LUTZEN ET BAUTZEN. -
J UIN
1.8!5.
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On avait done réexpédié sur-le-champ
M.
de
Bubna fO,ur le ·quartier général
fran~ais,
avec c;es
deux
mo~ificatio~s,
qui étaient
~n
cffet fort im–
portantes, et l'cmpereur
Fran~ois
avait adressé
une nouvelle lettrc
a
Napoléon, dans Jaquelle,
répondant
a
la priere que celui-ci Jui avait faite
de soigner son honneur,
i1
disait ces mots : Le
jour ou
~vous
ai donné
~a
filie, votre bonneur
est devenu le mien. Ayez
confia~ce
en moi, et je
ne vous demandera{ rien dont votre gloire ait
a
souffrir. - A 'ious ces témoignagcs,
l\'I.
deBubna
dev~if
ajouter la déclaration formelle que l'Au–
triche n'était
encor~
engagée avec personne, et
que si Napoléon acceptait les conditions de paix
ainsi
modi~ées,
el1e était prete
a
se lier avec Jui
par de nouveaux articles joints au
tra~
d'alliance
du 14 mars 1812'.
Tefles étaient les dispositions de Ja cour de
Vienne Jorsque
l\'I.
de Bubna s'était remis en
route, et elles étaient sinceres,
e.ara
ce moment
l'Autrichen'avait pas cncore cntendu parler d'ar–
rangement direct entre Ja Russie et la France; elle
n'avait done ni mécontentement, ni raison parti–
culiere de se hater, et elle offrait ces conditions
parce qu'elle était assurée de les faire agréer
a
la
Russie et
a
la Prusse par la seule menace de
s'unir
a
Napoléon.
l\f.
de Bubna, ayant fait dili–
gence, était
arriv~
Je 50 mai
a
Liegnitz, aupres
de M. de Bassano, et avait Jonguement exposé
les propositions qu'on l'avait chargé de faire.
Malgré la froideur de
l\f.
de Bassano , il les avait
exposées avec bonne foi, et avec la chaleur d'un
homme qui désirait réussir, pour son pays d'a–
hord, et aussi pour sa gloire personnelle. l.'\'J. de
Bassano rendit compte sur-le-champ, et par éerit,
de cette conférence
a
Napoléon, sans dire un.
seul mot pour appuyer ou eombattre des propo–
sitions dont le rejet est le plus grand malheur
qui soit jamais avenu
a
la France.
Certes une parei1le nouvelle aurait du sembler
bien bonne
a
Napoléon, car
il
dépendait de lui
de terminer sa Jongue lutte avec l'Europe, et
de la terminer en obtenant un empire magni–
fique, en obtenant surtout la paix maritime, qui
par l'effet qu'elle devait produir-e aurait couvert
bien suffisammcnt le sacrifice de Hambourg et
de la Confédération du Rhin. l\folhcureusement
cette communication )'irrita au lieu de le satis–
faire. Il
y
vit la résolution de l'Autriche d'inter–
venir immédiatement, ce qui était vrai, et de ne
pas laisser prolonger les hostilités sans imposer
son arbitrage. Or, il fallait, ou qu'il consentit
a
des conditions dont il ne voulait
a
aucun prix,
meme modifiées, ou qu'il courut la chance d'avoir
a
l'instant meme l'Autriche sur les bras, et
il
ne
pouvait etre en mesure de faire face
a
ce nouvel
cnnemi que sous
deu~
mois. Ce fut done le coup
d'éperon qui ledécida
a
cédersurquelquespoints
contestés dans l'armistice. Au lieu d'etre accom–
modant avec l'Autriche, qui lui demandait des
sacrificcs définitifs, il 'le devint avec la Prusse et
Ja Russie, qui n'cxigeai nt que des sacrifices pro–
visoires. 11 écrivit
a
M. de Bassano en chiffres :
Gagnez du temps, ne vous expliqucz pas avec
l\f.
de Bubna, emmenez-lc avec vous
a
Dresde,
et retardez Je moment ou nous serons obligés
d'accepter ou de refuser les propositions autri–
chiennes. Je vais conclare l'armistice, et alors
Je lcmps dont j'ai besoin sera tout gagné. Si
pourtant on persiste
a
exigcr pour la conclusion
de cet armistice des conditions qui ne me con–
viennent pas, je vous fournirai des thcmes pour
prolonger les pourparlers avec
l\f.
de Bubna, et
pour me ménager les quelques jours qu'il me fau–
d~ait
pour rejeter les coalisés loin du tcrritoire ·
de l'Autriche. -
Dans Je moment, pour son malheur et Je notre,
Napoléon venait de recevoir Ja nouvelle que le
maréchal Davoust était aux portes de Hambourg,
et
s~rait
certainement entré dans cette ville le
t er
juin. On était au 5; il imagina done de ré–
soudre Ja difficulté de Hambourg, en disant dans
l'armistice que, relativemcnt aux provinces han–
séatiques, on accepterait ce que le sort des armes
aurait décidé le 8 juin
a
minuit. Quant
a
Breslau,
il
accorda qu'on laisserait entre les deux armées
un terrain neutre d'une dizaine de licues, lequel
comprendrait Breslau, et quant
a
la durée de
l'armistice, qu'elle s'étendrait jusqu'au 20 juillet,
avec six jours de délai entre la dénonciation de
l'armistice et la reprise des hostilltés, ce qui con–
duirait jusqu'au 26 juillet, et ferait pres de deux
mois. 11 envoya ces conditions avec injonction de
rompr·e
a
l'instaut meme si elles n'étaient pas
admises.
M. de CauJaincourt les ayant présentées le
4 juin , les commissaires, qui avaient ordre de
céder si Breslau ne rest.ait pas dans les mains de
Napoléoo , cédcrent en effet, et cet armistice
fu–
neste, qui a été l'un des plus grands malheurs
de Napoléon, fut signé le 4 juin.
ll
fut convenu
qu'on adopterait pour ligne de démarcation entre
]es deux armécs
Ja ~
Katzbach , afin de laisser
Breslau en dehors comme
tre; qu'apres la
Katzbach on prendrait l'Oder, ce qµi nous assu–
rait la basse Silésie pour y stationner et
y
vivre ;