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LIVRE QUARANTE-TROISIEME.
Dancmark au profit de la Sucdc, parce qu'cnlln
clic n'av11it pos confinncc dans le cnrnclfrc du
nouveau princc roynl, car, ficlClc ou traitrc
en~
Ycrs son ancicnnc patrie, il mél'itait égalcmcnt
qu'on se
défüH
de Jui. Pourlant l'urgcncc avait
fait
é\'anouir ces raisons. Des ménagcmenl.s,
iln·yavoitpiusa engnr<lcr. Le Dnncmnrk n'étnit
plus
a
considércr , c!Cs qu'il s'agissnit pour
l'cmpirc russc el'ctrc ou de n'ctre pos, et qunnt
aux rclntions véritnblcs de Bernndotlc orce In
Francc, l'occupation de la Poméranic suédoisc
par les troupes du maréclrnl Dn1•ousl vcnait ele
les mellre dnns une complete évidcnec. En con–
séqucncc lc5 avril (24 nrnrs pour les llusscs), l'cm·
pcrcur Alcxnnelrc conclul un trnité avcc la cour
ele Stockholrn, par lcqucl il lui concédail l'objct
nrelcnt ele ses neux, c'cst-a-dirc lnNorwégc. Par
ce trnité <l'nllinncc, destiné a rcslcr sccrel, les
dcux États se gnrnnlissnient lcurs possessions
aclucllcs, c'cst-n-elirc queInSucelc gnrantissnit la
FinlnndcaInRussic, et consncrail ninsi sa p1·0111·c
dépossession. En retour, lnRussic promcltnit
it
la Sucdc ele l'nider 1 conquérir la Norwégc dans
le préscnt, el de l'nider égalemcnl
a
la conserve!'
dans )'avenir. Pour l'accomplisscmcnt des vucs
communcs, la SuCdc dc\'nit réunir une armée
de 50 millc hommcs, et la Russic lui en prelcr
une de
20;
le princc roynl devnil commanelcr
ces 50 millesoldats, c1nahir d'abord laNorwégc,
puis cellc opéralion , qu'on rcgardait commc
focilc, consomméc, <lcsccndrc SUI' un point qucl–
conquc de l'Allcmngnc nfin de prcndrc l'nrmée
frangnisc
a
rcvers. 11 n'élait pns dil, mais cn–
tcndu, que les subsidcs et les troupes britnnni–
qucs concourraicnl 11 cctle rcdoutnlile divcrsion.
Qunnt au Doncmnrk, si lcstcmcnl spolié, on
devait f:iirc nuprcs de lui une démnrchc de cour–
toisic, l'avcrtir de ce qui vcnait cl'Ctre sLipulé,
lui olfrir de s'y prclcr moycnnnnt un dédommn–
gement en Allcmagnc, qu'on ne désignait pas,
mais que
Ja
fulurc guct'l'C ne
pouvait rnanqucr
de procurcr. Si le Dnncmark ne conscntait pasa
une proposiiion présentée en de lcls termes, on
dcvait se mcllrc immédialcrncnt en gucrrc nvcc
lui; et comme on pouvail doulcr de l'cffct d'tm
parcil lraité sur l'opinion de l'Europe, pcut-ctrc
meme sur ccllc de la Sui:dc, qui élnit honnclcet
amie de la
~~rancc,
on convint, snns l'écrirc, que
le cnbinct suédois commcnccrait par tléelnrcr
non pos son alliancc avcc la Hu sic, 111ai5 sa
neutralité a l'égard des puissanccs bclligéi-a11lcs.
De la neutralité elle passcrait ensuitc n l'état de
gucrre contrc la Frunce. Ainsi fut ménagée la
lransilion 1 eclle infidélité, l'unc des plus
odicuscs de l'hisloirc.
La qucstion In plus importante pot1r Alexan–
drc, c'étoit la paix avcc les Turcs. Sur la pcrsis–
tnncc qu'on mcttnit n cxiger une portie ele lcur
Lcrritoire, les Turcs nrnient rompu les négocia–
tions et rccommcncé les hoslililés. La cerlilude
d'uncgucrrc prochaine de la France avce In Rus–
sie nvait
été
pour cux une rnison décisivc de ne
ricn céder. Néanmoins ils pcrsistnicnt
a
ne pas
devenir nos alliés, cor le rcsscnlimcnt de In con–
eluitc tenue
a
Tilsit n'élait point ctrncé chez eux,
bien que la polilique nouvclle de InFrance flit
de nnture
a
les dédommager. lis voulnicnl pro–
fitcr de l'occnsion pour sorlir indemnes de cclle
gucrre, snns se mclcr de In <JUCrcllc qui nllait
s'cngagcrentre eles puissnncesqu'ilsnv.1ient alors
l'imprévoyance de ha'ir aumémcdcgré. Ricn ne
poul'ait élrc plus malhcureux pour In llussie
qu'unccontinualion d'hostilités conlrcles Tures,
cor, indépen<lnmmcnt d'une armée ele
60
millc
combntlanls préscnls nu drnpeau, ce qui _n'cn
supposait guere moins de
too
millc
it
l'cffcctif,
elle étailobligéc d'cnnvoir une aulrc de 40 milie,
sous le génél'alTormasof, pour lier ses forces du
Danubc a\'cc cellcs de la Dwinn et du Dniépcr.
Rccouvrcr la disponibilité de ces dcux nrmécs
étnil d'une extreme imporlance, quclqucplande
campagnc qu'on ndopl:it. Les teles fcrmenlaicnl
antour d'Alcxandrc, elparmi lesgénérnux russcs,
el parmi les officicrs nllcmnnds qui nvnienl fui
a
sa cour pour se souslrnirc1 l'inllucnce de Nnpo–
léon. Les amatcurs de chimcrcs prétendaient
qu'on pouvait, al'ee les cent millc J\usscs qu'oc–
cupnicnt les Turcs, enl'nhir l'lllyric et l'llalie,
cnlrnincr l'Aulrichc, el préparcr peul-clrc un
boulcvcrscmcnl de l'cmpire
frnn~ais,
en revan–
chc de l'agrcssion tcntée par Napoléon coutrc la
Russic. Ce rt!sullalétait
a
lcurs ycux prcsqucccr–
tnin, sion signait promptcment la paix avce lrs
Turcs, et si on poussnit le rapprochemcnt avce
eux jusqu'a une nllinnce. Les csprils plus pra–
tiqucs pensnicnt que, Sans aspircr
a
de si l'aSlCS
résultals, cent mille hommcs ramenés du Dnnubc
sur In Vistule, et portés dnns le llanc des Fran–
~nis,
suffiraicnt pour chnnger le dcstin de la
guerrc. Alexandrc, qui,
a
force de s'occuper de
comhinaisons militaires, avait fini pnr se faire
sur ce sujct des idécs justes, élait de ce dcrnicr
nvis. 11 nvnit _nuprcs de lui un hommc dont les
opinions prcsquc libéralcs, l'cspritb1·illanl et vif,
lui plaisnient bcnucoup, et lui faisaient cspércr
d'éminentsscrviccs, c'était l'amiral Tchitchakoff.