait pu sans doule rc–
monter le Dniépcr, pcut-elre le traverser
it
gué
au-dessus de Smolensk, et cxécuter un pcu plus
haut sa grande manreuvre. Mais d'une part il'
n'avait pas cu le temp.sde reconnailrc le llcuve
et
de s'assurcr si le passage en était facile; de
l'autre,
il
devait hésiter
a
tenter en présence de
l'enncmi une tclle opération, surtout en laissant
aux Russes Je pont de Smolensk, par Jeque! ils
étaient mailres de débouchcr
a
tout inslant, et de
ti.sao :ivec raison de Barclay dcTolly, trop déprécié 1lans
J'31·mécrussC, 111·étc11dqucBarclaydcTollyncddendit Smo–
lenskqucpour lrompe1· Napoléon, et afindc nepas trop lui
l'é\•élcrlc projcttlcrctraileindéfinie, donli\ sescraitinfoil–
lihlemcnt a11er~u si on avail cédésans comhatunpointlclque
Smolcnsk. C'est
Ja
une de ces hypolhCses ingénicuscs au
moycnJcsquellcs onprCtcsouvcntnuxhommcsplusdccalcul
1¡u'ils n'cu ont mis dans lem· conduitc. Uu parcil calcul ne
\'a\ail pus lcsacrifice det2
j),
15mille hommcs, laperted'un
tcmps¡ll·écieux, et des mouvemcnts nutourdeSmolcuskqui
cxposnient l'armóe russc
a
pc1·drc sa ligne de rctraitc. Les
cheís d'anuéc comme les chefs
d'~tal
éprou\'ent quelqucfois
dessentimcnls dont ils ne sontpas mailres, ou s'ils nelcs
ép1·ou\'entpas
1
sout ohligés,d'y céder, et cesscntiments umC–
nc11t dnns leur eonduilc dcs eontrndic1ions sur lcsqucllcs,
faute deles hicncomprc11d1·e, oufo.itplus tard dcseonuneu–
taires
O.
perle dcvue. C'cst un semblable sentimcntaur1ucl
cédaieiBarc\aydeTolly,cnrlivrerSmolcnsksanscomhatetll
ótéunehonteíl lac¡uellepe!'soune,dans \!élatdel'armóe russc,
luí couper a lui-memc sa ligne de communiea–
tion. Enlever Smolensk sous leurs yeux, par un
acte de vigueur, était done la seule opération
conforme asa situation, conforme a son carae–
tere, et capable de lui conservcr l'asccndant des
armes, dont il avait plus que jamois besoin.
Napoléon rangca immédialement ses troupes
en ligne. Agauche contre le Dniépcr, vis-a-vis
du faubourg de Krasnoé, il pla9a les trois <livi–
sionsde Ney; aucentre, vis-a-vis des faubourgs
de nlicislaw et de Roslawl, les cinq divisions de
Davoust;
a
droite, dcvant les Taubourgs de Ni–
kolskoié et de Raezcnska, les Polonais de Ponia–
towski,'impaticots d'atlaquer la ville tant dispu–
téc aux Russes par leursaieux ;
11
l'extreme droite
enfin, sur un plaleau le long du Dniépcr, la
masse de la cavalerie franeaise. En arriere et au
centre de ce vaste
demi-c~rcle,
il
établit la gorde
impériale, et sur les hautcurs, dans les empla–
cements les mieux choisis, sa formidable artille–
rie, qui allait eouvrir de fcux plongcanls la mal–
heureuse cité russe!
Le corps du prince Eugene était encore a trois
ou quatre licues en arricrc, aKorytnia, le long
du Dniéper. Junot, chargé de venir avec les
Westphaliensappuyer les Polonais,s'élait trompé
de roulc. Mais les40 mille hommesauxquels s'élc–
vaient ces deuxdélachemeots de l'armée n'étaient
pas nécessaircs pour accablcr l'ennemi. Toute
la seconde moitié de la journéc du 16 fut ainsi
employéc par les
Frao~ais
et les .Russcs a s'as–
scoil' dans leurs positions, suns engugcment sé–
rieux de part ni d'autre, sauf, du coté des
Fran9ais, un fcu d'artilleric conlinuel qui cau–
sait daos la ville de grands ravages, et y tuait
bcaucoup d'hommes,
a
causede l'entassemcnt des
troupes.
Le lendemain rnatin 17, Napoléon, montant
it
n'auraitvoulu s'exposer. On comballit cn cellcoccasion snns
se renclrc eomptc <lu résultat <1u'on allaitohtenir, et, a¡wCs
tout, sc hienbat11·e, sc batlJ'e \·igourcusemcn\
1
ncfoit jamais
de tort,ct épuisc toujours uncparlicdesforccs physi1¡uc:sct
morales dc l'cnnemi.
Dcson eótó, M.<lcClrnmhraia Jll'Ólendu c¡uec'esl pour sau–
YCI' quelques magasins que l'onllisputa Smolcmk. Onnc fait
pas llter 12 mille hommcs, et on nccourtpnsla chance de
·dcuxjourspci•d11s<lansuneret1·aite, poursauvei·dcs 11rngasins.
C'est
1
nous lerépétons
1
lesentimcnl óprouvó1l. la\'Uc dela
villedeSmolcnsk prCs tletomber dans les main:itles
Fr;:in~ais,
qui dans eette circonstancc tlCtcrmina Uarelay JeTolly. Ce
sont!Utlcscffcts mo1·auxtlontilfout tcni1•eomp1ca la gucrrc,
etqui, plusr1uc lccaleul, détermiucnl cu m<iintcs oecasious
Ja contluitc tlcs hommcs Je guerrc, aussi bicnquccelledcs
hommcs politiques.
1
Lepriuee EugCnc et legénéral Junolélaieul
a
quelques
lieuesenal'l'iCrc
1
sonsquoi les
Fl'an~ois
eussent
été
17timille
présenfssouslesarmes.