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CONCLUSION.

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Les eoneeptions étaient plus vastes saos donte,

l'exécution était moiÍls parfaite. Dans la gucrre

<le Russie nolamment, le luxe introduit parmi

nos généraux, les précautions imaginées contre

un cJimat inconnu et redouté, avaient chargc

l'armée d'équipages, embarrassants meme

a

de

faib les distances, accablants

a

des distanccs con–

sidérables. De plus le désir de pousser au nom–

bre, l'habitude de tout terminer par un habilc

maniemcnt des masscs, avaient fait négliger la

qualité des troupes. Un seul corps était resté

modele, celui du maréchal Davoust, et 200 rnille

hommes comme les siens eussent gagné Ja cause

que perdirent les 600 miJle transportés au dela

du Niémen. l\Jais, singulier exemple des progres

de la bassesse sous le despotisme

!

on en vouJait

presque au maréchal Davoust d'ctre derneuré si

sévcre, si eorreet dans la tenue de ses troupes,

au milieu de Ja corruption génfrale. Ainsi l'art,

parvenu

a

sa perfection théorique dans les con–

ceptions de Napoléon, s'était quelque pcu eor–

rompu dans la pratique. La campagne de

18·12

présen la l'image d'une cxpéJition

a

la maniere de

Xerxes. Huit jours s'étaient

a

peine écotJlés depuis

Je passage du Niémen, que 200 mille hommes

avaient déja quilté les drapeaux, et <lonnaient Je

speclaelc <léplorable et eontagicux d'unc dissolu–

Lion <l'armée. Peut-etre en s'arrctant Napoléon

aurait-il resserré ses rangs, consolidé sa base

d'opération , et réussi

a

porter un coup mortel

au eolosse russe. lUais en présence de l'Europc

atlcntive, sourdement et profondémcnthaineuse,

désiraJlt notre ruine,

il

fallait uu de ces prodiges

sous Icsquels Napoléon l'avait accoutumée a fl é–

c_hir, eommc AuslerliLz, Iéna, Friedland. Napo–

léon courut aprcs ce prodige jusqu'aux bords de

la l\foskowa,

y

trouva un prodige, en effct, clans

la journée du 7 septembre

1812,

mais un pro–

dige de carnagc, et ríen de décisif, alla chcrchcr

du décisif jusqu'a lUoscou meme, y tro.uva du

mcrveilleux, puis un sacrificc patriotique cffroya–

blc, !'incendie do Moscou, et resta ainsi tout un

mois hésitant, incerlain

a

l'cxlrémité d

ll

monde

civilisé. Jamais assurément

il

ne mon lra plus de

lénacité, d'csprit de combinaison que dans les

vingt et quelques jours passés et pcrdus

h

l\Joscou.

l\Iais Ja constancc épuiséc de ses licutenanls

~manqua

aux cembinaisons par lesqucllcs

il

vou–

lait sortir de l'abime

ou

il s'était jeté. 11 fallut

reve.nir. Le climat, la distancc, agissant a la fois

sur une armée aceablée des fardeaux qu'elle por–

tait avcc elle, et qui comptait daos ses rangs

trop d'élrangers, trop

de

jeunes gens, ccLte ar-

mée tomba en dissolution au milieu de l'iwme.n–

sité glacée de la Russie. Au début de la retraite

Napoléon cut quelques jours de stupéfaction qui

donncrent

a

sop caractcre une apparence de dé–

faillance, mais ce furent c¡uelques jours perdus

a

conlcmpler,

a

reconnaitre son prodigieux chan–

gcment de fortunc. A

la

Bérézina son earactere

reparut tout entier, et il ne faillít plus meme

a

Watcrloo. Ceux qui accusent ici le génie mili–

taire <le Napoléon commettcnt une erreur de'

jugement. Ce n'est pas au génie militaire de

Napoléon qu'il faut s'en prcn<lre, mais

a

cette

vo~onté

délirante, impatiente <le tous les obsta–

cles, qui des hommes voulant s'étendre

a

la

uature, trouva <lans la nature la résistancc qu'elle

ne trouvait plus dans les hommes, et succomha

sous les élémcnts déchainés. Ce n'cst done pas le

militaire qui cut lort et fut puni par le résultat,

c'cst le despote

a

la

fa~on

des despotes d'Asie.

Avec moins d'espri.t qu'il n'en avait, et dans un

autre siecle, Napoléon at,uait peut-etre commc

Xcrxcs foit fouetler la mer pour lui uvoir déso–

béi. Pourt.anl on vit bien quelque chose qui rap–

pclai t celte extravagance, car pendant plusieurs

mois ce fut un déchaincmcnt inou'i de ses écri–

vains cootre le climat de la llussie, seule cause,

affirmaicnt -ils, de tous nos malheurs . Ainsi la

forme des choses ehangc, mais la folie humaine

persiste!

Napoléon déscrlant son armée, disenL ses dé–

lractcurs, la quittant sans pitié, dira l'i1upartiale

histoirc, afio d'allcr en préparer une autre, tra–

versa l'Allcmagnc en sccret, l'Allemagnc plus

stupéfaite que lui, et ayan t besoin, elle aussi, de

se reconnailre pour croire

a

son changcment de

fortunc . 11 cut le temps d'échappcr et de ressai–

sir

a

París les renes de l'Empire. La Francc

constcr,néc lui fournit avec un crnpressemcnt oll

il

n'entrait aucunc indulgence pour ses erreurs ,

de quoi vengcr et relcvcr nos armes. Il employa

ces dcrnicrcs ressources avcc un génie militaire

éprouvé et agrandj par le rnal heur. L'Allemagnc

soulcvéc avait tendu les mains

a

la

H.ussie, et

a

J'union de l'Europe contrc nous

il

ne manquait

que l'Autrichc. De la conduite qu'on Liendrait

cnvcrs celle puissance allait dépendrc le salut

ou la ruine de la France. L'Autriche prit tout

a

coup une atlitudc aussi honorable qu'habile,

a

la–

quellc on n'avait pas mcme droit de s'attendrc, et

qu'on dut Qniqucmcnt au ministre négociateur

du mariagc de l\Iaric-Louisc, lequel cherchait

a

ménager convcnablement la transition de l'al–

Iiance

a

la g·uerrc. Entre les pcuples de l'Europe