"' PASSAGE DU NIÉMEN. -
JANV!En
1812.
l5ti
les Jettres que le général Rapp lui avait écrites,
en les accompagnant de ces paroles remarc¡ua–
bles: "Je me souvicns en eITct, Sire, qu'en1809,
" sans les miracles de Votre
~lajesté
¡,
Ratis-
1t
bonne, notrc situation en Allcmagnc cUL
été
n
bien difficile!
)1
C'élaient la les véritcs bien tristes pour nous,
qui, vcnant s'ajoutcr au sentimcnt de
lc11rs
forces réellcs, inspiraient aux Russes la con–
finnce d'entreprcndre une lulle formidable. lis
se disaient done que si Ja guerre olTrnit de
cruelles chances, elle en présentait d'avanta–
geuscsaussi; que siNapoléon,commeCharlesXI1,
rcncontrait en Hussie les plaincs de Pultawa,
l'Allcmagnc cntii':rc se soulcverait sur ses dcr–
rieres; que les princcs alliés scraicnt forcés par
lcurs peuplcs de se détachcr de son alliancc; que
la Polognc cllc-memc accueillcrait l'idéc de se
1·cconstituer autrcmcnt que par la main de
Nnpoléon, et que Ia Francc, épuisée de sang,
fatiguée des sacrifices que lui coúlait une ambi–
tion sans bornes et snns objct raisonnablc, ne
ferait plus les elTorts dont en d'autres temps
die s'était montrée capable pour· soulenir sa
grandeur.
Ces rootiís confirmaicnt Alcxandrc dans la
résolulion de mettre les torts du cóté de Napo–
léon, de n'cn mctlre aucun du sic11, de ne pas
prendre l'initiativc de l'agrcssion, de borrlcr le
Niémcn Stins le dépasser, et, dans une atlitudc
formidable, mais réservéc, d'atlcndre l'cnnemi
sans aller le chcrchcr. Cellc conduite lui scmblait
de lout point la mcillcure, militairemcnt et poli–
tiqucment, sans comptcr qu'en agissant ainsi on
sauvait la dcrnicre chance de la paix, car il élait
toujours possiblc qu'au dcrnier moment une
négociation hcureuse rit lomber les armes des
mains de tout le monde. Ce systcmc rut poussé
au point de laisser
a
l'cnnemi l'initiativc de lous
les acles évidcmment provocaleurs, commc le
départ de la garde impérialc, el celui de l'Empe–
reur pour l'arméc. Ainsi on résolut <le ne fairc
partir la garde impériale russc de Saint-Pélers–
bourg, que lorsquc la gardc impérialc frangaisc
serait parlie de Paris, et Alexandrc lui-mcmc
projela de ne quittcr
sa
capilalc qu'aprcs que
Napoléon aurait quitlé la sicnnc. On vcl'l'a plus
tard qu'en ce dernicr jioint seulcrncnt il ne lint
pasa son systcmc jusq\•'au boul.
La diplomatic Cut <lirigée dnns le memc scns.
Évidemmcnt il n'yavait rien
a
cspérer<le laPrussc
11i de l'Aulriehe. Tout ce qu'on pouvait obtenir
deces puissances,c'était la ncutralité,si loutcfois
Napoléoo la lcur pcrruetlait; mais quant a une
coopération de lcur part,
il
n'y fallait pas songer.
Cepcndant il y avait des allianccs qui s'olTraicnt
nvcc ardeur, nvcc importunité prcsquc, c'étaicnt
ccllc de l'Angleterrc, et, le croirait-on? cellc
Je
la Sucde. L'alliance de l'Anglcterrc élait nalu–
relle, légitimc, et clic était inévilablc au prcmicr
coup de canon liré entre la Fraucc et la·Hussic.
Le eabinet anglais, dans son impat,icncc de la
noucr, avait choisi le prétcxlc d'unc dcmnn<lc de
salpélre adrcsséc par la Russic au comrncrcc
ncutrc, pour cxpédicr sur Riga une douzainc
de Mtimenls chargés de poudrc. Puis clic avait
envoyé en Sucdc un agcnt, M. Thornlon, qui i1
la moindre espéraocc <l'étrc accucilli devait se
jetcr dans le prcrnicr port 1·ussc qui lui scrait
ouvcrt. En allendant,M.Thornlon dcvait cssaycr
aSlockholm des'abouchcr avce la légation
l'USSC,
en se sc1·vant <lu cabinet suédois pour foire
agrécr ses ouvcrturcs.
Hicn, il faut le répéter, n'était plus natu1·cl
que cette impaticll<·c du cabinet brilannique,
on peut dirc sculemcnt qu'cllc élait trop pétu–
lante, et qu'cn se 111cttant si tót en avant, clic
s'exposait
á
rapprochcr, si un rapprochemcnt
élait possiblc eneore, ccux qu'cllc voulait pour
jnruais désunir. Mais la Sucdc, ou, pom· parlc1·
plus exaetement, le princc qui devait
ii
la F1·ancc
d'etrc monté sur les marchesdu troncdc Sucde,
s'cmployait avec passion ;, nous chcrcher drs
cnnemis,
U
noucr des nllinnccs contrc
11ous! c'cst
ce qui a licu d'étonncr, de révollcr mcmc lout
cccur bonncte, et c'cst pourlanl ce qui se voyait
dans le momcnt' et ce qui dcvait ctrc une des
parties les plus frappanlcs du tablcau cxtraor–
dinaire olTcrt. alors aux ycux du monde.
Le princc Dcrnadotle, élu hérit.icr clu . trónc
de Sucde on n vu comrnent, a quellc oecnsion,
dans qucllc intcntion,venait de se constilucr dé–
finitivcment l'ennemi le plus actif et le moins
déguisé de Napoléon. Le rcfus de la Norwégr,
acle si honnélc d'unc politiquc qui ne l'éiait
pas toujours, le silencc dédaigncux prcscril
il
la
légation
frnnQaise,avaicnL révcilléclansson
CCCUl'
la vicillchainc qu'il no11r1·issait contrc Napoléon,
et
cctLc hainc, le
croirait-on?avaiL
pour principc
l'cnvie. Envicux par
naturc,
il
osait jalouscr
celui
qui aurait
du
ajamais rcstcr hol'Sde portéc
JlOUI'
son cnvie, lanl la supériorité de gloire el de si–
luation mcllait legénéral Donapartehorseletoutc
comparaison avec le genéral Dcrnadolle. Que ce
dcrnicr jalousul Morcau, Masséna, Laoncs, Da–
voust, c¡uoique mille foissupét,ieurs 11 lui,on l'au-