LtJTZEN ET BAUTZEN. -
MAI
i8i3.
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de chef d'état-major de Blucher, tenait tout haut
contre Je projet d'un armistice un langage des
plus violents, et qui pouvait etre dangercux avcc
des tetes aussi vives que cclles des officiers prus–
siens. Pourt¡mt la nécessité de suspendre les
hostilités était impérieuse, et l'on convint d'en–
voyer des commissaires au quartier général
franc:;ais, afin de négocier un armistice. En meme
temps onessaya d'agir sur les esprits les plus exal–
tés, en leur promettant de ne poser les armes que
pour les reprendre bientót, et lorsqu'on les au–
rait reprises, de ne plus les quilter qu'apres 1a
destruction de I'ennemi commun. On ne s' tint
pas
a
I'envoi des commissaires au quartier gé–
néral, on
fit
partir M. de Nesselrode pour Vicnne.
11 devait
y
exposer les dangcrs que couraient
les puissances bclligérantes, l'impossibilité pour
elles de se tenir plus longtemps attachées
~1
Ja
Bohcme, et, si le cahinet de Vienne ne prenait
immédiatement son parti, la vraisemblance d'une
retraile forcéc en Pologne, Jaquelle entrainerait
infailliblement la dissolution de la coalition, et
Ja perte pour l'Autriche d'unc occasion unique
de sauver l'Europe et elle-meme. 11 était armé
d'un stimulant puissant, c'était la menace d'un
arrangemcnt direct de Ja Russic avec la France,
arrangement direct que l'empereur Alexa ndre
avait repoussé noblement, mais qu'il dépendnit
de lui de négocier en quelques hcures, car il
n'avait pour cela qu'a laisser pénétrer M. de
Caulaincourt jusqu'a lui. Du reste, la seule appa–
rition de ce noble pcrsonnagc aux avant-postes
avait agi déja sur le cabinet autrichien, et
l\f.
de
Nessclrode en arrivant
a
Vienne dcvait trouver
tout produit l'effet qu'on attendait de cet argu–
ment. Pour seconder M. de Nesselrode, M. de
Stadion avait écrit de son coté, les Prussiens du
leur, et tous s'étaient servis de M. de Caulain–
court comme d'un épouvantail qui devait amener
le cabinet de Viennc a se décider tout de suite.
M. de Nesselrode partil done pour la capitale
de l'Autriche, tandis que le général de Kleist au
nom des Prussiens, le général comtc de Schou–
·valoff au nom des Russes, se rendaient aux
avant-postcs frarn;ais. lis
y
arriverent le 29 mai
a
dix heures du matin. Jls furenL rcc:;us par le
princc Berthier, qui en référa sur-le-champ
a
I'Empereur.
Celui-ci, étant cngagé par les r éponses qu'il
avait faites, ne pouvait pns r efuscr de négocicr,
bien qu'il cut intéret a battrc une derniere foi s
les coalisés, et a les pousser en désordre sur
la
Vis tul~,
loin de l'Autriche, qui ne <leviendrait
certainement pas lcur alliée, s'ils étnient rejetés
si Join d'clle. Pourtant l'état de sa cavaleric., Je
désir d'avoir achevé la seconde série de ses ar–
mements, afin de tenir tete meme a l'Autrichc,
et de ne conclure que Ja paix qu'il voudrait,
l'espérance d'etre pret en deux mois, et de rc–
prendre alors ses opérations victorieuscs aprcs
avoir échap pé aux grandes chaleurs de l'été, Je
disposaient assez a une suspension d'armcs. 11
consentit done au principe d'un armistice, parce
qu'il était lié en quclque sor te, parce que le refus
aurait eu une signification trop pcu pacifique, et
surtout parce qu'il se flattait d'avoir le temps de
redevenir par ses armements Je maltre des con–
ditions de la paix. Mais
il
entendait gardcr, par
les arrangements temporaires dont on allait con–
venir, la Silésic jusqu'a Breslau, et la basse
Allemagne jusqu'a l'Elbe, Hambourg et Lubcck
compris, que ces villes fussent ou ne fusscnt pas
reconquises par les troupes franc:;aiscs. De plus, il
voulait que l'intcrruption des opérations rnili–
taires durat deux mois au moins, et que pcndant
toute la durée de cette interruption les garnisons
de ses places de l'Orler et de la Vistule ne man–
geassent pas leurs vivres, mais fussent ravitail–
lécs
a
prix d'argent.
l\f.
de Caulaincourt, l'épou–
vantail de l'Autriche, fut cnvoyé a Gebersdorf
Je 50 mai, entre les deux armées, afin de traiter
sur les bases que nous venons d'indiquer.
JI
trouva les commissaircs prussiens et ru sses
fort animés, affectant de l'ctrc encore plus qu'ils
ne l'étaient, bcaucoup trop orgucilleux pour lcur
situation , fort polis toutefois enYcrs l'ancien am–
bassadeur de France en Russie. M. de Cau lain–
court put voir aussi que le sentiment d'une cause
juste était d'un grand secours dans les défaites,
et que Napoléon aurait une violente lutte
a
sou–
tcnir, s'il persistait a ne ricn cédcr
a
l'E urope.
Les commissaires se montrcrcnt presque fi xés
sur les trois points qui suiven t. lis ne voulaient
pas aba ndonncr pendant l'armisticc Brcslau, de–
vcnu la scconde capitale des Prussicns; ils ne
voulaicnt pas davantage nous concéder l'occupa–
tion de Hambourg, car c'était établir d'avance
un préjugé en faveur de
la
réunion définitivc des
villes hanséatiques a la Frunce, et en fin ils cnten–
daicnt ne donner qu'une durée d'un mois a
l'armistice. M. de Cnulaincourt cut sur ces trois
points une conférencc qui dura dix hcures, et
parut n'avoir ríen gagné apres une discussion
aussi longue. ll en r éféra
a
l'Empcrcur, qui était
a Ncum::irkt., aux portes de Brcslnu, et avait eu
ln prudcncc, trop rarc ch cz lui , de ne pas entrer
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