LE CONCILE. -
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les eadrcs; puison faisait passcr dans ces cadres
le plus d'hommcs qu'on•pouvait, en les insln1i–
sant Je plus vilc, le micux possible. et en les
rcnvoyant CllSUile dans Jeurs ehamps pour en
appeler d'autrcs qu'on s'appliquait
a
forrncr
ú
leur tour. On comptait ainsi avoir au bcsoin
150 millc hommcs au lieu de 42 millc, cl1ifrre
fixé par les traités. On gardait au dépót du régi–
men! les armes et les habits dessoldats provisoi–
rerncnt rcnvoyés dans lcurs ehamps, et on cspé–
rait que, gr1ice
a
Ja )mine inspirée
a
Ja nation
prussiennc par ses malhcurs, ces soldats, rctc–
nus
a
peine un an sous les drapcaux, se com–
portcraient dans l'occasion commc les troupes
les plus agucrrics. L'arcnir dcvait justifier cct
cspoir. Les creurs, en cfrct, étaicnt rcmplis en
Prusse d'unc hainc inouie contrc la Franec.
Toutc Ja jcunesse des elasscs élcl'écs, toutc ccllc
des classcs moycnncs, nobles et bourgcois, prc–
tres et philosophcs, se réunissaicnt dans des so–
ciétés secretesqui prenaicnt divers noms,
Ligue
de la vertlt, Ligue gennanique,
soeiétés dans
lesqucllcs on prorncttait de n'aimcr que l'Allc–
lcmagnc, de ne l'ivrc que pour clic, d'oublicr
toutc· difrérencc de classc ou de provincc, de ne
plus admcttre qu'il yei1t des nobles et des non–
noblcs, des Saxons, des Bavarois, desPrussiens,
des Wurtembcrgcois, des Wcstphalicns, de rc–
pousscr toutes ces distinctions, de ne rcconnaitrc
que des Allemands, de ne parlcr que Ja languc
de l'Allcmagne, de ne porlcr que des tissus
fa–
briqués ehcz clic, de ne consornmcr que des
e l)J'Oduits sorLisde sonscin, de n'airncr, cultive,.,
favoriscr que l'art allemand, de consaercr cnfin
loutcs ses facultés
a
l'Allcmagne sculc. Ainsi Je
patriotismc exallé de l'Allcrnagnc s'cnfonqait
dans l'omhrc et Je myste1·c, salisfaisant
a
la fois
en cela un bcsoin de Ja situation,et un pcnclwnt
du génic gcrmaniquc.
t e roi et M. ele Ifordcnbcrg, placés sur ce
volean, étaicnt en proie
a
de rrucllcs pc1·plcxi–
lés. Le roí par scrupule, comrne l'cmpcrcur
rl'Autrichc par prudcncc, inclinait
a
no pas rom–
pro avcc Napoléon, car il s'était cngagé
a
luí par
les plus solenncllcs prolcslations de fidélilé, dans
J'cspérancc de saurer les <lébris de sa rnonar–
chie. M. de Ilarclcnbcrg, dans une position asscz
scmblable
it
ccllc de M. de Mcttcrnieh, chcr–
chait ele qucl cóté il p,oul'l'ait trouvcr pour son
pays le plus d'avanlagcs. Le parti allcmand
exalté, Jui en voulant de son changcmcnt appa-
1·cnt de conduitc, et de fJUelqucs rigueurs obli–
gécs cnvcrs les associalions secretes, était prct
loutcfois
11
Jui pardonncr,
1\
condilion qu'il de–
rint J'instrumcut cl'unc perfidie toutc palrioti–
qnc, clont pcrsonne no se faisait eonscicnce
1
Bcrlin. Ccttc pcrfidie eonsistait
a
prcndre pré–
tcxtcde la situation
meoa~ante
ele l'Europc pour
armcr, et a1·mer tres-activcmcnt,
1t
parlcr d'al–
liance
1t
Napoléon afin qu'il toléi'át ces nrmc–
mcnls, UolTrir,
a
promcttrc,
a
signcr· mCmc
cctle allinncc s'il Je fallait, puis, le mornent
vcnu, it s'cnfonccr dans la Vicille Prussc avce
'150 mille hommes, et
1t
se joindre aux llusscs
pou1· accablcr les
Fran~ais,
tandis que l'Allema–
gne twt entierc se soulevcrait sur lcurs dcr-,
rieres. Sanscxaminer Ja légitimité <l'unc pareillc
politique, et en adrncttant qu'il cst bcaucoup
permis it qui vcut afrmnchir son pays, il y avait
bien
a
dire contre ccttc politiquc, elu point de
vuc ele Ja prudcnce. La P1·ussc pouvait en efrct
pcrdre
1
ce rcdoulnble jeu les restes de son
cxistcncc. Le roi, M. de Hardenberg et quclqucs
csprits snges Je eraignaient, et appelaicnt folie
une tcllcconduilc. Pour tochcr de les amcncr
ii
Jcurs vucs, lesmcmbrcs ardcntsdu partí gcrma–
oique 1·épandaicnt millo bruits alnrmanls, et
chcrchaicnt
1
Jeur pcrsuadcr que Napoléon avait
J'inlcntion d'cnlcvcr le roi et la rnonarehic cllc–
mcmc pal' une subile irruption sur llerlin, ce qui
était tout
a
fait faux, mais ce qui aurait pu se
réalise1', pourtant, si Ja Prusse avait commis
quclque imprudence, car Napoléon, reccvant de
son eólé des avis tout aussi inquiétants, se lc1rnit
sur ses gnrdcs, et avait ordonné au maréchal
Davoust de se porter sur Bcrlin au premicr
clangc1·.
Poursuivis ainsi des plus sinistrcs fantómcs,
Je 1·oi et M. ele Ilarclcnbcrg avaicnt adopté en
parlic le plan qu'on leu1· conseillait, moins la
perfidic,quirépugnait
a
Jadroiture du roí eommc
ii
sa pruclcnce. lis avaicnt résolu d'armcr, et ils
avaicnt armé récllemcnt au moycn de l'cxpé–
dicnt que nous avons fait connaitrc, et bien
qu'ils se fusscnt strictement rcnfcrmés dans
l'effcctif de
'•2
millc homrnes, néanmoins ils en
pouvaicnt réunir en pcu rle lcmps IDO ou
120
millc.
~lais
s'ils pouvaicnl équivoqucr sur le
chifrrc Yrni des troupes disponibles, il lcur était
impossiblc úecachcr ecrtainspréparatifs, commc
ccux par excmplc qui se faisaicnt dans les places
restées
it
Ja Prussc. Napoléon tcnait bien les
fortcrcsscs les plus importantes <le l'O<ler, Glo–
gau, Custrin, Stcttin, et en out.1·c les dcux plus
importantes de
In
Vistulc, Tliorn et Dantzig,
mais Je roi Frédéric-Guillaumc avait cneorcen