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LIVRE QUARANTE-QUATRIEME.
1\7.) Cepenclant le général Barclay de Tolly, qui
n'avait envoyé sur la route directe que quatre
régiments de Cosaques sous le général Karpof,
craignit quece ne filt pas asscz pour oceuper le
point de Loubino, par lequcl le chcmin de tra–
verse rejoignait la grande route, et il dépceha le
général-major TouczkolT 111, frcre de celui qui
commandait la seconde colonne, avcc trois nu–
tres régimen
Is
de Cosaqucs, les hussardsd'Élisa–
bethgrad, le r.Sgiment de Revel, et les 20' et
2·1
•de chasscurs. C'étaient environ 5 ou 6 mille
hommes de toutcs armes, cbargés de s'emparcr
a
!'avance du débouché par lcquel la sccondc
colonne, la plus exposée des deux, devait rega–
gner la grande route. 11 fit partir ces dernicrcs
troupes par lavoicdircctcetdetres-bonne heurc,
et bien lui en prit, commcon va le voir. Ces dis–
positions adoptécs, il mil toutc son armée en
mouvement pendan! la nuit du
18
au
19,
et
laissa devant Smolcnsk une arriere-garde sous
le général KorlT.
Vcrs la fin de l.a journéc du
18,
les
Fran~ais
avaicntfort avancé l'établisscmentde leurs ponts,
et ils commcncerent
a
se transporter au delá du
Dniéper dans la nuit du 18 au
·19.
Le19 au ma–
tin, Ney passa le íleuve avcc son corps pour se
mettrc
a
lapoursuitc de l'cnnemi, et Davoust
Cll
fit autant avec le sien. On batailla contrc l'ar–
ricrc-garde du général Korff, et on la rcpoussa
vivement. Arrivé sur les hauteurs de· la rive
droite, on avait deux routes dcvant soi : l'unc
s'élevant droit au nord, conduisait par Poreczié
et la Dwina dans la direction de Saint-Péters–
bourg; l'autre au contrairc allant a l'cst, el lon–
geant le Dniéper, conduisait par Solowicwo et
Dorogobouge dans ladirection deMoscou. (Voir
la carte n•
?í?í.)
On voyaiL sur !'uneet l'autre des
arricre-gardes ennemies, ce qui élaiLnaturel,
car le gros de I'arméede Ilorclay de Tolly,destiné
a
prendre les chcmins de traverse, devait suivre
un momenL la roule de Saint-Pétersbourg, et le
dé~1chcmcnt
du général Karpof, au eonlraire,
envoyé par la voie la plus eourlc pour s'emparcr
dudébouchéde Loubino, dcvait suivrc toul sim,
plemcnL laroute de Moscou. Ncy inccrtain, cou–
rut au détachcmcnt le plus rapproché de lui,
lcquel marchait sur la route de Saint-Péters–
bourg, l'assaillit, et le rejeta assez loin. C'élait
a
un lieu <lit Gédéonowo
1 •
Le général Barclay de
Tolly, elTrayé de voir les
Fran~ais
si presde lui,
l L'hislol'icnBoutourliuaplacéccttcrenconlJ·caGorbou–
nowo, lcprinceEugCncdcWurtcrnbergdans 11nerelationplus
réccnlc l'nplncécllGédéonowo. Pcuimportecedétail,lcfoml
et en mesure d'interceptcr les chemins de tra–
versc réservés aux deux eolonnes de son arméc,
accourut aussilót, et ordonna au prlnce Eugcne
de Wurtemberg de eonserver ce point
a
tout
prix, pour donner
¡,
ce qui était eneore en ar–
ricre le temps de défiler. On corubattit encet cn–
droil avee beaucoup d'opiniatreté de la par! des
Russcs, qui regardaient leur salut commealtaché
a
la eonservalion du poste disputé, avcc beau–
eoup moins d'insistanee de la part des
Fran~ais,
qui n'avaient aucun but déterminé, et cher–
clrnient uniqucment a s'éclairer par de nom–
breuses reeonnaissances sur la direction adoptée
par l'enncmi. Les Russes restcrenl done maitres
de Gédéonowo.
La matinée s'éeoulait ainsi, lorsque Napoléon
SUl'l'int, et regardant tanlÓl
!lU
nord, !anlÓl
a
l'est, reconnut par le mouvemcnt général des
troupes russes, qne la rctraite devait s'opérer
dans ladirection de Moseon.
JI
détourna done le
maréehal Ney, qui s'acliarnail
a
liatailler sur
la
roule de Saint-Pétersbourg, et le reporta·sur la
route de Moscou, en lui affirmant que, s'il mar–
chait vil.e, il recueillerait avanLla fin du jour
quclque brillant trophéc. 11 le
fit
suivre sur eette
mcme route de Moscou par unepartiedes troupes
du mnréchal Davoust, afin de l'appuyer au be–
soin, nrnis il laissa l'autre sur la route de Saint–
Pétersbourg, afin des'éclairer dans tous lessens,
et renLra dans Smolensk, oú l'appelaient mille
soins divers.
JI
attendait, pour prcndre un parti
définitif, le résu!Lat des reconnaissanees que ses
licutenants allaient exécutcr.
Le maréchal Ney, avec ses trois divisions, sui–
vit le détachemcnt russe ehargé d'occuper ledé–
bouché de Loubino, et commandé, avons-nous
dit, par le général-major TouczkolT
JI!.
ll l'attci–
gnil sur le plateau de Valoutina, oú, d'apres les
traditions du pays, les Polonais el les Russcs
s'étaient souvent combattus. Les Russes appré–
cinnt l'importance de la mission qui leurétaiteon–
fiéc, résistcrent vaillammcnt, mais furcnt rejetés
de ce plateau dans une petitc vallée située sur le
revers, la traverscrenLde leur mieux, gravirenl
un nutre plnteau qu'ils reneontrcrent sur leur
chcmin, s'y défcndirent avec la mcme vigueur,
furent culbutés de nouveau, etfirent lcur retraitc
vers undernier postequ'ils résolurent de conser–
ver
¡,
Lout prix. Au dela en elTet se trouvait le
débouchéde Loubino, el s'ils faisaicnt un pas ré-
dufait, quclqucpnrtqu'on lcp\:icc, impoHc scul, el ccfond
cstincontestable.