DRESDE ET VITTORIA. -
J
IN
1815.
8!S
ciens sénateurs, les officiers ou s.oldats de la
Iégion banséatique, les fonctionnaires de l'insur–
rection qui n'auraient pas eu le temps de s'éva–
der, et puis de dresser une liste des cinq cents
principaux négociauts pour prendre leurs biens,
et
'Cl:éplacer la p1·opriété,
avait-il dit. 11 avait
compté, en donnant ces ordres, sur }'inexorable
rigueur du marécbal Davonst, mais aussi pour
J'honneur de tous deux, sur le bon sens et la pro–
bité de ce maréchal. Celui-ci était arrivé quelques
jours apres le général Vandamme, n'avait pas
trouvé un scul délinquant
a
fusiller, et s'y était
pris, du reste, de maniere
a
n'en trouver aucun.
La frontiere du Danemark placée aux portes
memes de Ja ville, l'avait aidé
a
sauver tout le
monde. Quelques exécutions regrettables avaient
eu Jieu antérieurement, mais c'était lors du pre–
mier mouvement insurrectionnel du mois de
février, et en punition des indignes traitements
exercés contre les fonctionnaires franc;ais.
Le maréchal fut done assez hcureux pour n'a–
voir personne
a
fusiller.
JI
restait
a
dresser des
listes de proscription, qui n'entraineraient pas
la perte de la vie, mais celle des biens, et cette
mesure ne lui semblait pas plus sage que l'autre.
Les Hambourgeois coupables, ou supposés tels,
étaient en masse dans la petite ville d'Altona,
véritable faubourg de la ville de Hambourg, de–
mandant
a
revenir dans leurs demeures,
a
charge
au Dauemark qui ne voulait pas etre compromis
avec la France, et faisant faute
a
celle-ci, qui
désirait et pouvait tirer d'eux de grandes res–
sources, ce qui était plus profitable que d'en
tirer des vengeances. Le maréchal Davoust repré–
senta
a
Napoléon qu'il valait mieux pardonner
a
ceux qui rentreraient dans un temps prochai n,
leur imposer pour unique cbatiment une forte
contribution, qu'ils se diraient d'abord incapa–
bles de payer, qu'ils payeraient ensuite, se bor–
ner ainsi
a
leur faire peur, et les punir par un
coté tres-sensible pour eux, tres-utile pour l'ar–
mée, !'argent. Pas de sang et de grandes ressour–
ces,
fut
Je résumé de la politique qu'il conseilla
a
l'empereur.
Napoléon, qui avait le gout des grandes res–
sources et pas du tout celui du sang, accepta
cette transaction. -
Si le lenderna·in de votre
entrée,
écrivit-il au maréchal Davoust,
vous en
eussiez fait fusitler quelques-uns, c'eítt été bien,
maintenant c'est trop tard. Les punitions pécu–
niaires valent mieux .
-
C'est ainsi que le despo–
tisme et la guerre babituent ]es hommes
a
parler,
meme ceux qui n'ont aucune cruauté dans le
creur. Il fut done décidé que tout Hambourgeois
rentré dans quinze jours scrait pardonné, que les
autres scraient frapp és de séquestre, et que la
ville de Hambourg acquitterait en argent ou en
matieres une contribution de cinquante millions.
Une petite parlie de cctte contribution dut peser
sur Lubeck, Breme, etles campagnes de la
52e
divi–
sion militairc . Dix millions durent etrc soldés
comptant, vingt en bons
a
échéance. Quant au
surplus,
il
fut ouvert un compte pour payer les
chevaux, le blés, les riz, les vins, les viandes
salées, le bétail, les bois qu'on allait exiger de
Hambourg, de Lubeck et de Bremc. Sur le
meme compte devait etre porté le prix de toutes
les maisons qu'on allait démo1ir pour élever les
ouvrages défensifs de Hambourg. Les Hambour–
geois se plaígnirent beaucoup, voulur';)nt présen–
ter leurs doléances
a
Napoléon, qui
rcfu~a
de
les recevoir, et cette fois trouverent inffexible le
maréchal qu'ils avaient eu pour défen ·eur quel- .
ques jours auparavant. lis ayquitlerent néan–
moins la partie de Ja contribution qui dcvai,t etre
soldée sur-le-champ, oit en argent, soit en
matiercs. C'était ce qui importait le plus aux
besoins de l'armée. Dix millions cnviron furent
envoyés
a
Dresde ; de grandes quantités de
grains, de bétail, de spiritueux furent embarqués
sur l'Elbe pour le remonter.
Des que Napoléon se vit en possesBion de ces
ressources,
il
en disposa de maniere
a
se pro–
curer sur tous les points du fleuve et parLiculie–
rement
a
Drcsde, de quoi nourrir les nombreuses
troupes qu'il allai t
y
concentrer. 11 voulait avoir
a
Dresde, centre principal de ses opérations, de
quoi entretenir trois cent mille hommes pendant
deux mois, et notamment une suffisante réserve
de biscuit , laquelle portée sur le dos des soldals
pcrmettrait de manreuvrer sept ou huit jours de
suite sans ctre retenu par la considération des
vivros. Il fallait pour cela cent mille quintaux de
grains ou de farine
a
Dresde, huit ou dix mille
a
Krenigstein . Il s'en trouvait environ soixante-dix
mille
a
Magdcbourg, qu'on avait mis Lout l'hiver
a
réunir dans celte place, soit pour l'approvi–
sionnemcnt de siége, soit pour suffire
a
l'entre–
tien des troupes de passage. Napoléon ordonna
que ces soixante-dixmille quintaux fussent trans–
portés par l'Elbe
a
Dresde, et remplacés immé–
diatemcn t par une quantité égalc tirée de Ham–
Lourg. Grace
i1
eette combinaison, ces masses
immenses de dcnrées n'avaient que la moitié du
chemin
a
parcourir. On s'était aperc;u que la
chaleur et la fatigue donnaient la dyssenterie
a