MOSCOU. -
AOUT
1812.
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qu'au Iicu de chcrcher a tourncr les Russes par
leur gauchc,
¡¡
aurait du songer
a
les tourner
par leur droitc, c'cst-a-dire par Witcbsk et
Sourage; qu'il aurait du par conséqucnt re–
monter la Dwina, puisse rabatlre sur les Russes
par Ieur droite et les acculcr au Dniépcr. Mais
la carie prouve que son calcul était bien préfé–
rable a cclui de ses ccnscurs, car en rejctant les
Russes sur le Dniépcr, il les cut rcjctés sur le
pont deSmolensk, qu'ilsauraicnt passé sansdiffi–
culté, aprcs quoi ils auraicnt rcgagné librement
I'intéricur de l'cmpirc par les provinccs méri–
dionalcs, qui étaicnt les plus ICrtiles, et ofTl'aicnt
lechamp le plus vaste
11
une rctraitc continuc.
En les tournant par lcur gauchcau contrairc, en
les rcjctant sur la Dwina, il les rcjctait dans un
angle formé par la Dwina et la mcr, et pouvait
ainsi les yenfcrmcr complétemcnt. (Voir lacarte
n' M.) 11 suffisait pour cela qu'il cut acquis sur
eux une ou deux journécs d'avancc en les débor–
dant. C'est lU le motif profoncl pour lcquel
il
avait toujours tcndu a déborder par leur gauchc,
et non par lcur droitc, les Russcs campés sur Ja .
Dwirrn. Éviclcmmcnt ce qui l'avait fait échoucr
ici, c'était l'évcil dans lequcl il les avait trouvés,
c'était I'éncrgie qu'ils avaient déployée
a
Snw–
Iensk, et ce n'est pas son génie militaire qu'on
surprencl en fautc, c'cst ce que nous appelons sa
politique, sa politiquequi I'avail conduil
a
braver
les Iieux, qucls qu'ils fussenl, et
a
pousscr ics
hommcs au désespoir
a
force de les 1•ouloir domi–
ncr. Or, les Iieux méconnus, les hommcs poussés
audéscspoir, qu'cst-ce, sinon la nature deschoses
résistanl invinciblemcut
a
qui prétcnd lui faire
violcncc?
Tandis que Napoléon rentrait daos I'intfrieur
de Smolcnsk pour donncr des soins
a
sonarmée,
tandisque nos pontonnicrs, malgré un fcu trcs–
vif de tiraillcurs, s'cmprcssaienl de jctcr des
ponts, les généraux russcs s'occupaicnt d'assurer
lcur retraitc. lis avaient bcsoin de se Mtcr, car
laroutede Moscou, longcant pendant I'espace de
quclqucs licues la rive clroitc du Dniépcr (voir
la carte n' 57), étail cxposéc a toutes les tenta–
tivcs des
Fran~ais,
qui pouvaient bien finir par
découvrir les gués du lleuvc, et par le passcr
pour Ieur barrer lechcmin. Mais, s'il faul peu de
tcmps pour se décidcr quand on agil dans Je scns
de la passion générale,
iI
en faut dnvanlagc
quand on agit en scns contrairc. Barclay de
Tolly, qui
a
chaquc pas rétrograrle blcssait les
passions desonarmée, ne prit que le
18
au soir,
Iorsque nos ponts étaicnt aehcvés, le parli de
livrcr définitivemcnt la ville nouvclle aux Fran–
~ais.
JI ordonna done au princc Bagration de se
porler en avanl pour s'emparc'r des points les
plus importants de la route de Moscou, que les
Fran~ais
dcrnienl étre tentés d'intcrccptcr, et il
fit ses dispositions pour le suivrc avec l'armée
principale. Cette route rle Moscous'avance droit
3 l'csl, Iorsqu'on a frnnchi l'ouvcrlure de·vingl
licues elont nous avons cléja parlé plusieurs fois,
et qui existe entre les sources de
la
Dwina el
ccllcs du Dniépcr; elle rcncontre ainsideux fois
les sinuosités du Dniéper, une premiere fois
a
Solowicw.o,
11
une forte journée de Smolcnsk, et
une scconelc fois
it
Dorogobouge, qui en cst
a
dcux journécs. (Voir la carte n' 55.)ASolowiewo
la routc de Moscou passait ele la rive droitc du
Dniépcr occupéc par les Russcs, sur la rive gau–
cbc occupéc par les
Fran~ais.
L'arméc en retraite
pouvait done y ctre arrclée. ADorogobouge la
roule rcncontrait le Dniépcr une dcrnicre fois,
et on y trouvail dcrricre I'Ouja, pctile riviere
qui se jctte daos le Dniépcr, une position ou il
y avait aussiquelquc utilité
a
nous p1·évenir. Le
général Barclay de Tolly prcscrivit au princc
Bagra1ionde se portcr toul desuitesur Dorogo–
bouge, et résolul ele se rcndrc lui-mcmc
a
Solo–
wicwo, en partant le ·18 au soir, et en marchant
toutc la nuit afin d'yarrivcr
a
temps.
~lais
cette
rctraite, facile pour leprince Bagration qui avait
beaucoup d'arancc, ne l'élait pas pour legénéral
Barciay ele Tolly, qui était cncorc
a
Smolcnsk, et
ne dcvait en sorlir qu'au elernier momcnt. De
plus la route de Moscou, pendant dcux licues
cnviron, longeait le Dniépcr de si pres, qu'clle
était cxposéc
a
une subite irruption des Fran–
~ais.
Le général Barclay de Tolly
con~ul
la pcnsée
d'
évit.crce danger en prenanl des chcmins de
travcrsc qui le meltraienl hors d'attcinte, et le
ramcneraicnt sur lagrande route
a
une distance
de trois ou quatrc licues, vers un cndroil ap–
pclé Loubino. En conséquencc il divisa en deux
colonncs l'arméc qui était sous ses ordrcsdirccts.
L'unc, composéc des 5° et
6"
corps, sous le gé–
néral Doctoro!T, des 2' el 5° corps de cavalcric,
de toute la réscrvc d'artillerie el des bagagcs,
dul fairc le détour le plus long, el passcr par
Zykolino, pour aboulir
a
Solowicwo.Lascconde,
composéc des 2
11
,
5° et
/¡.e
corps, et du
f er
de ca–
valc1·ic, conduite par
le
Iieutcnant général
TouczkolT, dcvait faire un détour moins long, et
passer par Krakhotkino et Gorbounowo, pour
tombcr sur r.oubino. (Voir les cartcs n" 55 el