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LIVRE QUARANTE-HUITJEME.
gulier, et si par hasar<l ce ne scraít pas une prcuve
que la cavalcrie
frnn~aisc.
réorganisée, étaitenfin
arrivée sur le champ de bataillc. Bientót aprcs
on sut que cct uniforme jaune était celui d'un
postillon saxon, dont. Napoléon se servait pour
se fairc indíquer l'emplacement des villages dont
les noms étaient inscrits sur sa carte.
1\f
ais déja une effroyable canonnade remplissait
de ses retentissemenls la vaste étendue de ce
ch~mp
de baLaille. Le maréchal Oudinot,
a
notrc
droite, étaitsur les hauteurs du Tronberg, qu'il
avait conquises Ja veille, et les disputait aux
Russes de Miloradovitch qui s'effor<:aient de les
luí reprendrc. Au centre, l\'Iacdonald, Marmont,
immobilcs, ayant entre eux les carrés de la garde,
et derriere eux la cavalerie de Latour-l\faubourg,
attendaient les ordres de Napoléon, qui lui–
meme attendait le succcs de la manceuvre confiéc
au maréchal Ney. Le général Bertrand
a
gauche,
achevant le passage de la Sprée commencé la
veille, gravissaít avec ses trois divisions l'escar–
pement de la rive droite, protégé par l'artillerie
de la rive gauehe. l\fais c'était
a
deux licues au–
dessous, c'est-a-dire a Klix, que se passait l'évé–
nement décisif de la journée. Le maréchal Ney
venait effectivement de franchir la Sprée sur ce
point, et de rcfouler les avant-postes de Barclay
de Tolly.
Arrivé au dela de la Sprée,
il
avait asa droite
les revers des mamelons occupés par Blucher, et
les étangs qui longeaient le pied de ces mamelons,
devant lui le moulin
a
vent ou était établi Bar–
clay de Tolly, et
~
gauche les bords marécageux
du Bloesaer-Wasser. 11 marcha directement et
réso!Ument sur le moulin
a
vent. A droite
il
dé–
tacha vcrs Pliskowitz l'une des troís divísions du
corps de Lauriston, celle que commandait le géné–
rnl l\iaison, pour essayer de gravir les mamelons
qui étaient couverts d'artillerie et d'uniformes
prussiens.
A
gauche
il
dirigea les deux autres
divisions du général Lauriston, sous ce général
luí-meme, pour passer le Bloesaer-Wasscr au–
dcssous de Gleine, et déborder ainsi la position
de l'enncmi.
En mouvement des le matin, ayant passé la
Sprée
a
Klix de tres-bonnc heure,
i1
aborda éga–
lement de tres-bonne heure la position occupée
par Barclay de Tolly. Ce dernier luí lan<:a force
boulets, car il avait plus de canons que de soldats.
Obligé en cffet de garder une Iigne fort étcndue,
du pied des mamelons ou étaitBluchcrjusquc vers
les vastes prairies que traversait le Bloesaer–
Wasser,
il
n'avait au moulin meme que cinq a
six mille hommes. l\fais des boulets n'arretaient
pas le maréchal Ney. 11 continua de s'avancer sur
le moulin a vent, et, tout énergique qu'était Bar–
clay dé Tolly, parvint a le culbuter. Barclay
avait en ce momcnt a ses cotés
1\1.
de Muffiiog,
qui avait tant insisté pour attirer sur cette partie
de la position l'attention d'Alexandre, et, apres
l'avoir rend u témoin de sa résistance et de ses
périls, il le dépecha aupres de Blucher pour
demander du secours. Craignant, s'il s'obstinait
en avant du Bloesaer-\>Vasser, d'y etrc refoulé
en désordre, il le repassa a Gleine, et alla s'éta–
hlir sur le pencbant des hauteurs qui remplis–
saient le fond du champ de bataille pour disputer
aux Frarn;:ais les rou.tes de Würschen et de Hoch–
kirch, que toute l'armée coalisée devait suivre
en se retirant. 11 y rencontra les troupes de
Lauriston qui vinrent le harceler, mais contre
lesquelles l'avantagc des lieux lui permettait de
se défendre.
Ney, apres avoir enlevé le moulin a vent, re–
monta un péu
a
droite pour prendrc a revers les
mamelons ou il avaitaper<:u la masse des troupes
prussicnnes, et se trouva devant Je village de Prei–
titz, qui était situé sur le Bloesaer-Wasser, juste
au point ou ce ruisseau, aprcs avoir tourné der–
riere la position de Blucher, se redressait pour
déboucher dans la plaine. Il
fit
emporter ce vil–
lage par la division Souham, et, une fois la, eom–
men<:a de concevoir quclques
dout.essur ce qui
luí restait
a
faire. Il apercevait bien daos le fond
le clocher de Hochkirch, but assigné
a
ses efforts;
mais ayant devant luí des masses profondes de
cavalerie, auxquelles
il
n'avait qu'un peu de ca va–
lcrie légere
a
opposer, ayant a gauche Barclay
de
T~lly
dans une position avantageuse,
a
droite
les mamelons occupés par Blucher, séparé de
Napoléon par une distance de trois lieues, et
par des collines boisées, ce héros, qui éprouvait
quelquefois, eomme nous avons eu déja l'occasion
de le dire, des hésitations d'esprit, jamais de
cceur, s'arreta pour écouter le canon du reste de
l'armée, et ne pas s'engager trop vite.
Pendant ce temps arrivait le secours destiné a
Barclay de Tolly, que M. de Mufiling avait eu
beaucoup de peine a ohtenir de l'incrédulité de
Blucher et de Gneisenau. Ces deux deruiers en
effet, lorsque M. deMuffiing parvint aupresd'eux,
étaient occupés
a
débiter des harangues patrioti–
ques aux troupes prussiennes, a leur parler de
ces Thermopyles germaniques ou l'on devait
mourir, et ne voulaient pas eroíre qu'ils fussent
menacés d'etre pris
a
revers. Pourtant, sur les