262
LIVRE QUARANTE-QUATRIE!IE.
de reprendre l'offensive, en exécutant de vio–
lentes sortics par les poi-tes de Nikolskoié et de
Malakofskia. Le princc Poniatowski, arrivé de–
l'ant la porte de Nikolskoié, cut besoin de toute
la bra\'Oure de ses Polonais pour ramencr les
Russes daos l'intérieur de la l'il!e. 11 en fal!ut
tout autant au maréehal Da1•oust devant la porte
Malakofskia. 11 avait affaire
a
la division Konow–
nitsynet
a
la division du princede Wurtembcrg,
qui !'une et l'autre rcvinrent
1t
la charge avee fu·
reur. On les refoulo ccpcndant, et on les con–
traignit de1·entrer par la porte Malakofskia, de
laquelle elles avaient tenté dedéboucher. Le gé–
néral Sorbier oyant sur ces entrefaitcs ameué la
réserved'artillcriede lagarde,eomposéedepicces
de
12,
on la disposa de maniere
a
prendre soit
1t
gauehe, soit 3droite, les fossés d'enfilade, ce
qui obligea les Russes
a
se renfcrmer définitive–
ment dans l'intérieur de Smolensk. Alors on di–
rigca conlre l'cnceinte tout ce qu'on avait
d'ar–
tillerie. Mais les boulets,
s'enfon~ant
daos le
vieux mur en briques, n'y produisaicnt pas
grand effet. On cut recours
a
un autre moyen,
ce fut de tirer daos la l'ille par-dcssus les murs,
et on y employa plusieurs eentaines de picces de
canon. Cbaque projcctilc ou ravageait des mai–
sons, ou tuait en grand nombre les défenscurs
accumulés dans les rucs et sur les places pu–
bliques.
Aprcs six heures de ce terrible combat, l'ob–
stacle de l'cnccintc, c¡uc nous ne pouvions pas
forcer, que les Russcs n'osaicnt plus francbir,
finit par séparcr les combnttants. 'Le maréchal
Davoust, au centre, prépara tout pour enlever la
ville le lcudcmain matin, aprcs l'avoir accabléc
toute la nuit de projcetiles destructcurs. Napo–
léon lui fil dire qu'il fallait l'cmporter :\ tout
prix, et Jui laissa le choix des moyens. On ne
pouvait effcetiverncnt, sans produire une im–
prcssion morale des plus rachcuscs' surtout
aprcs al'oir perdu autant de monde, acccptcr le
róledegens qui avaicnt été repoussés.
Le maréchal Davoust, d'accord 01•cc le géné–
ral Haxo, qui était ollé sous un feu épouvantable
rcconnaitrc l'cnccinle, résolut de donncr l'assaut
sur un point qui paraissait acccssiblc, et qui
élaitsituévcrs notredroilc, entre l'emplaccmcnt
du I" corps et cclui du princc Ponialowski. 11
y avait lá une ancicnnc breche, <lite breche Si–
gismonde, qui n'avait jamais été réparée, et qui
n'élait fcrméc que par un épaulcmcnt en lcrrc.
Le général lfaxo ayant déclaré la position abor–
dable, le maréchal Davoust destina au géuéral
Frian! l'honncur de mcncr sa division
a
!'assaut
Je lcndcmain matin.
La nuit fut épouvantablc. Les Russcs, faisant
cnfin le sacrificc de cclte cité chérie, qui venait
de lcur coitter tant de sang, se joignircnt
iI
nous
pour la détruire, et y mircnt volontairerncnt le
fcu, que nous n'y avions mis qu'involontaire–
mcnt a1•cc nos obus. Au milicu de l'obscurité,
on vit jaillir tout
1
coup des torrentsde llammes
el de fumée. L'arméc, dcbout sur les hauteurs,
fut l'ivement frappée de ce spectacle cxtraordi–
nairc, semblablc
iI
une éruption du V,\suvc dans
unebelle nuit d'été
1 •
On presseulit
iI
cet aspect
toute la fureur qui allait signalcr la présenle
guerre,et sansenctrc époul'anlé on en fut ému
ccpendant. Nolre nombrcusc artillerie vint njou–
lcr de nouvellcs llammes
iI
cct incendie, afin de
rcndre le séjour de Smolcnsk inhabitable
a
l'en–
ncmi.
En elfet, le sang qui avait coulé en abondancc
parmi les Russcsavait satisfait chez eux
a
l'hon–
neur, au dcvoir,
a
la piété religicuse,
a
tous les
sentimcnts qui les al'oicnt portés
a
combattre en
cctle occasion. Ilarclay de Tolly, aprcs avoir sa–
crifié le ealcul au scntimenl, ramcné cnfin au
calcul, prescrivit
iI
Docloroff,
a
Névérolfskoi, au
prince Eugcne de Wurtemberg, d'évacucr Smo–
lcnsk pcndant la nuit, ce qu'ils fircnt en metlant
partout Je fcu, afin de nous livrer le cadavrecal–
ciné plutót que le corps de cettc grande ville.
A Ja pointe du jour, quclqucs soldats du ma–
réchal Davoust s'élant approchés du rctranche–
mcnt en lcrrc qu'ils dcvaient enlcl'cr, et ne le
trouvant pas défcndu, le gravircnt, cnlendirent
l'acccnt slavc de l'nut1·c cóté, se crurent d'abord
tombés au milicu des Russcs, mais rcconnurcnt
bicnlót les Polonais, qui venaient de pénétrer
par le faubourg de Raczenska, lcur donnerent
la main, et .coururcnt porter cettc bonne nou–
vcllc au marécha!. Alors on pénétra en masse
clans la ville, qu'on s'empressa de disputer aux
llammes, dans l'espérance d'en sauvcr une par–
tic. 11 y ornit dans les faubourgs dcux ou trois
Russes morlspour un
Fran~ais,
ce qui s'expliquc
par l'clfct mcurtricr ele notre:irtillcric, et par la
situation des llusscs, placés longtcmps
1
décou–
vert entre les faubourgs· et l'cnccinlc. Notre
perle récllc ful de 6
1
7 millc morts ou Llcssés,
cclle des Russes, d'opres
IM
évaluations les plus
exaclcs, de
12
ou
·J
5 milie au moins '.
1C'csl
l'cxp1·c~sion
de Nupoléon dans sonbullcti11.
' On uccom¡mud pasquc M. de lloutourlin aitpu allri-