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LIVRE QUARANTE-QUATRIÉME.

cl1eval de tres-bonne hcurc, voulut obscrvcr ce

que faisnit l'cnncrni, et, cntouré do ses lieulc–

nants, parcourut le dcmi-cerclc des haulcurs sur

lesquelles il nvait campé. On voyait elistinctc–

mcnl les 50 millc hommcs ele DoclorofT, ele Ko–

nownitsynet deNévérofTskofprcndrc lcurs posi–

tions dans la villcet les faubourgs, tnndis que le

reste des deux armées russes demcurait immo–

hilc sur les hautcurs. Au nombre des supposi–

tions que Napoléon avait rcgardécs comme ad–

missiblcs, mais eomrnc pcu vrniscmblables, était

ccllc que les J\usscs, mnitrcs de Smolcnsk, pou–

Yanl

á

volonté passcr et rcpasscr le Duiépcr

ii

l'abl'i de forlcs muraillcs, vicndraicnt lui olTrir

la bataillc pour sauvcr une ville

a

lnqucllc ilsat–

tachaicnt un grand prix. 11 yavaiten cfTct

il

cóté

deSmolcnsk, vcrs nolrc droitc, un plalcau bien

situé, cntouréd'un ravin, et sur lcquclNnpoléon

se préparait a déploycr sa cavalcric. 11 n'cut pas

été impossiblc que cct cmplaccmcnt tcnlat les

J\usscs, et mcmc pour les y attircr Napoléon

avait cu lesoinde ne pas l'occupcr cncorc, et de

tcnir sa cavaleric en al'l'icre. Hicn ne lui aurait

plus convcnu assurémcnt qu'unc pareillc fauLc

de la part des l\usscs. Mais venir livrcr une ba–

taille au dcli1 du Dniépcr, en

l'ay~nt

ainsi,a dos

s'ils étaient halLus, cút élédclcur part unc bévuc

tcllc, qu'on ne dcvaiL gucrc l'cspércr. D'aillcurs

ils ne songcaicnL pasen ce momcnt

a

livrcr ba–

taillc, mais a vcrscr elu sang pour Smolcnsk, et

ce sacrificc

a

la passion nationalc était lout ce

qu'on pouvait attcndrc rl'cux.

Napoléon ccpcnelant laissa s'écoulcr dcux ou

trois hcurcs avant de prcndre un parti, afin

d'épuiscr jusqu'a la dcrnicrc les chances el'une

action généralc. Autour de lui, il s'élevait plus

el'unc réllcxion sur la difficulté d'cnlevcr Smo–

lensk d'assaut, contrc trente millc llusscs qui

vcnaicnt de s'y cnfcrmer. 11 les écoutait sans

y

répondrc. Commcaucuncdes idées qu'uncsitua–

tion militairc pouvait fairc naitrc ne manquait

de surgir dans sonesprit, il cntrcvit lapossiLililé

de franchir le Dniépcr au-dcssus de Smolcnsk,

et de débouchcr

n

l'improvistc sur lagauehc des

Jlusscs, ce qui l'au1·ait rcplacé dans la plcinc

cxécution de sa grande manoounc. Mais

tcnlcr sans irnprudcncc une lcllc opéraLion, il

aurail falluqu'ellc put s'opérer avcc uneextreme

célérité. c'csl-1-dirc que le llcuvc fút guéablc,

que ses solelnls pusscnt le franchir en

y

cntrant

jusqu'a Ja poitrinc, et que, passant

le

Dniépcr

commc jadis le Tagliamcnto dcvant l':irchiduc

Charles, ils vinsscnl débordcr i·apidcmcnl la

gauchc des l\usses, et les prendre

a

revers. 11

était en efTct indispensable qu'unc tellc opéra–

tion s'accomplit en quelques inslants, car si l'on

était réduit Ujctet•des pontsen préscnCC de l'en–

DCllli, les l\usscs vicndraicnt infailliblcmcnt se

placer en massc sur le point de pnssagc, et op–

poscr des obstaclcs presque insurmontables

a

l'établisscmcnt des ponts, ou bien ils débouchc–

raicnt par Smolcnsk sur

not.re

ílanc et nos dcr–

riCres, pour coupcr notrc ligne de communica–

tion, ou bien cnfin ils décampcraicnt et nous

échappcraicnt ele nouvcau, en nous laissant,

il

cst vrai, Smolcnsk, mais en nous dérobant en–

core l'occasion de combattrc. Tout dépcndait

done d'unc qucstion : le llcuve étaiL-il guéablc

au-dessus de Srnolensk, et tres-pres de notrc po–

sitionactuellc? Carrcrnonlcr bcnucoup plushaut,

et laisser le débouehé de Smolcnsk ouvcrt sur

nos dcrricres, était une imprudcncc inadmissi–

blc. J\uminanl loulcs ces eonsidérations daos

sonesprit, Napoléon cnvoya un détachemenl de

cavaleric au bord du llcuvc, avcc mission de

ehcrehcr un gué. Le íleuvc en cet endroit pa–

raissait en clTct pcu profond. Soit que la rccon–

naissance fút mal exéeutéc, soit qu'clle ne flit pas

pousséc asscz haut, nulle part on ne trouva de

gué pratieablc. On restait ainsi avcc un eours

d'cau lcnt, nrnis nonguéable, dcvant soi, et avcc

toutc l'arméc de Bagration rangéc en balaillesur

!'nutre rivc. Jctcr des ponts en préscncc d'un

cnncmi ainsi préparé, étnit sinon impraticablc,

du moins trcs-témérairc, et il ne rcstait qu'unc

opération possible, ccllc de s'cmparer de Smo–

lcnsk par un coup ele vigucur 1. Napoléon

nes'arrcla donepoint dcvant quclqucs objections

élevécs auLour de lui , et résolut d'cmporter

Smolcnsk el'assaut. litre vcnu si loin pour tüton–

ncr en préscncc des J\usscs, pour ménagcr les

hommes dans le combat, quand on les ména–

geait si pcu dans la marche, pour hésitcr a en

pcrdrc dix milie dans une journéc qui pourrait

ctrc du plus grand cfTct moral, lorsqucen trois

ou qnatrc jours de i·oulconen pcrdait le doublc

sans foirc autrc chosc que se découragcr, n'était

pas une conduite qui pút lui convenir, ni qui fút

souLcnablc, ecttcgucrrc une foisaelmisc. En eon–

séqucncc, il donna le signa! de l'attaquc. 11 était

dix ouonzc hcurcs elu maLin : les J\usses ünmo–

bilcs ne songcaicnt pas

a

passcr le Dniépcr; il

fallait doneallcr les ehcrchcr dnns Srnolcnsk, au

1

Le coloncl Doulomfo1, dans son

ouvl'l1ge

<léj~

cité, al

aussi irnpa1·tiul que pcutl't!t1·e u11 ouv1·3gecnncmi, écril :m

momcnto1\lcs ¡rnssionsélnicnt dans toulcleur fcrvcur,a 1·c-