LUTZE ET BAUTZEN. -
MAI
1b!5.
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instances de M. de Muflling, Blucher ordonna
a
quelques bataillons de Kleist et a deux de la
garde royale de quitter ses derricrcs, et d'uller
reprendre Preititz.
Eífectivement ces bataillons rcbrousserent
chemin, donnerent tete baissée sur Preititz, y
trouverent la division Souham qui n'était passur
ses gardes, et Jui enleverent ce village ainsi que
le pont du Bloesaer-\Vasser. Ney, surpris de cette
brusque
atlaque~
revint
a
la charge avec sa
seconde division, passa
a
son tour sur le corps
des bataiJJons prussicns, et rentra dans le vilfage
de Preititz. Ce village reconquis, il fallait mar–
cher devant soi, raJlier Lauriston par Ja gauche,
et, suivi de Reynier, tourner Ja position de Blu–
cher, recevoir en carré, comme on l'avait fait tant
de fois, les masses de
la
cavalerie prussieone,puis
gravir les pentes que défendaitBarclay de Tolly,
et aller couper les routes de Würschen et de
Hochkirch, qui devaient servir de retraite a l'aile
-droite des coalisés. On eut pris la 25 mille Prus–
siens et 200 bouches
a
fcu, et dissous la coalition.
Le général Jomini, chef d'état-major du corps
de Ney, adressa de vives instances
a
l'illustre
maréchal ponr qu'il en agit ainsi, mais celui-ci
voulut attendre que les détonations de l'artille–
rie, qui venaient seulement de se faire entendre
sur sa droite, fussent plus proooncées et plus
proehes, et qu'il fllt moins isolé sur ce champ de
hataille si vaste, si compliqué, dont il n'avait
aueune connaissance.
Cependant
il
en avait fait assez pour rendre
intenahle la position de l'ennemi. Napoléon, im–
patient de commencer l'attaque, mais ne cédant
jamais
a
sesimpatiences surle champ de bataille,
n'avait ordonné Je feu de son coté que lorsqu'il
avait jugé l'événement mur. En elfot, le général
Bertrand protégé par l'artillerie de Ja rive gauche
de la Sprée avait gravi les escarpements de la rive
droite, et était parvenu
a
déboucher en face de
Blucher. Celui-ci, adossé aux mamelons hoisés
dont nous avons parlé, avait na droite
a
ces ma–
melons, sa gauche au Bloesaer-Wasser et au vil–
lage de Kreckwitz, son infanterie
a
ses deux
ailes, sa cavalerie au milieu, et une loogue ligne
d'artillerie sur son front. Le général Bertrand
était venu se déployer devantlui, la division Mo–
rand
a
gauche, la division wurtemhergeoise
a
droite, la division italienne en réserve. Entre la
position du général Bertrand et Ja ville de Bautzen
se trouvaient Marmont, la garde et Macdonald,
souhaitant avee ardeur l'ordre d'entrer en action.
A peine;le canon de Ney avait-il reten ti sur les
derrieres de Bluchcr, que Napoléon s'était em–
prcsséde donoer Je sigoaL l\farmont, ayant outre
son artillerie toute celle dela garde, avait ouvert
un feu eífroyable sur les redoutes du centre qui
élaient devant lui, puis avait dirigé une partie
de ce
f
cu un peu obliquement sur Kreckwitz et
le flanc de Blucher, dont Ja position était ainsi
devenue fort difficile.
Aprcs quelques instants de cette canonnade,
Bertrand se meltait en mouvement pour aborder
la ligne de Blucher, lorsqu'il vit Ja eavalerie prus–
sienne fondre sur lui au galop. l\fais la division
l\forand la rec;ut en carré, sans en etre ébranlée,
la repoussa
a
eoups de fusil, puis se porta en eo–
lonnes <l'attaque sur Bluchcr. Pendant ce temps
la division wurtembergeoise s'avanc;ait sur Kreck–
witz, qui était dans le coudedu Bloesaer-"\Vasser,
sur le flanc des mamelons boisés. Le canon de
Marmont avait tellemcnt ébranlé les troupes qui
gardaient Kreckwitz, qu'un bataillon wurtem–
bergeois s'y élanc;ant avec vigueur parvint
a
s'en
cmparer. Blucher voyant son front menacé, attira
a
Jui sa seconde division, ecJle de Ziethen, et la
porta en ligne pourl'opposerau corpsdeBertrand.
Cette division trouva Morand tres-ferme
a
son
poste et ne le fit point reculer, mais elle gagna
du terraio sur la division wurtembergeoise, et
dépassant Kreckwitz enle".a le bataillon qui s'était
emparé de ce village. Marmont alors redoubla
son feu oblique sur Kreckwitz, tandis que Mo–
rand' de la défensive passant
a
l'attaque, fit plier
la division ZieLhen, et la poussa sur les mamelons
qui servaient d'appui
a
Blucher. 11 aurait fallu
en ce moment que Blucher put attirer
a
lui toute
la garde royale prussienne, Je corps de Kleist ef.
une partie des forces russes. Mais
a
toutes ses
demandes de secours on répondit que ces troupes
étaient occupées
a
disputer Preititz sur ses der–
rieres, qu'elles l'avaient meme perdu, et que s'il
ne se retirait bien vite, loin de s'ohstiner
a
dé–
fcndre la positioo que tout
a
l'heure il appelait
les Thermopyles de l'Allemagne,
il
allait etre pris
avee son corps d'armée par Je maréchal Ney.
Devant I'évidenee de ce danger, que M. de
Muffiing cut quclque peine
a
lui faire compren–
dre,
il
se déeida, le désespoir au creur,
a
battre
en retraite, ayant bonne envíe de se plaindre de
Barciay de Tolly, qui, disait-il, n'avait pas pro–
tégé ses derriercs, mais ne l'osant p!ls, et s'en
dédommageant par mille invectives contre l'état–
major russe, qui avait inutilement accumulé dans
les montflgnes des forces dont on aurait eu grand
besoin sur Ja droite des alliés. Bluchcr se retira