LUTZEN ET BAUTZE':N. -
lllAt
1813.
57
J\'larmont avait
a
sa gauche, sur quelques mamc–
Ioós boisés, .Blucher lui-meme avec 20 mille
hommes, et en arríere
a
droite la ville de Bautzen,
qui n'était pas encore prise. Il ne songeait done
pas
a
eb·tamer la seconde position des coalisés, et
tout ce qu'il désirait, c'était de se mainteni1· sur
le terrain qu'il avait conquis. Il
fit
bonne eonte–
nance, et admirablement secondé par ses trou–
pes, il résista
a
toutes les attaques dés Prussiens.
Le général Kleist sortit de Bazankwitz _sur sa
gauche pour l'aborder.
a
la ba!onnette, mais le
général Bonnet avec les marins supporta la
charge, et la repoussa victorieusement. Au meme
instant la cavalerie de Blucher fondit sur cette
brave troupe, qui était déja aux prises avec l'in–
fanterie prussienne. Le
57e
léger et le
4c
de ma–
rins Ja rei;urent en carrés, avec une fcrmeté
imperturbable. Tandis qu'il se maintenait de la
sorte, le maréchal Marmont, pour ne pas avoir
Ji
dos la ville de Bautzen, qui était attaquée mais
point enlevée, détacha Ja divison Compans sur sa
droite, laquelle trouvant une partie des murs de
Ja ville de Bautzen plus accessible, les escalada,
et en facilita l'entrée aux troupes du maréchal
l\faedonald. Sur ces entrefaites le général Ber–
trand, au-dessous du maréchal Marmont, fran–
chissait la Sprée
a
Nieder-Gurck, au pied des
mamelons ou était campé Blucher. 11 avait d'a–
hord réussi a traverser la Sprée, qui dans cet
endroit se
divise.enplusieurs bras marécageux,
mais quand il lui avait fallu gravir la berge
élevée de la rive droite, et déboucher en pré–
sence du corps de Blucher, il avait du s'arreter,
car il se trouvait devant une position extreme–
ment forte, défendue par tout ce que l'armée
prussienne renfermait de plus énergique. Toute–
fois
il
a-vait lui-meme occupé un mamelon sur la
rive droite de la Sprée, et y avait Iogé un régi–
ment, le 25e, qui devait y etre protégé par toute
l'artillerie que nous avions sur la rive gauche. 11
était six heures du soir, et la premiere ligne de
l'ennemi était tout entiere tombée dans nos
mains. A droite, ' le maréchal Oudinot avait
franchi Ja Sprée et enlevé aux Russes la montagne
dite de Tronberg ; au centre Je maréchal Macdo–
nald avait enlevé le pont de pierre de Bautzen,
ainsi que la ville elle-meme, et le maréchal
l\farmont, apres avoir franchi la Sprée, avait pris
pied au bord du ruisseau ou
commen~ait
la se-
1
Sur les Iieux memes que j'ai visités récemment cncore, ce
ruisseau ne porte aucun nom que celui qu'on donne
a
la plu–
part des ruisseaux dans lous les pays,
ruissemt
du
moulin;
mais, sur un plan allemand fort détaillé et fort bien fait, dont
conde Iigne de l'ennemi;
a
gauche cnfin le gé–
uéral Bertrand s'était assuré un débouché au
dela de la Sprée, en face des mamelons occupés
par Blucher, et formant Je point le plus impor–
tant de la seconde position. Le résultat auquel
nous aspirions était done obtenu, et sans de trop
grandes perles. Certainemcnt, si l'ennemi cut
moins compté sur sa seconde Iigne,
il
etit pu
nous dispu ter Ja premiere avec encore plus de
vigueur. 11 l'avait néanmoins vaillamment défen–
due~
et nous avions glorieusement surmonté sa
résistance. Ce premier acte était terminé selon
nos désirs, et le maréehal Ney arrivant au meme
instant
a
Klix , tout promettait un égal succes
pour Je Jendemain, bien que la journée s'an–
non1tat comme plus difficile, par cela scul qu'elle
devait etre décisive.
Napoléon entra dans Bautzcn
a
huit heures du
soir, rassura les habitants épouvantés, et ·vint
eamper en dehors, au milieu de sa garde formée
en plusieurs carrés. 11 disposa tout pour l'attaquc
du lendemain
21.
Du .tcrrain qu'on avait conquis en passant la
Sprée, on pouvait se faire une idée plus exacte
de la seconde position qui restait a emporter.
(Voir la carte n°
o9.)
Le ruisseau qui en formait
le principal linéament , appelé le Bloesaer–
Wassert, du nom de l'un des villagesqu'il traver–
sait, sortait des sombres montagnes de la droitc,
et apres s'etre fait jour
a
travers leurs contours
abrupts, longeait Je plateau sur Jeque) s'élevait
Bautzen, en baignait Je pied, coulait parmi des
saules et des peupliers en contre-bas de Nadel–
witz, de Nieder-Kayne, de Bazankwitz, villages
en face desquels s'était placé la veille le maré–
chal l\Jarmont, puis, arrivé
a
notre gauche,
a
la
hauteur du víllage de Kreckwitz, tournait en
arriere des mamelons boisés sur lesqucls Blucher
avait pris position, suivait leur revers en rétro–
gradant jusqu'a Klein-Bautzen, passait ainsi der–
riere ces mamelons, tandis que la Sprée passait
par dcvant ' les quittait
a
un village appelé
Preititz, et s'en allait enfin se confondre avec Ja
Sprée a
trav~rs
lavaste plaine, melée de prairies
et d'étangs, dont nous avons parlé.
La gauche des Russes, composée des anciens
corps de l\'Iiloradovitch, de Wittgenstein et de la
division du prince Eugene de Wurtemberg,
s'était repliée sur !'une des montagnes élevées,
il existe un exemplaire au dépót de la guerre,
iI
porte le nom
de
Bloesacr- lVasser,
que j'emploíe iei pour Je désiguer plus
facilement dans le cours de mon récit.