CONCLUSION.
En voyant finir si désastreusement ce regne
prodigieux, les rcflexions se pressent en foule
dans !'esprit, suggérées par la grandeur, l'abon–
danee, le caractere étrange des événements
!
Recueillons-les avant de clore ce récit, pour notre
instruction et pour celle des siecles
a
venir.
Le gouvernement r épublicain en
'1795,
ayapt
cessé d'étre sanguinaire saos cesser d'étre persé–
cuteur, avait imposé la paix
a
l'Espagne,
a
la
Prusse,
a
l'Allemagne du Nord, et restait eogagé
dans une guerre trainante avec l'Autriche, obs–
tinée avec l'Angleterre, guerre qu'il soutenait
pour ainsi dire par habitude, au moyen de sol–
dats admirables, de généraux excellents mais
désunis, lorsque apparut tout
a
coup
a
l'armée
· des Alpes un jeune officier d'artillerie, de petite
taille, de visage sauvagé mais supcrbe, d'esprit
singulier mais frappant, tour
a
tour taciturne ou
prodigue de ses paroles, un moment disgracié
par la République, et relégué alors daos les bu–
reaux du Directoire dont il attira l'attention par
des opinions justes et profondes sur chaque eir–
constance de la guerre, ce qui Iui valut le com–
mandement de Paris dans lajournée du
'15
vendé–
miaire, et bientót le commandement des troupes
d'Italie. Reparaissaot au milieu d'elles comme
général en chef,
il
imprima tout
a
coup aux évé-
nemcnts un mouvement extraordinaire, franchit
les Alpes dont on n'avait jamais fait que toucher
le pied, envahit la Lombardie,
y
attira toute la
guerre, vainquit l'une apres l'autre les armées de
l'Autriche, lassa sa constance , lui arracha la re–
connaissance de nos conquétes, la for<¡a de sous–
crire
a
des ·pertes immenses pour elle-méme,
donna ainsi la paix au continent , et
a
ses actes
étonnants ajouta un langage entieremcnt nou–
veau par son originalité et sa grandeur, langage
qu'on peut appeler l'éloquence militaire. Que ce
jeune homme extraordinaire, apparaissantcomme
un météore sur
e.ethorizon troublé et sanglant,
n'y
attirat pas tous les regards, et ne finit par
les eharmer, c'était impossible
!
La France eUt–
elle été de glace, ce qu'elle ne fut jamais, la
France eut été séduite. Elle
fut
séduite en effet,
et le monde avec elle.
Entre les puissances auxquelles la Révolution
avait jeté le gant, une seule restait
a
vaincre,
c'était l'Angleterre. Retirée sur son élément,
inaccessible pour nous comme nous l'étions pour
elle, on eut dit qu'elle ne pouvait étre ni vaincue
ni victorieuse. Le Directoire cherchant
a
occu–
per le conquérant de I'Italie, et le regardan t
comme
le
capitaine non-seulement le plus grand
du siecle, mais le plus fécond en ressources, le