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LIVHE CINQUANTE-TROISIEME.

voulant que tous les opprimés s'unissent contrc

le commun oppresseur, et la France i'nvoquant

les liens d u sang, l'Autriche se posa hardiment

et franchement en arbitre. Elle dcmandait

certes bien peu de chose, elle demandait qu'on

renon~at

a cette Allemagne

fran~aise

qualifiée

de Confédération du Rhin, qu'on rendit

a

l'Al–

lemagne ses porls indispensables, Lubeck, Ham–

bourg, Breme, qu'on lui rendit

a

elle-meme

Trieste, qu'enfin on

renon~at

a

cette fau sse Po–

logne appelée grand-duché de Varsovie. A ce

prix elle nous laissait la Westphalie, la Lomhar–

die et NaPlcs

a

titre de royaumes vassaux, la

HolJande, le Piémont, la Toscane, les États ro–

mains constitués en départements

fran~ais,

et ne

parlait pas de l'Espagnc. Elle nous concédait

done

d~ux

fois plus que nous ne devions dési–

rcr, et deux foix plus _que le fils de Napoléon

n'aurait pu garder. Napoléon ne voul¡mt pa&

croire que l'Aul.riche osat sérieusement se con–

stituer arbitre entre híi et l'Europe, se flattant,

depuis que la guerre s'était rapprochée du

Rbin~

de la soule]lir

vi~torieusement,

se bata, pendant

qu'on négociait, de gagner deux batailles, celles

de Lutzen et de Bautzen, ou, sans cavalerie et

avec une infanterie cornposée d'enfants, il

batl.it

les meilleures troupes de l'Europe; puis traitant

l'Autriche en subalterne, ne tenant aucun comptc

de ses avis, memc de ses prieres, convaincu

qu'il

re~e

ait sa grandeur sans elle, malgré elle,

iI

rompit l'armistice de Dresde, et

recommcn~a

eettc funeste Iutte avec l'Europe entiere, qu'il

ouvrit par ·une des .plus bcll'és victoires de son

regnc, celle de Dresde, lutte dont

il

serait peut–

etre sorti victorieux s'il se fllt borné

a

défendre

la ligne de l'Elbe, d·e Krenigstein

a

:Magdebourg,

l\Iais dans la téméraire cspérance de refaire d'un

scul coup et touL c·ntiere son ancienne grandeur,

il voulut étendrc sa gauche jusqu'a Bcrlin, sa

droite jusqu'aux environs de Brcslau, afin d'in–

terceptcr les sccours qu'on aurait pu cnvoyer de

Prague

a

Berlin, et tandis que de sa personne il

i·cstait victorieux sur l'Elbe,

·n

fut vaincu dans

la

personne de ses lieulcnanls, tant sur la route

.de Breslau que sur cclle de Berlín, fut alors

obligé de se concentrer, se concentra trop tard ,

perdit la ligue de l'Elbe, essay:,l de la reconqué–

ril'

a

Leipzig, et la, dans la plus grande action

guerriere <les siecles,

lut.ta

trois jours conséculifs

sans pcrdrc son champ de bataille. Mais réduit

a

battre en retraite,

il

fut atteint par un accident

funeste, l'cxplosion du pont de Leipzig, acci–

denL fo1·tuiL c:n apparence, en réalité inévitable,

car il résultait des proportions exorbitantes que

Napoléon avait données

a

toutcs choses. Il y

perdit une partie de son armée, et ce déplorable

accident lui valut, de la Saalc au Rhin, une se–

conde rctraite, moins longue mais presque aussi

triste que celle de Russie. Le typhus acheva sur

le Rhin cettc arméc que la France lui avait four–

nie pour réparer le désastre de

1812.

Une fois sur le Rhin, l'Autriche pcrsistant

dans sa prudencc,

fit

offrir

a

Napoléon la paix

aux conclitions du traité de Lunéville, e'cst-a–

dire la France avec ses frontieres naturelles.

11

ne la refusa point, mais il exprima son accepta–

Lion avec une ambigu'ité de Iangage qui tenait

a

la fois a l'orgucil et

a

la crainte de s'affaiblir

par trop d'empressement

a

traiter : nouvelle

foute qui, celte fois, était la suite presque iné–

vitable des fautes antérieures. Mais l'Europe,

qui ava it tremblé

a

l'idée d'envahir la France,

apprit bientót en approchant combien Napoléon

s'était aliéné les espr.its; elle profita des lors de

I'ambiguité de l'acceptation pour retirer ses of–

fres, et marcha droit sur París. Napoléon, qui

croyait avoir le ternps de réunir des forces suffi–

santcs, et se regardait commc inviciblc en de<¡a

dÚ Rhin, n'eut que les tristes restes de Leipzig pour

tenir tete

a

l'Europe, c'est-a-dirc

60

a

70

mille

hommes, les uns épuisés, les autrcs enfants,

contre

500

mille soldats aguerrís. Én ce moment

on lui proposa encóre la paix, mais avec la France

de

'1790.

AyanL pour la premierefoisraison contre

ses conseillers, au lieu du fol orgueil d'un conqué- .

rant asiatique déployant le noble orgucil du ci–

toyen, compre11ant que la France de

1790

serait

mieux placée dans les mains des Bourbons que

dans les sienncs,

i1

rcfusa les condilions ele Cha–

Lillon, et, n'ayant que des débris, lutta jusqu'au

dernier jour avec une éncrgie indomptable.

L'histoirc, on p_cut le dire, ne présente pas

deux fois le spectaclc exlraordinaire qu'il offrit

pcndant ces deux mois de février et mars

1814.

En cffct, ses licu tcnants assaillis par toutcs les

frontieres se rc lirent en désordre, et arrivcnt

a

Cbalons consternés.

11

accourt, scul, ;)ans autre

rcnfort que lui-méme, les rassure, les ranime,

rcnd Ja conGanee

a

ses soldats démoralisés, se

précipite au-devant de l'invasion

a

Bricnne,

a

la

Rothicre, s' bat dans la proportioo

d'1111

eontre

quatre, et memo contre cinq, étonnc l'cnnemi

par la violcnce de ses coups, parvient ainsi a

l'arreter, profite alors de quelques jours de r épi

t,

conquis

a

la pointe de l'épée, pour munir de

forces indispensables Ja Marne, l'Aube, Ja Seine,