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LIVRE CINQUANTE-TROISIE!\'JE.
ce n'était pas tout encore. L'Einpire d'Occident
pour etre complet devait embrasser I'Allemagne.
Napoléon s'y était créé pour alliés les princes de
Baviere, de Wurtemberg, de Baden.
JI
leur
abandonna les dépouilles de l'Autriche, de la
Prussc, des princcs ecclésiastiques non séculari–
sés, leur livra la noblesse immédiate, les
fit
rois
et Jeur demanda pour ses frcres , ses enfünts
adoptifs et ses lieutenants, des prineesses qu'ils
Jivrerent avec empressement. A ce meme mo–
ment l'Allemagne, qui n'était pas remise encore
des bouleversements que le systeme des sécula–
risations y avait produits, chez laquelle restaient
une foule de questions pendantes, tomba dans
un état de désordre extraordinai11e. Les princes
souverains, demeurés électcurs ou devenus rois,
piilaient les bicns de la noblesse et de l'Église,
ne payaicnt pas les pensions des princes ecclé–
siastiques-dépossédés, et tous les opprimés, dans
1eur désespoir, invoquaient, non l'Autriche vain–
cue ou la Prusse frappée de ridicule, mais Je
maitre unique des existences, c'est-a-dire Napo–
léon. De ce recours universel a luí, naquit l'idée
d'une nouvclle confédération germanique, qui
porterait le titre de Confédération du Rhin, et
serait placée sous le protectorat de Napoléon.
Elle se composa de la Baviere, du Wurtemberg,
de Baden-, de Nassau, et de tous les princes du
rnidi de l'Allemagne. Ainsi l'Empereur d'Occi–
dent, médiateur de la Suisse, protecteur de la
Confédération du Rhin, suzerain des royaumes
de Naples, d'ltalie, de Hollande, n'avait plus que
l'Espagne a joindre a ces États vassaux, et
i1
serait alors plus puissant que CbarJemagne. Voila
jusqu'ou était montée la fumée de l'orgueil dans
Je vaste cerveau de Napoléon.
En présence d'une pareille dislocation, Fran–
~ois
11
ne pouvant conserver le titre d'Empereur
d'Allemagne, abdiqua ce titre pour ne plus s'ap–
peler qu'Empereur d'Autrichc. C'était , apres
toutcs ses pertes de territoire, la plus humiliante
des dégradations
a
subir. La Prusse, chassée elle
aussi de Ja vieille Confédération germanique,
avait pour ressource de rattacher autour d'elle
les princes du nord del'Allemagne, et de se faire
ainsi le chef d'une petite Allemagne réduite au
tiers. EIJe en demanda la permission qu'on lui
accorda froidement, avcc Ja secrete pensée de
décourager ceux qui seraient ten tés de se confé–
dérer avec elle. C'étaient done griefs sur griefs,
el pour l'Autriche qu'il eut fallu punir sans Ja
pousser au désespoir, et pour la Prusse qu'il eut
fallu chercher
a
s'attacher en servant ses inté-
rets, et en ménageant son honneur. Enfin, c'était
Ja plus illusoire de toutes les politiques que
d'e11~
trer
a
ce point dans les affaires germaniques. En
effet, dans le cours du moyen age, l'Allemagne,
ne pouvant arrivcr
a
l'unité, s'était arretée a
l'état fédératif. Tout en réservant leur indépen–
dance, les États qui Ja composent s'étaient con–
f
édérés, pour se défendre contre leurs puissants
voisins, et naturellement contre le plus puissant
de tous, contre la Francc. A cela la France avait
répondu par une politique tout aussi naturelle et
tout aussi légitime. Profitant des jalousies alle–
mandes, elle avait appuyé les petits princes
coatre les grands, et la Prusse contre l'Autriche.
Mais de cette poli tique traditionnelle et Jégitime,
aller jusqu'a créer une Confédération germani–
que , qui ne serait pas germanique mais frani;aise,
qui nous chargerait de toutes les affaires des
Allemands, nous exposerait a toutes Jeurs haines,
nous donnerait des aJliés du jour destinés
a
etrc
des traitres du lendemain, était de la folie d'am–
bition, et ríen de plus. Dans tout pays qui a une
politique traditionnelle, il existe un but assigné
par cette politique, et vers lequel on marche
plus ou moins vite selon les temps. Faire
a
chaque époque un pas vers ce but, c'est marcher
comme la na tu re des choses. En faireplus d'un est
imprudent; les vouloir faire tous a Ja fois c'est se
condamner certainement a manquer Je but en le
dépassant. Par Je recez de
1805,
Napoléon avait
approché autant que possible du but de nQtre
politique traditionnelle en Allemagne. Par la
Confédération du Rhin, il J'avait désastrcuse–
ment dépassé. Il étaít ainsi dans Je droit inter–
national ce que les Jacobins avaient été dans le
droit social. lis avaient voulu refaire Ja société,
il voulait refaire l'Europe . Ils y avaient empfoyé
la guillotine; il y employait le canon. Le moyen
était infinimentmoinsodieux, etentouréd'ailleurs
du prestige delagloire. Il n'était guere plus sensé.
'fels étaient les fruits de la grande victoire
d'Austerlitz. Malgré ces erreurs Ja victoire sub–
sistait, éclatante, écrasante. La Russie profon–
dément abattue, J'Angleterrc effrayée de son
isolement, souhaitaient la paix, et rien n'était
plus facile que de la conclurc avec ces deux
puissances. N.JFoléon en laissa passer l'occasion,
et mit ainsi Je comble a ses
fa
utes.
Au sujet des bouches du Cattaro que les Au–
trichiens avaient perfidement livrées aux Russes,
au lieu de nous les remettre, Je czaravait envoyé
M. d'Oubril
a
Paris. L'Autriche, la Prusse, ayant
directement traité Jeurs affaires avec la France,