PASSAGE
DU NIÉMEN. - ""' 1812.
ou
il
1•cmplaqait d'aillcurs le gouvcrncmcnt fort
dur de la maison d'Aulriche, on étaiL asscz
calme;
il
csl vrai encore qu'cn JliémonL (Genes
cxccptée, qui soupiraiL aprcs J'ouvcrture des
mcrs), on conunenqail
a
s'habitucr
il
la France,
et qu'on lui pardonnait un peu plus qu'ailleurs
d'
CL.rcaussi belliqueusc; mais en Toscane, ou
ron avait horrcur de
la
gucrrc, oU l'on avait
toujours vécu sous un gouvcrncmcnL ilalicn,
doux, sage et philosophc, ou commcnqail 11 ré–
gncr !'esprit de l'Italie méridionale, ou le clcrgé
avail une ccrtainc inlluence;
a
Home, ou lepcu–
plc était inconsolable de la papauté perduc, ou
l'anLipathic pour les maitrcs ultramontains élaiL
aussi fortc que daos les Calabrcs, la haine étaiL
pcu dissimulée, el la comme dans le reste de
l'Empire, un revers pouvaiL faire éelalcr un sou–
liJl'emenLgénéral.
JI
suffisaiL, potu' le produirc,
de la présence de la moindre troupeanglaise.
Ces senLiments, répandus en tanL de pays dif–
fércnls, n'étaicoL pas répercutés sans doulc par
le miroir de la publicité quoLidiennc , qui en
grossissant les objCLS force
a
les l'Oil'
CCUX
q4i
voudraieuL se les cachcr : chacun les éprouvniL
pour soi, mais en apprenanL par les ou·i-dirc du
commcrce ou des voyngcurs qu'cn lclle ou tcllc
provincc
Oíl
cnduraiL les mcmcs souffranccs, on
se confirmait <lans sa hainc, et l'oragc grossissaít
sans clrc apcrqu. Napoléon avaiL ccrtaincmcnt
J'cspriLbcaucoup lrop ouvcrt pour ne pas dis–
cerner cct éLaL de choscs; mais loin de conclure
qu'il fallaiL se garder de l'nggraver par une nou–
vellc guerrc, loin de raisonner commc il l'avaiL
faiL au retour de la eampagnc de Wagram, alo1·s
qu'il avait un momcnl songé
a
calmcr l'Europe
en Jui donnanl la paix , il en concluail que Ja
gucrrc de llussie était urgente,
afin
de compri–
mer bien vite en
18·12
commc en
1809
les sou–
Iévcmcnts prcts
a
éclater.
11
s'occupcrail cnsuite,
la paix et la domination universelle conquiscs,
d'adoucir son gouvernoimcnl, et de le rcndrc
commodc aux pcuples aprcs le lcur avoir rcndu
si gloricux.
11
raisonnaiL done eommc certains
creurs enfoncés dans l'habiludc du vice, scntanl
qu'il en foulsortir, le désirant sincCremcnt, mais
rernettanl de jour en jou1', si bien queJa vie finil
pom· eux avant qu'ils aienl Lrouvé le lemps de
s'amendcr. Napoléon n'étail sensible qu'aux eris
de Paris, aux cris de la faim populairc poussés
a
ses oreilles,elc'cst par ce motifqu'il éLailvenu
a
Sainl-Cloud chercl1er le printemps un mois plus
tót.
Malgré la bassesse eroissanteautour <le lui, el
se monlrant plus humblcmcnt admiratrice
a
me–
sure que les fautcs devenaicnl plus grandes, il
voyait
a
une certainc contraii1tc
des
visngcs,
n
un eertain silcncc, qu'on craignail Ja nouvcllc
gucr1·c vers laquellc il scmblait se précipitcr, eL
il s'impatientaiL pour ainsi dirc des objecLions
qu'on ne Iui faisait pas, mais 'JU'il dcvinait, parce
qu'il se les adrcssait i1 lui-mcme, et y répondait
souYent en intcrpcllant des gens qui ne disaienL
mot, qui n'avaicnl pas mcme pensé
a
ces objcc–
tions, ou qui, s
1
ils
y
avaicnt pensé, n'auraicnl
jamais osé s'cn cxpliquer avce lui. Toutcfois
parmi
cl.cspcrsonnagcs plus imporlants, il y en
avait un, l'archichancclicr Cambacércs, que dc–
puis Jongtemps, comme nous l'avons déjit fail
remarqucr,
il
n'entrctenait plus que d'affaircs
intéricurcs, sur lesquellcs il le eonsultait volon–
ticrs, el qu'il évilaiLd'cntrctenir d'affaircs cxté–
ricures, parce que sur ce sujcl, sans dédaigncr
son avis,
il
le savail contrairc. 11 cut avcc ce
grave pcrsonnagc deux ou trois cnlrclicns sur
la prochaine guerrc de Hussic; l'archichancc–
lier, malgré sa limidité, qui n'allail jamaisjus–
qu'i1trahir en le trompant un maitre qu'il cl1é–
rissait sinecremcnt, s'cJforqa de le dissuadcr
cl'una tclle enlrcprise; il Je Lrouva plutót fatalc–
mcnl décidé que véritablcmcnt convaincu, el
cntrainé pour ainsi dire par une nécessité irré–
sistiblc. Napoléon Jui répéta comme
a
lout Je
mondeque, quoi qu'on
fil,
il faudrait tól ou tal'll
en venir cncorc une fois aux mains avec la llus–
sie, qu'clle avail été ballue, mais poinl écraséc,
qu'il fallail lui portcr un nouvcau eoup pour Ja
soumcltre; que, puisqu'il Je fallait, le plus tót
scrait le micux; que ses facullés pcrsonncllcs
étaicnt cnlicrcs, ses armécs supcrbcs, cL qu'il
.
aimait micux s'imposcr ccllc rudc t:ichc main–
tcnant qu'il était cnco1·c jcune, que lorsqu'il sc–
rail vicux et affaibli; qu'it plus forlc raison il
aima!t micux la prendrc pour lui que la Iéguc1· 1
son successeur, lcqucl n'élail c¡u'un enfanl, et
u'aurait probablcmcnl pas ses lalcnts; que lesorl
en étail jeté, qu'il fcraiL ce qu'il croyaiLdcvoi1·
foire, et que Dicu ensuite en décidcraiL. Quant
ú
l'cntrcprise, du reste, Napoléon
1ún
méconnais–
sait pas les difficullés, el il déclarail lui-mcmc
que ce n'était pas une gucrrc
il
bl't1squer,
ú
me–
ncr vite, commc tant d'autrcs c¡u
1
il avaiL con–
duilcs si rapidcmcnl; que c'étail !'affaire de dcux
campagncs au moins; qu'on se trompait si on
croyaiL qu'ilallail louL de suite s'enfoncer <lans
les plaines sauvages, prohablement ruinées, s'y
rncltre
it
la mcrci de la miscre et du froicl; que