PASSAGE DU NIÉMEN. - ""' 1812.
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dans celui du priuce Eugc11e, avaient excitédes
cris de doulcur sur lcm· 1·oulc, s'inquiélant pcu
d'encourir'unc réprobation qui dcvait s'adrcsser
aux
Fran~ais'
plus qu'a cux. Une cireonslancc
plusgravecncorc s'étnit produitc. Napoléon, bien
qu'il cut sur l'Oder Stcllin, Custrin, Glogau, et
surl'ElbeMagdcbourgct Uambourg,voulait avoir
cntrée dílns Spandau, surlout
a
cause de llcrlin
dont cctte forlcressc élait la proche voisinc.
11
luí fallait aussi Pillauqui était la clcfdu Frischc–
llaff, bellc mcr intéricurc, au moycn de laqucllc
Oll pouvail allcr par cau de Dantzig
li
Ko:nigs–
bci·g sans rCllCOnlrcr les
A11glais.Ooavait
a
peine
parlé de ces places dans le trnilé d'allianee, muis
on avait dit que la Pi·usse n'y aurait que des
vétérans, et <1uc la France pourrait y déposer son
rnatériel de guerrc. On s'était serví de ces stipu–
laliolls insidicuses pour s'emparer deSpandau et
de Pi)lau. On y avait d'ubord introduit uvec du
matériel des artilleurs
fran~ais
pour le ¡;arder,
et bicntót des bataillons d'infantcric. L'émotio11
avnit été vive 11 Ilcrlin, et loulc l'adrcsse <lc M. de
Narbonnc,qui s'élait occupé de ces affaircs uvant
de partir pour Wilna, n'avait pas sum pour
calmer le roí de Prussc et M. de Hurdcnberg.
Ccux-ci étaicnt re1•cnus l'ull et l'aulrc
li
lcurs
tcrreurs accoutumécs. Le roi voulait voir Napo–
léon
¡,
quelquc prix que ce fút, mais ce princc,
loujours lrisledcpuis ses mall1cul's, déteslant les
fctcs et l'éclat, croyant lirc daos tous les regards
une offensanlc pitié, i1 peine 11
l'aisc chcz luí,
plus mal
a
l'aisc chez les nutres, aurait désiré
rcccvoir Napoléon i1 Polsdam, plutót que d'aller
au milicu des pompcs de Drcsdc lui apporlcr ses
craintcs, ses clrngrins, ses pressantcs questions.
Néanmoins tcnanL 3 s'ahouc11cr avcc lui, n'im–
porte ou pour se rassurcr sur ses intcntions,
pour lui fairc cntcndrc le c1·i des peuplcs, il était
résigné
a
se rendre
a
Dresdc, s'il le fallait abso–
lumcnt, et il avait cnvoyé M. de llatzfcld auprcs
de Napoléon pour s'cxpliqucr avcc lui sur ce
sujet. M. de Hatzfcld élait ce grand scigneur
prussicn que Napoléon avait fuilli fairc fusillcr
en
1806,
et que dcpuis il avait pris en singulicrc
faveur (ce qui prouve, indépendamment de rai–
sons plus hautes, qu'il ne faut pus se 1"\lcr de
faire fusillcr les gens); il venait cxposcr
ú
Napo–
léon les perplcxités de son souverain.
Napoléon le
re~ut bi~n,
et le rassura autant
qu'il pul; mnis ne se souciant ni d'enlcndrc de
trop pres les plaintes des Prussiens, ni de pcrdre
son tcmps
a
faire un long délour, voulant
Slll'–
tout cornplélcr la grande sccnc qu'il donnait
a
fües<lc par Ja pl'ésencc du 1·oi de Prussc , il fit
dire au roi que Potsdam n'était pas sur sa route,
qu'il luí était impossiule <l'y pa ser, et qu'il lcnait
bcnueoup
a
l'cntrctcnir
a
Drcsdc mcmc. Ce dé–
si1· élait un ordre, qui ful transmis sur-le-champ
au roi Frédérie·Guillnumc.
M. de llassano, en arrivant
a
Dresdc,
y
avait
apporlé d'aulrcs affaires non moins graves,
d'abord Ja réponse de l'Anglctcl're au dcrnicr
rncssogc pacifique de la Frunce, sceondcment le
récit d'unc démarehc fort singulicre et forl im–
lll'évuc du prince Kourakill. Lemini !ere anglais
avait accueilli u1•cc moins de hauleur qued'ordi–
naii·c cctle nouvcllc proposition de paix,
il
l'uvait
accueillic en cabinet que la lullc a fatigué, muis
que l'cxpéricncc a rcndu incrédule. L'altribu–
tion de laSicilc 11 la maisonde lloul'l1on, du Por–
tugal
a
Ju maison de llrngunce , lui aurait sum,
malgré tous les nutres changcmcuts opérés en
Europc, sion avait ajouté
li
ces eonccssions lu
restitution de la couronne <l'Espagnc
li
I'erdi–
nand VII, non que le gouvcrncmcnt brilanniquc
lint bcaucoup au priso11nicr de Valcngay, rnais
parce que le public de Lou<lres, épl'is des Espa–
gnols' ne youlait pus les auauclouucr.
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y uvuit
done un eommcncemcnt de rap1ll'ochcmcnt dans
les dom1écs des deux puissunccs, muis, i11dépen–
dammcnt de l'obsluelc loujourscnlicr et toujou1·s
insurmonlablc de la courollnc d'Espagne, le ca–
binet anglais n'avait point pnru croirc que la
proposition de paix ftit séricuse, tout eu l'ae–
cueillant plus polimcnt que de coutumc.
Cctle réponse de l'Anglclcrrc
a
nos OUl'el'lUl'CS
n'avait pas, du reste, plus d'i111po1·1ancc que
le
ouverlurcs ellcs-mcrncs , mais la dcrnic1·e dé–
marclic du priucc Kournkin afTccta Uicn aulrc–
lllcnt Napolfon . Constam111cnt 111·éoceupédu soin
de différer les host.ilités jusqu'au mois de juin ,
nfin de laisse1· pousscr l'herbc et rcposcr ses
troupes une vinglaine <le jou1·s sur la Vistule, il
n'avnil pas ccssé d'appréhcndcr , malgré toutes
ses p1•écautions, unebrusr¡uc initiativcdcsRusscs.
01· la démarchedu pl'incc Kourakin éiail de nn–
ture :\ -leconfii•mcr dans ses craintes. Ce prince,
fastucux et doux, forl atlaché i1la paix, et ayant
travaillé sans rcl:ichc 3 la conse1·ver, vcnnit ce–
pendant,
¡,
la vcillc mcmc du départ de M. de
llassano, de dcmandcr ses passc-ports. Ses mo–
tifs, nlors assczdifllciles i1 démclcr, n'étaicnt nu–
tres que les suivanls. D'abord on avait refusé de
luí rendrc le domestique de l'ambassacle compro–
mis d:ms l'a!Tai1·c du cornmis de la gucrrc; le
eommis nvait élé jugé, convaincu et fusillé; le