74
LIVRE QUAHANTE-NEUVIE!\1E.
la-France et
a
offenser son honneur.
JI
écrivit
au prince Cambacéres, auqucl
il
avait remis en
partant le dépót de son autorité, que l'armistice
signé pourrait sans doutc conduire
a
la paix,
qu'il
ne f'allait pas toutefois que ce (út une raison
de ralentir les prépamtifs de guerre, mais au
contraire une raison de les redoubler
,
car ce
n'était qu'autant qu'on 1,errait que nous étions
formidables sur tous les points, que la paix
pourrait étre súre et honorable. - Mais
au prince
Cambacéres pas plus qu'aux autres, il n'osa dire
ce qu'il entendait par une paix sure et hono–
rable, et il se garda de lui avouer qu'il ne considé–
rait pas comme telle une paix qui, indépendam–
ment du Rhin et des Alpes, concédait directement
ou indirectement
a
la France la Hollande, la
Westphalie, le Piémont, la Lombardie, la Tos–
cane, les États romains et Naples.
A l\f. de Bassano seul, qu'il ne pouvait pas
tromper, puisque ce ministre était l'intermé–
diaire de toutesles communications de la France
avec les puissances européennes, et duquel
il
n'avait pas d'ailleurs la moindre objection
a
craindre,
il
découvrit sa vraie pensée, en lui con–
fiant le soin de recevoir
a
sa place M. de Bubna.
11
lui dit qu'il ne voulait pas voir cet envoyé,
pour n'avoir pas
a
se prononcer sur les condi–
tions de l'Autriche;
iI
lui enjoignit de l'emmener
a Dresde, ou devait bieutót revenir le quartier
général
fran~ais,
et de l'y retenir jusqu'a son
rctour, ce qui ferait gagncr une dizai11e de jours,
et conduirait a la mi-juin avant d'avoir réuni les
plénipotentiaires. En soulevant ens_uitc des diffi–
cultés de forme,
il
était possible d'atteindre le
mois
de juillet saos s'etre prononcé sur le fond
des choses. Puis en montrant au dernier moment
quclque disposition
a
traiter, et en argumentant
du peu de temps qui resterait alors,
il
serait
cncore possible de faire prolonger d'un mois la
durée de l'arrnistice, ce qui aprcs juin et juillet
assurerait tout le mois d'aout , et procurerait
ainsi trois mois pour armer, trois mois dont les
puissances coalisées profiteraient sans doute,
mais pas autant que la France, car elles n'étaient
adrninistrées ni avec la meme activité ni avec le
meme génie.
Ce plan arre té, Napoléon
fit
partir M. de Bas–
sano pour Dresde, en le chargeant d'annoncer sa
prochaine arrivée dans cette capitale, et de lui
chercher en dehors des résidences royales une
habitation commode et convenable, ou il füt a la
fois a la ville et
a
la campagne, ou il put travail–
ler en liberté, respircr un air pur, eL se trouver
a
portée des camps d'instruction établis au
bord de l'Elbc. Il ordonna d'y amener une
partie de sa maison, la Comédie franc;aise elle–
méme, afio d'y déployer une sorte de splendeur
pacifique, qui respirat la satisfaction,
la
confiance
et le penchant au repos, penchant qui n'avait
jama.i_s moins pénétré dans son ame.
Il
est
bon,
écrivit-il au prince Cambacéres,
qu'on c1·oie que
nous nous amusons ici.
Suivant son usage, Napoléon ne quilla point
ses troupes sans avoir assuré leur entretien, leur
bonne santé, et leur instruction pendant la durée
de la suspension d'armes.
11
s'était réservé,
d'apres les conditions de cet armistice, la basse
Silésie, pays riche en toutes sortes de ressources
tant pour la nourrit9re que pour le vetement
des hommes.
11
y
répartit ses corps d'armée,
depuis
les
montagnes de la BohCme jusqu'a
_I'Oder, de la maniere suivante.
11
pla~a
Reynier
a
Gorlitz avec le 7° corps, Macdonald a Lowen–
berg avec le
11
º,
Lauriston a Goldberg avec le 5°,
Ney
a
Licgnitz avec le 3°, l\farmont a Buntzlau
avec Je 6°, Bertrand a Sprottau avec le 4°, Mor–
tier aux enviTons de Glogau avec l'infanterie de
la jeune garde, Victor
a
Crossen avec le 2°,
Latour-Maubourg et Sébastiani au bord de l'Oder
avec la cavalerie de réserve. Le maréchal Oudi–
not, avec le corps destiné a marcher sur Berlin,
fut cantonné sur les limites de la Saxe et du
Brandebourg, lesquelles formaient de l'Oder
a
l'Elbe la ligne de démarcation stipulée par l'armi–
stice. Ces divers corps durent camper dans des
villages ou des baraques, manreuvrcr, se reposer
et bien vivre. lis devaient etrc entretenus au
moyen de réquisitions sur le pays, ménagécs de
maniere
a
pouvoir y subsister trois mois au
moins,
et
a
y former des approvisionnements
pour l'époque du renouvellement des hostilités.
Napoléon prescrivit en outre des levées de draps
et
de toilcs dans la partie de la Silésie qui lui était
restée, et qui les produisait en ahondance, afin
de réparer le vetement déja usé de ses soldats.
La Silésie devant, dans tous les cas, revenir
a
la
P1·ussc, puisque l'Autriche n'en voulait pas,
il
n'avait
a
la ménager que pour en faire durer les
ressources aussi longtemps que ses besoins.
De touLes ses places sur l'Oder et la Vistulc,
celle de Glogau ayant cu seule l'avantage d'étre
débloquée,
il
en renouvela la garnison et les
approvisionnements, et ordonna d'en perfection–
ner les moyens de défcnse..
11
expédia des offi–
ciers
a
Custrin, Stettin, Dantzig, pour apprendre
a
ces garnisons les derniers triomphes de nos