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PREMIERE :ADDICATION. -

AVIUL

i8t4.

567

Na·poléon suivait, ayan:t daos la sienne le ·gé–

néral ·Bertrand; les commissaires aes puissances

venaient ensuite. Pendant les premicrs relais,

des détachements

a

cheval de la garde accompa–

gnerent le co.rMge. Plus loiFl, les détachrements

manquan't on

marc~a

saos escorte. Dans la partie,

de la Fraaoe qu'eu .traversait, et jusqulal!l milieu

du Bourbonnais, Napoléon fut accueilli •par les

acclamatioms dl!l p.euple, qui, tout en maudissant

la conscríption et les d.roits ré1mis, voyait en lui

le héros malhenreux ·et le vaHJant défenSeuir du

sol national. Tandis

~·ue

la fouie entourait sa

voiture en criant :

Vive

l'

empereur

!

eHe faisait

entenBre autourde celle des cornmissaires lecri:

Á

bas les

élra;nger.s

!

Plusieurs

fois

NapoiJéon

s'excusa aupres d'cux de manHestations qu'il ne

dépendait pas de lui d'empecher, mais qui prou –

va·ient ccpendant qu'il n'était pas dans toute la

Franoe aussi impopulaire qu'on avait voulu le

diire. En général :il s'entretcnait librement et

doucement avcc les fonctionnaiircs qu'il rencon–

trait sur la reute, ·rocevait Jeurs ·adicux, et leur

faisait

les

siens, avec une ·parfaiite tranquillité

d'esprit.

llientot le voyage devint plus péníble. Aux en–

virons de Moulins, les eris de

'f/ive

l'em:pereur

!

cesserent, et ceu:x de

Vive le roi! Vivent les

Bourbons

!

se firent entendre. Entre Moulins et

Lyon, le peuple ne montra que de la curiosité,

saos

y

ajouter aucun témoignage significatif. A

Lyon, Napoléon avait toujours compté beaucoup

de partisans, sensibles

a

ce qu'il avait fait pour

leur ville et pour leur industrie; néanmoins

il

y

avait aussi une portion de la population qui pro–

fessai t des sentimcnls entierement contraires.

Afio d'éviter toute manifcstation , on traversa

Lyon pendant la nuit. Pourtant quelques cris de

Vive l'empereur

!

accueillirent le cortége im–

périal. Mais ce furent les dcrnjers. En traversant

Valence, Napoléon rencontra le maréchal Augc–

reau qui venait de puhlier une proclamation in–

digne, rédigée, dit-on, par le duc d'Otrante, et

se terminant par ces mots : " Soldats, vous eles

" déliés de vos serments; vous l'etes par la na–

«

tion en qui réside la souveraineté; vous l'etes

" encore, s'il était nécessairc, par l'abdication

" meme d'un homme qui, apres avoir immolé

u

des millions de victimes

a

sa cruelle ambitiori,

«

n'a pas su niourir

en

soldat.

,,

Le pauvre Au–

gereau l'avait su encore moins, et ne s'était pas

exposé

a

mourir sur la Saóne et le Rhone, ou il

avait contribué, par sa faiblesse et son ineptie,

a

ruiner les a:ffaires de la France. Napoléon qui ne

cenna•issait pas sa prociam ation, mais qui con–

naissa~'t

sa triste campagne, ne lui fit cependant

aucl!ln reproche, l'accueillit avec une familiarité

indulg-ente, et l'cmbrassa meme en le quittant.

En

a'Varn;ant vers le Midi , les cris de

Vive

le roi

!

se multi1p1ierent, et hientot s'y ajouterent ceax–

ci :

A

bas le

tyran

!

A rnort le tyran

!

-

A

Ora•nge,

1

notamment, ces cris furent proférés avec

·Violence. A Avignon, Ja population amcutée de–

mandait avec emportement qu'on lui livrat

le

Corse

pour le mettrc en pieoes et Ie précipiter

clans le Rhónc. Tanclis qu'on traitait de

la

sorte

J.e génie, coupablie •mais glorieux, dans lequel

s'étaient longbemps personnifiées la prospérirté et

l•a granaeur de la France, on criait :

Vivent les

af.liés

!

autoor de la

voi~ure

des commissaf.res.

Du reste

~ctte

faveur pour l'étranger était hcu–

reuse en ce moment, car saos la popularité ilont

jouissaient les représentants des puissances , Na–

poléon égorgé eet devaneé dans les eaux du

-Rhóne

~'infortuné

maréchal Brune. U fallut en

eífet tous tles efforls des commissaires, des auto–

rités, de

ia

gendarmerie, pour empccher un hor–

rible forfait. A Orgon, on annon<;ait un nom–

breux rassemblement de peuple, et des scenes

plus violentes encore. Ces populations ardentes,

exaspérées par

fa

conscription , par les droits

réunis, et par une longue privation de tout com–

merce, étaient royalistes en

1814,

comme elles

avaient été terroristes en

i

795, et n'avaient he–

soin que d'une occasion pour se montrer aussi

sanguinaires. Les commissaires, chargés d'une

immense responsahlité, ne virent d'autre moyen

d'échapper au péril que de faire prendre

a

Na–

µoléon un déguisement, et on l'obligea de re–

vetir un uniforme étrangcr, afio qu'il parut etre

un des officiers composant le cortége . Cette hu–

miliation, la plus douloureuse qu'il eut encore

subie , avait été, on s'en souvient, présente

a

son

esprit lorsqu'il avait avalé le poison préparé par

le docteur Yvan; et pourtant, toute douloureuse

qu'elle était, on put bientot reconnaitre

a

que!

point elle était nécessaire. Lorsqu'on eut atteint

la pctite ville d'Orgon, le peuple armé d'une

potence., se présenta en demandant le tyran, et

se jeta sur la voiture impériale pour l'ouvrir de

force. Elle ne contenait que le général Bertrand,

qui peut-etre eut payé de sa vie la fureur excitée

contre son maitre, si

l\f.

de Schouvaloíf se jetant

a

has de sa voiture, et comme tous les Russes

parlant tres-bien le fran<;ais, n'eut cherché

a

ré–

veiller chez ces furieux les sentiments que devait

inspirer un vaincu, un prisonnier. Au surplus