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LIVRE QUAl\ANTE-1'1\0ISIEME.
qu'ellc fcrait.
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ne s',,gissail done plus d'cndor–
mir Alcxandrc, mais de rrjetcr sur lui la rcspon–
sabilité de ccttc guc1·rc. M. de Laurislon, chargé
de sollicitcr l'autorisation de se rcndre
a
Wilna,
afin de retenir Alcxandrcquclqucs jours de plus,
n'avait pas encore pu répondrc. Si, par cxemple,
on avail su que sa demande de se lransporlcr
aupres d'Alcxandrc avail éié repoussée, on au–
rail cu dans ce refus un cxccllcnt prétexlc pour
Jui ordonncr de prcndre ses passc-porls; mais
on l'ignorail. Cependanl on avait bcsoin d'un
motif, car on était au
16
juin , et il follait avoir
franchi le Niémcn du
20
au
25,
et pom· le fairc
décemment, avoir trouvé une raison de rupture
immédiatc. Napoléon, avec sa fcrtilc adressc, en
imagina une pcu solide, mais spécicusc, asscz
spécicusc mémc pour !romper plusicurs histo–
ricns, et cettc raison, c'élait que la Russieayant
cxigé l'évacuation ele Ja Prusse comme prélimi–
nairc de toulc négociation, avail voulu imposcr
a
Ja Francc une condition déshonorantc. Or il
y avait la une incxactilude radicale. La Russic
avait réclamé l'évacuation, non pas comme con–
dition préalable, mais commc suite assuréc de
toutc négociation qu'oncntamcrail sur les divcrs
points en Jitigc. On négligca ccltc clistinction,
et on résolul de soutcnir que la condition préa–
lablcmcnl cxigéc, tcndant
a
ramcncr Napoléon
du Niémcn sur Ja Vistulc, mémc sur l'Elbe, élait
pour Ja Francc un oulragc qu'cllc ne µou1•ait pas
supporl.cr; que, ccttc condition, on a1·ait cu soi11
de la tcnir secrete pour clrc dispensé de s'cn
offenser, mais qu'cllcvcnait de s'ébruilcr, qu'cllc
commcn~ait
a
éire connuc de tout le monde,
que des lors l'offcnsc ccssant d'ctrc cachéc, ne
pouvail plus étrc supportée, et dcvait cntraincr
lagucrrc imrnédiate. Accllc o!Tcnsc se joignail,
disait-on, une sorlc de provocalion réiléréc du
princc Kourakin , qui avait demandé ses passe–
porls
a
M. de Ilassano la vcillc du départ de
cclui-ci,
el
les avait rcdcrnandés dcpuis avcc in–
sistance.
11
faut eonvcni1· que ecttc eondition
d'évacucr le LCrritoire prussicn, connue
a
peine
de quelHUCS prrsonncs bien informées, et signi–
fianl sculerncnt J'él'acuation ap1·cs c¡u'on se scrait
rnlcndu, que la demande de passc-ports faite
par le lll'incc Kourakin , 1·ctiréc d'abord , puis
rcnouvcléc quand il s'était vu scul 11
Paris, sans
com111unicalion avcc aucun ministre, n'étnicnl
pas de ces offenscs
insupporla~Jcs
pour Jcsc¡ucllcs
une nation csl tenue de vcrscr lout son sang,
el qu'cn toul eas Nnpoléon avaiLasscz cnlrcp1·is
sur aulrui, pour se rnontrer
it
son tour quclc¡uc
pcu enduran!. Mais
il
fallait un prétcxlc plau–
sible, et Napoléon adopta cclui-ci, faule d'cn
avoir un mci!lcur. En conséqucncc,
il
ful or–
donné
a
M. de Lauriston de prendrc immédiatc–
mcnt ses passe-porls, sous le prélcxte que la
prétcnlion de nous faircévacuer Ja Prusse élant
dcvcnuc publique, l'outrage ne pouvait plus étt·c
tolét'é; et dans la supposition que M. de Lauris–
ton seraiL pcul-elrc déja rcndu
a
Wilna (ce qui
écarlc absolument l'idéc que le rcfus de J'ad–
mctlrc
a
\Vi!na füt la cause de la rupluce), on
lui rccommanda de ne pas préscnter la demande
de ses passc-porls nvant le22, Napoléon voulant
franchir le Niémen le 22 ou le 25. On l'avnlit
en mémc tcmps que la dépechcqu'on lui écrivait
le
16
de Kccnigsberg scrait antidatée, porlcrait
Ja date de Thorn et du
i
2, pour persuadcr aux
Ru.sscs en Ja lcur remetlant, que Napoléon se
Lrouvait cncorc éloigné, et moins ·en mesure
d'agir qu'il ne l'était réellcmenl. Un courricr
fut doneadrcssé de Kcenigsberg
a
M. de Lauris–
ton avcc les ordrcs et les inslructions que nous
vcnons de rapporler '.
Cctte formalité diplomatique rcmplic, Napo–
léon, quicroyait le momenl d'agir vcnu , partil
de Kccnigsbcrg le lcndemain pour rcjoindrc ses
troupes sur Ja Prégel, les passcr en revuc, et
s'assurct• définitivemcnt si clics avaicnt Lout ce
qu'il lcur fallait pour cntrcr en campagnc.
11
lcnaiL, pour les premicrcs opérations,
a
lcur pro–
curcr seulemcnt dix jours de vivrcs, se llattanl
el'cxécutcr elans ces dix joursdes manreuvrcs dé–
cisivcs, el ne voulant pas étrc
gCné
daos ses
mouvemcnts par Ja difficulié des subsislanccs,
difficulté qui, en Italic et en Allcmagnc, n'cn
était jamais une, parce qu'on y trouvait loujours
de grosvillages
a
dévorcr,maisqui était immensc
en Lithuanic, ot't l'on ne rcncontrait Ja pluparl
du tcmps que des marécagcs
úl
des foréls. Ses
soldals ayanl Je quoi vivrc dix jours, il cspérail
eommcn Ulm en
1805,
a
Iéna en
·1806,
it
RaLis–
bonnc en
·1809,
frapper un ele ces coups terri–
bles, qui, des le début des opérations, acca–
blaicnl ses cnncmis, el les déconecrtaicnt pour
le reste de Ja gucrrc. Les prcmicrs convois par
eau avaient apporté eles vivrcs jusqu'lt
T~pii1u
SUI'
la Pl'égcl
j
il fallait,
a
force ele voiLurcs, les
fairc transporler jusqu'a Gumbinncn au moins,
point asscz rapproché de cclui ou l'on allait
1
M. F:ii11, dansson Manuscril de 1812, s'cn fianl aux
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